AccueilSantéL'action publique face à la crise du Covid-19Note Juin 2020L'action publique face à la crise du Covid-19 Santé Action publique Vie démocratiqueImprimerPARTAGERAuteur Nicolas Bauquet Expert en transformation publique Nicolas Bauquet était Senior Fellow à l’Institut Montaigne jusqu'en juin 2022. Il est l'auteur des notes Régions : le renouveau de l’action publique ? (juin 2021), L’action publique face à la crise du Covid-19 (juin 2020). Il a également co-signé avec Laure Millet, responsable du programme santé à l’Institut Montaigne, Vaccination en France : l’enjeu de la confiance (décembre 2020). Nicolas a rejoint l’Institut en 2018 en qualité de directeur des études, puis directeur délégué à la transformation publique après huit ans au service de la diplomatie d’influence française. En tant que conseiller de coopération et d’action culturelle du Bureau français de Taipei de 2014 à 2018, il a travaillé au service du développement du "soft power" français en Asie. De 2010 à 2014, il a été conseiller culturel de l’ambassade de France près le Saint-Siège, et directeur du Centre Saint-Louis, le centre culturel français de Rome.Historien, il a consacré sa thèse de doctorat à la question des rapports entre religion et politique en Hongrie communiste. Ancien élève de l’École normale supérieure, agrégé d’histoire, il a notamment enseigné à Sciences Po et à Harvard. Personnes auditionnées Les opinions exprimées dans cette note n’engagent ni ces personnes ni les institutions dont elles sont membres.Paulo Almirante, directeur général adjoint et directeur général des opérations, EngieNicolas Arroum, directeur des ressources humaines pour l’Europe du Sud et de l’Ouest, SiemensBassem Asseh, adjoint à la maire de NantesMohammed Benlahsen, président, Université d’AmiensDavid Berman, directeur des affaires publiques, VeoliaJean-Luc Bertoglio, directeur général des services, agglomération de BéziersJean-Baptiste Blanc, vice-président du Conseil départemental du VaucluseAntoine Brachet, directeur associé, BluenoveLaurent Chambaud, directeur, École des hautes études en santé publique (EHESP)Jean-Baptise Cuzin, directeur de la coopération transfrontalière, européenne et internationale, Région Grand EstArnaud Danjean, député européenAnne de Danne, vice-présidente, MaxymaJuliette Decoux, associée, MazarsEudoxe Denis, directeur des affaires publiques, Plastic OmniumLaurent Dublanchet, vice-président aux affaires européennes et internationales, Air LiquideBertrand Dufour, directeur Organisation, NexityJulien Einaudi, directeur Pôle - groupe ORTECGérard Galpin, maire de Sillé-le-Guillaume (Sarthe)Henri de Grossouvre, directeur de la prospective, SuezDenis Jacquet, président, Day OneSylvain Juillard, directeur stratégie, développement et organisation, UBSMichelle Kelly Irving, chercheuse en épidémiologie sociale, INSERMTobias Kurth, professeur de santé publique et d’épidémiologie, directeur de l’Institut de Santé publique, Charité - Université de médecine, BerlinArmand Lafferère, directeur des affaires publiques, OranoSébastien-Yves Laurent, vice-président, Université de BordeauxAlessia Lefebure, directrice des études, École des hautes études en santé publique (EHESP)Gaëlle Lejosne, ingénieur en chef des Ponts, des Eaux et ForêtsStephen Lequet, directeur des affaires publiques, ServierPhilippe Martin, directeur immobilier, IBM FranceStanislas Martin, directeur des risques, EDFAllain Massot, responsable de projets, RandstadBertrand Monthubert, conseiller régional délégué à l’enseignement supérieur et à la recherche, Conseil Régional d’OccitanieAlexandre Mora, président, DexteraJules Nyssen, délégué général, Régions de FranceNicolas Portier, délégué général, Assemblée des communautés de FranceSolène Quéré, directrice des affaires publiques, IBM FranceNatalie Rastoin, Senior advisor, WPPAntoine de Saint-Affrique, CEO, Barry CallebautStéphane de Saint-Jean, directeur des Opérations industrielles Europe, bioMérieuxJean-Luc Tavernier, directeur général, INSEEJean-François Timsit, chef du