Dans le cadre de la future Présidence française de l’Union européenne en 2022, il semble aussi impératif de mettre la gouvernance de la filière santé au sommet de l’agenda pour permettre à l’avenir de mieux coordonner les réponses face aux crises sanitaires. Cela peut passer à la fois par l’accélération de la création de la Health Emergency Response Authority, inspirée du BARDA américain (Biomedical Advanced Research and Development Authority) mais aussi par des politiques de mise en commun des données de santé entre les différents États membres. Par ailleurs, il est nécessaire de prolonger le travail d’harmonisation des procédures d’accès au marché engagé avec l’European Medicines Agency en créant notamment les conditions d’une évaluation européenne des technologies de santé (harmonisation des méthodes et des critères, évaluation communautaire, etc.).
Ensuite, il paraît essentiel de développer des outils de pilotage de la filière par la donnée et favoriser les usages numériques au service des patients afin de repenser les modèles de régulation. Par exemple, la mise en place d’un tableau de bord de la filière santé permettrait de mieux piloter le système à partir d’un nombre limité d’indicateurs sanitaires (espérance de vie en bonne santé, couverture vaccinale, etc.), organisationnels (nombre de dossiers médicaux partagés ouverts et actifs, suivi de l’observance, etc.) et économiques (croissance du nombre de d’emplois, investissement en R&D par les acteurs publics et privés), construits et partagés par l’ensemble des parties prenantes. De la même manière que les objectifs de développement durable de l’ONU, ces grands indicateurs pourraient servir de boussole pour les acteurs publics et privés du système. La crise a également démontré qu’il est devenu impératif de favoriser le développement de solutions numériques qui améliorent la qualité des soins pour les patients. Il faudrait à ce titre mettre en place des mécanismes d’incitation des professionnels de santé à l’adoption des usages numériques et d’imaginer des programmes d’accompagnement par les acteurs de la filière.
Enfin, notre système de santé doit de toute urgence opérer le tournant de la prévention. Il faut investir massivement dans la prévention et la coordination des parcours de soins grâce au numérique. Pour ce faire, le développement de nouveaux modèles de financement est clé afin de favoriser l’émergence de plateformes d’intégration de soins et la collaboration entre professionnels (financement au parcours et à la performance, développement d’approches populationnelles, indicateurs de résultats, etc.). Finalement, un signal fort pourrait être envoyé en transformant l’Assurance maladie en Assurance "santé", capable d’intégrer dans son champ non pas uniquement la gestion des risques et de la maladie, mais également les notions d’investissements, de prévention et donc de gestion de la santé sur le long terme.
Dans la perspective de la présidentielle, faire de la "santé publique" un critère politique global, capable de créer les conditions de la structuration de la filière santé française
En novembre 2020, 2 Français sur 3 estimaient que le plus important était de limiter l’épidémie de Covid-19, même si cela avait un impact négatif sur l’économie du pays et l’emploi. Ce chiffre illustre le renversement de la hiérarchie des normes politiques qui est en train de s’opérer. En réalité, plutôt que d’opposer santé et économie, cette crise peut être le moment de faire de la santé publique un critère politique global, qui intègre les notions d’économie, de justice sociale et d’écologie. Ainsi, les propositions de l’Institut Montaigne envisagent ces enjeux de manière transverse et visent à créer les conditions de la structuration d’une filière santé française plus transparente, collaborative, tournée vers l’international et prête à affronter les éventuelles futures pandémies.
Copyright : THOMAS SAMSON / AFP
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