À la Chambre, les élus trumpistes dominent donc la hiérarchie du parti après la purge qui a suivi le vote de la seconde mise en accusation de Trump en janvier 2021, signe que le Big Lie de la fraude électorale a été adoubé par le parti, alors même qu’il a été débouté en justice et que l’un des think tanks les plus proches de l’administration Trump, la Heritage Foundation, n’a pu trouver que 6 cas de fraude (sur 150 millions de votants). Le dernier bastion de résistance du parti tient à une dizaine d’élus du groupe républicain au Sénat, ceux-là notamment qui ont permis le passage de la grande loi d’infrastructures de Biden, un exploit dans les conditions politiques actuelles. C’est aussi grâce à eux que les États-Unis n’ont pas fait défaut sur la dette en décembre dernier. Mais ces sénateurs républicains sont en voie d’extinction : parmi eux, la moitié a déjà annoncé sa retraite politique : Richard C. Shelby (Alabama), Roy Blunt (Missouri), Richard Burr (Caroline du Nord), Rob Portman (Ohio) et Patrick Toomey (Pennsylvanie). Tous ces États ont été gagnés par Trump, sauf la Pennsylvanie : on peut donc s’attendre à les voir remplacés par des sénateurs plus trumpistes. On rappellera, pour éviter toute fausse équivalence avec les démocrates, qu’il y a toujours eu une majorité d’élus démocrates pendant la présidence Trump pour voter le relèvement du plafond de la dette ou les premiers plans de relance Covid.
- Les intellectuels et les organisations conservatrices radicales : l’énergie et la préparation de l’avenir
Trump n’a pas de programme politique et est animé par la seule soif de vengeance contre ceux qui ne soutiennent pas ses efforts de délégitimation de l’élection de novembre 2020. Mais de nombreux intellectuels, journalistes, activistes et jeunes ambitieux - que l’on retrouve dans une multitude de médias et d’organisations réelles ou virtuelles - alimentent la guerre culturelle qui définit le trumpisme, et certains préparent le prochain gouvernement républicain avec un agenda offensif, témoignant du carburant qu’a constitué le trumpisme pour la remise à jour d’un conservatisme nationaliste mais aussi radical, "post-libéral", nihiliste - les qualificatifs ne manquent pas. La constellation nationaliste MAGA alt-right n’est pas d’accord sur tout, loin s’en faut, mais déborde d’énergie et sait unir ses forces face à "l’ennemi commun" : l’administration Biden et le Congrès démocrate. Elle dispose de nombreuses troupes en ligne : Trump a en effet aussi boosté toute une frange radicale, la nouvelle droite ascendante, un groupe très diversifié qu’il a sorti des marges et forums obscurs du web pour les retweeter au grand jour, élargissant leur audience et légitimant leurs positions depuis le pupitre présidentiel ; les algorithmes et l’accélération des rythmes médiatiques pour alimenter le chaos et la "polémique du jour" ont fait le reste. Le bannissement de Trump des grands réseaux est venu trop tard pour freiner cette normalisation de l’extrémisme, et a renforcé le narratif républicain qualifiant les grandes plateformes de pro-démocrates.
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