service de réanimation médicale et des maladies infectieuses, Hôpital BichatIsabelle Tongio, directrice des affaires publiques, bioMérieuxManuel Tunon de Lara, président, Université de BordeauxBruno Valet, associé, Wavestone.David Valence, maire de Saint-DiéFlorence Verzelen, directrice générale adjointe, Dassault SystèmesJean-Luc Viau, maire-adjoint de Mont-Saint-Jean (Sarthe)Stephane Willard, deputy COO, UBSJorg Wuttke, vice-président, BASF ChinaCharles Znaty, président, MEDEF ParisJean-Jacques Zunino, directeur régional, Randstad Sommaire 1. Introduction 2. Une crise qui se déploie sur cinq niveaux d'action publique 3. Une crise qui révèle des failles et des opportunités 4. Les enseignements pour l’action publique Télécharger Note (64 pages) Résumé (2 pages) L’Institut Montaigne a souhaité livrer une première analyse de la gestion de la crise en France pendant les quatre mois de la crise sanitaire, de l’apparition des premiers cas domestiques à la fin du mois de janvier 2020, jusqu’à la mise en œuvre du déconfinement au mois de mai. Retour sur un défi sanitaire inédit.Quel regard porter sur l’attitude de notre pays durant la crise ? Quelles ont été nos réussites ? Nos échecs ? Quelles difficultés ont pu être rencontrées par les acteurs de terrain, les entreprises, les médecins et les scientifiques, les collectivités locales ou encore les hauts fonctionnaires ? Pourquoi ?Et surtout, comment préparer l’avenir désormais ? Quels enseignements tirer de cette expérience pour améliorer l’action publique ?Quels enseignements tirer de cette expérience pour améliorer l’action publique ?La note ouvre de nombreuses questions. Pour y répondre, nous nous sommes basés sur une cinquantaine de témoignages de personnalités issues du monde de l’entreprise, de la médecine et de la science, des collectivités locales ou de l’administration de notre pays, d’une part, et sur les benchmarks internationaux réalisés par l’Institut Montaigne, d’autre part, concernant les réponses d’Asie orientale et d’une dizaine de pays européens face à la crise. Ils révèlent que si notre système a tenu grâce à l’engagement exceptionnel des personnels de santé, et si des mesures rapides et efficaces ont permis de soutenir le tissu économique pendant la première phase du choc, la gestion de la crise par l’État a révélé des dysfonctionnements de l’action publique qui renvoient à des traits structurels. Une crise qui se déploie sur cinq niveaux d'action publique En replaçant la gestion de la crise sanitaire dans le cadre plus large de l’action publique, la note envisage cinq niveaux d’action.L’organisation de la gestion de crise par l’exécutifComment la gestion de crise a-t-elle été organisée au plus haut niveau de l’État ? Le dispositif a évolué selon quatre phases en quatre mois. Il en ressort les constats suivants : une absence de lieu clair et transparent de prise de la décision publique, une gestion de crise marquée par un très haut degré de centralisation, une faible place laissée aux initiatives locales, et donc des difficultés à faire remonter rapidement les informations pertinentes, et à adapter les dispositifs selon une logique de retour d’expérience.L’articulation du pouvoir politique et du pouvoir médicalÀ l’absence d’institutions médicales ou scientifiques qui auraient pu servir de conseil pour l’exécutif et de repère pour l’opinion, a succédé, à partir du 11 mars, la création de structures ad hoc, et en particulier du conseil scientifique, appelé à un rôle de co-gestion de la décision et de la communication gouvernementale. Cette nouvelle configuration souffre de plusieurs faiblesses : la nature incertaine du statut et du rôle de ce conseil, et l’absence de la dimension de santé publique dans l’expertise mobilisée pour orienter la décision. Il en résulte à la fois un manque de stratégie scientifique pour construire un appareil de connaissance efficace du suivi de l’épidémie, et une incertitude de l’opinion sur la source et l’autorité de la parole scientifique.La réponse à la crise dans les territoiresVue