Les "révolutions de couleur" qui se sont succédées dans l'espace post-soviétique au début de la décennie ("révolution des roses" en Géorgie en 2003, "révolution orange" en Ukraine en 2004, "révolution des tulipes" au Kirghizistan en 2005) ont été invariablement présentées à Moscou comme fomentées de l'extérieur par des services et des ONG occidentaux.
L'opération militaire russe en Géorgie de 2008 a été justifiée par la nécessité de la protection des communautés russes qui, selon le Président Medvedev, auraient été victimes d'un "génocide". La guerre avec l'Ukraine de 2014 offre l'exemple le plus éloquent des conséquences de cette politique inspirée par la nostalgie impériale et l'esprit guerrier qui brouille les lignes. "Nous avons toutes les raisons de penser que cette politique infâme de containment, pratiquée aux XVIIIème, XIXème et XXème siècles, se poursuit aujourd'hui. Ils tentent constamment de nous marginaliser parce que nous avons une position indépendante... Mais il y a une limite à tout et, en Ukraine, nos partenaires occidentaux ont franchi la ligne", avait alors déclaré Vladimir Poutine, avant de justifier l'annexion de la Crimée et l'intervention dans le Donbass par la protection des communautés russophones. Plus de 7 ans après le conflit armé qui lui a aliéné les sympathies d'une grande partie de la population ukrainienne, traditionnellement russophile, le Président russe continue de nier l'identité ukrainienne et de prétendre que la condition de la souveraineté véritable de l'Ukraine est l'alliance avec la Russie.
Le tournant conservateur de 2011-2012
Dès sa nomination comme premier ministre, Vladimir Poutine s'est présenté comme le protecteur d'une Russie confrontée à des menaces de délitement et comme le garant de l'ordre et de la stabilité face aux menées occidentales. Ce narratif sécuritaire s'est accentué depuis les manifestations importantes de 2011-2012. La crise financière de 2008 et la baisse de la rente énergétique avaient mis en cause le "pacte social" (hausse du niveau de vie / passivité politique) qui prévalait jusque-là entre le régime et la population, les classes moyennes en particulier. Vladimir Poutine et "Russie unie" ("le parti des voleurs et des tricheurs" fustigé par Alexeï Navalny) ont été vivement critiqués, les structures de force (Siloviki) ont craint de perdre le pouvoir, ce qui a mis fin à l'expérience Medvedev et provoqué le retour de Vladimir Poutine au Kremlin.
Les représentants de la mouvance libérale - les "libéraux systémiques" comme Alexeï Koudrine - continuent à gérer la politique économique et monétaire, mais les Sislib ont progressivement perdu en influence au profit des Siloviki.
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