La dernière poche de résistance est en train d’être réduite dans un endroit appelé Baghouz – dans le fin fond de l’Est syrien. C’est là notamment que les frères Clain semblent avoir été mis hors d’état de nuire par une frappe de la coalition mercredi 20 février. Daesh, en tant qu’organisation "territorialisée", selon l’expression consacrée, est donc désormais détruite.
Pourquoi, compte tenu de l’image d’horreur absolue qui s’attache à cette organisation, la victoire contre Daesh n’est-elle pas davantage célébrée dans les capitales occidentales ? On avancera, à titre d’hypothèses, trois raisons d’inégales importances.
Daesh n'est pas mort
D’abord tous les experts en terrorisme sont d’accord pour estimer qu’en dépit des apparences, la défaite de Daesh n’est pas totale : des cellules dormantes ou des militants cachés se terrent certainement dans la province d’al-Anbar, qui jouxte la Syrie et la Jordanie ; si l’organisation paraît coulée, l’idéologie, la légende, le mythe qu’elle laisse derrière elle, vont continuer à travailler de nombreux sunnites mécontents ou frustrés ; enfin, les conditions qui ont présidées à l’émergence de Daesh continuent à exister, au moins en Syrie, où le régime d’Assad savoure sa propre victoire contre son peuple.
Dans un ordre d’idées voisin, il faut ajouter que dans la province d’Idlib, une autre centrale terroriste, Hayat Tahir al-Cham (HTC), renforce son pouvoir, en attendant une offensive probable du régime et de ses alliés ; celle-ci risque d’être sanglante, compte tenu notamment de la masse de déplacés civils qui s’est réfugiée dans cette zone. Comme pour Daesh, et même si HTC a plus de racines dans la population syrienne locale que ce n’était le cas pour le soi-disant Califat, Hayat Tahir al-Cham compte dans ses rangs de nombreux fanatiques francophones, ainsi d’ailleurs que russophones et des Ouighours
La désertion américaine
En second lieu, la campagne contre Daesh s’achève, du fait de Donald Trump, dans des conditions à vrai dire lamentables.
On sait que le président des Etats-Unis, dans un tweet du 20 décembre, a fait savoir qu’il allait retirer les forces américaines présentes dans le Nord-Est syrien. On pense que ce retrait sera achevé en avril. La victoire contre Daesh a été obtenue en partie grâce à l’action au sol d’une coalition kurdo-arabe ("Forces Démocratiques Syriennes"), dirigée en fait par la milice kurde, le PYD, affilié au PKK turc. Le départ précipité des Américains expose les Kurdes du PYD soit à une offensive de l’armée turque, soit à une prise de contrôle par le régime Assad. La décision de Donald Trump offre aussi une incitation inespérée à l’expansionnisme iranien et prive les Occidentaux de l’une des dernières cartes qui leur restait pour tenter d’influencer un règlement politique final en Syrie.
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