des territoires, l’action de l’État a été caractérisée par le paradoxe saisissant d’une extrême centralisation, notamment dans les modalités du confinement, et d’une absence de l’État face aux défis les plus pressants, comme l’approvisionnement en masques ou l’organisation de tests massifs.L’État est apparu entravé par sa propre organisation, notamment du fait de l’absence de chaîne hiérarchique claire entre les préfets et les agences régionales de santé (ARS). Il est aussi apparu prisonnier d’une logique centrée sur le maintien de l’ordre public, souvent déconnecté des défis concrets que devaient relever, dans l’urgence, les acteurs locaux pour assurer la continuité des services essentiels et répondre aux inquiétudes de leurs administrés.L'action de l’État a été caractérisée par le paradoxe saisissant d’une extrême centralisation et d’une absence de l’État face aux défis les plus pressants.Le rôle des entreprises pendant la criseParmi les entreprises, celles qui avaient des implantations ou des partenaires en Chine ont pu s’appuyer sur leur expérience pour mettre en place une gestion de crise précoce, et déployer des protocoles sanitaires qui ont permis de mobiliser les salariés autour d’un double objectif de protection de leur santé et de maintien de l’activité. Beaucoup d’entre elles se sont mobilisées au service de la lutte contre la pandémie, en fournissant notamment du matériel de protection. Face à la pénurie de masques, l’État a choisi de gérer seul la question des approvisionnements, sans exploiter toute l’expertise qu’auraient pu apporter certains groupes de distribution ou de logistique. Si les mesures économiques mises très rapidement en place par le gouvernement ont joué un rôle essentiel pour la sauvegarde des entreprises, ces dernières n’ont pas réellement été considérées comme des partenaires de la lutte sanitaire dans la phase de déconfinement, ce qui a limité leur capacité à prendre des initiatives pour favoriser la reprise de l’activité dans un cadre sécurisant.La crise vue par la société civile et les citoyensLes associations ont été peu associées à une lutte sanitaire pour laquelle leur capacité de contact avec les populations aurait pu se révéler précieuse.Alors que le président du conseil scientifique a exprimé à plusieurs reprises le besoin de mobiliser l’ensemble de la société dans la lutte contre la pandémie, la forte volonté des citoyens de s’engager, au-delà de l’obéissance aux consignes de confinement, n’a pas été placée au cœur de la stratégie des pouvoirs publics. Bien sûr, certaines expériences locales ont réussi. Mais les associations ont été peu associées à une lutte sanitaire pour laquelle leur capacité de contact avec les populations aurait pu se révéler précieuse.Plus que l’absence de stocks de masques, qui a été le lot de la plupart des pays européens, c’est le choix de ne pas faire appel aux citoyens pour les fabriquer qui révèle une réticence fondamentale, pour l’État, à s’appuyer sur la société. En retour, le manque de confiance de la société envers l’État s’exprime notamment par des formes de refus du numérique qui handicapent la capacité de l’État à se transformer pour répondre aux attentes qui s’expriment envers lui. Une crise qui révèle des failles et des opportunités Le "piège" de la verticalitéDans chacun de ces domaines, la gestion de crise a été marquée par un fonctionnement vertical, en décalage avec les défis posés par la crise comme avec les attentes des partenaires de l’État et de la société.La gestion de la crise a été marquée par un manque de données fiables sur la circulation du virus et le profil des malades. Le manque de partage de données avec les acteurs locaux apparaît particulièrement dommageable à la mobilisation des collectivités locales comme des citoyens. Elle va de pair avec la séparation des données sanitaires et des données sociales, reflet du manque de prise en compte de la santé publique en France. Cette verticalité se reflète aussi dans les modes de communication de l’État, organisés en deux circuits parallèles : les messages adressés par l’exécutif à travers les médias, notamment télévisuels, et la longue chaîne administrative chargée de transmettre et d’interpréter les décisions annoncées, avec un décalage temporel qui nourrit les interrogations et les incompréhensions.La verticalité de la réponse des pouvoirs publics a été particulièrement sensible dans l’organisation de la crise sanitaire. Le contrôle étroit exercé par la direction générale de la Santé sur le réseau des 38 établissements de santé de référence (ESR) n’a pas permis de faire remonter suffisamment rapidement les informations sur la circulation de l’épidémie, ni de faire évoluer, sur la base des expériences locales ou internationales, les doctrines restrictives mises en place au sujet des tests comme du port des masques.La gestion de crise a été marquée par un fonctionnement vertical, en décalage avec les défis posés par la crise comme avec les attentes des partenaires de l’État et de la société.De nouveaux acteursLa mobilisation des soignants a été essentielle.La crise a également fait émerger de nouveaux acteurs, qui ont pris des risques et des responsabilités, et se sont organisés en réseaux :Au sein de l’État lui-même, la mobilisation des équipes chargées de la gestion de crise a permis de faire face aux urgences, et, souvent, de dépasser des blocages jusqu’ici jugés insurmontables. Les équipes chargées de la mise en œuvre des outils numériques ont joué un rôle crucial, à l’image de l’Agence du numérique en santé. Les collectivités locales se sont activement mobilisées pour assurer la continuité des services essentiels, et déployer un dispositif de communication proche du terrain pour informer, rassurer et mobiliser. Elles ont fait preuve de beaucoup de pragmatisme, en outrepassant le cadre strict de leurs responsabilités pour répondre à la réalité des urgences. Les entreprises ont été en première ligne de la lutte sanitaire et ont représenté un lieu privilégié de pédagogie des gestes barrières. La crise a été pour beaucoup d’entreprises un moment important de mise en œuvre de leur impératif de responsabilité. Enfin, c’est la discipline et la mobilisation des citoyens qui ont joué un rôle décisif, avec le respect des gestes barrières et des consignes de confinement, mais aussi à travers la multiplication des actions de solidarité et l’auto-production de masques. Les enseignements pour l’action publique Plus que la question de la répartition des responsabilités, notamment entre l’État et les collectivités locales, c’est la manière dont est exercée l’action publique qui doit faire l’objet d’une réflexion partagée et d’une action déterminée pour qu’elle puisse être au rendez-vous des prochaines crises, et faire à nouveau la preuve de son efficacité. Il importe de :Restaurer les lignes hiérarchiques claires au sein de l’État, au niveau central comme au niveau déconcentré, en revenant sur la multiplication des agences, et en organisant la prise de responsabilité à chacun des échelons de l’action publique. S’appuyer sur les réseaux qui ont émergé pendant la crise, notamment les associations d’élus, pour mettre en œuvre un dialogue stratégique avec les collectivités locales, allant de la gestion de crise aux stratégies de développement territorial. S’appuyer sur les structures et les personnalités qui ont fait la preuve, pendant la crise, d’un engagement et d’une lucidité particulières, et en particulier d’une capacité à prendre des risques et des responsabilités. Faire du numérique le levier décisif pour casser les verticalités administratives, développer une culture de la donnée partagée, partir des fins et non des moyens, privilégier l’engagement et l’efficacité par rapport aux normes administratives et aux codes sociaux.Nicolas BauquetImprimerPARTAGERTélécharger Note (64 pages) Résumé (2 pages)contenus associésDansles médias10/06/2020 Les ratés de la gestion de la crise "à la française"09/06/2020 Pourquoi l'Etat s'est révélé piètre gestionnaire de crise pendant l'épidémie de coronavirus