À l'image de sa prédécesseure Florence Parly, c’est cette option que Sébastien Lecornu a choisie, annonçant aux députés que des "rendez-vous étaient à prendre". Le recours de plus en plus fréquent à un tel mécanisme interroge néanmoins.
Surtout, ce budget n'intègre pas pour l'instant le coût du soutien supplémentaire qui devrait être apporté à l’Ukraine dans les prochains mois. À l'heure de la contre-offensive de Kiev dans l'est du pays, la solidarité française à l’égard de l’effort de guerre ukrainien est appelée à évoluer. Le président de la République lui-même a annoncé que la France entamerait prochainement le "quatrième chapitre" de cette solidarité, dont les détails devraient être connus à l'occasion de la conférence internationale du 13 décembre prochain. Pour l'année 2022, le projet de loi de finances rectificative (PLFR) a témoigné de son agilité en débloquant, au regard des "récents bouleversements géostratégiques", 1,1 milliard d’euros pour les Armées. L'augmentation attendue du coût du soutien français à Kiev constituera sans doute, pour ce mécanisme de rectification, une nouvelle épreuve.
…et qui rend donc nécessaire la poursuite des efforts dans le cadre de la prochaine LPM
Au-delà de la régénération de l'appareil de défense français prévue et mise en œuvre par la LPM actuelle, le contexte géopolitique appelle une ambition accrue. C'est pourquoi une nouvelle LPM, pour la période 2024-2030, est actuellement en préparation et devrait voir le jour au premier semestre 2023. Celle-ci ne sera néanmoins pas accompagnée d’une revue intégrée ou d'un livre blanc comme nous l'appelions de nos vœux dans notre note parue au mois de juillet, Défense française : ajuster nos efforts, alors qu’elle devra faire des choix décisifs. Dans un environnement international particulièrement dégradé, marqué notamment par le déplacement du centre de gravité géopolitique vers la zone indo-pacifique où les tensions se multiplient, la recomposition de l'engagement français au Sahel et le retour de la guerre sur le sol européen, une réflexion stratégique d'ampleur s'impose afin de "bâtir collectivement la stratégie de puissance d'équilibres de la France". Ce n’est pas l’option retenue par le Président, qui a présenté à Toulon les grands axes d’une nouvelle Revue nationale stratégique élaborée par le gouvernement, en quelques mois seulement.
Néanmoins, le certain consensus transpartisan observé sur le volet défense du PLF 2023 (seuls quatre amendements ont été intégrés au texte de loi avant le recours du gouvernement au 49.3), ne dispensera pas le gouvernement d'un effort de pédagogie important autour de la nouvelle LPM, si elle est aussi ambitieuse qu’annoncé, dans un contexte économique et politique particulièrement défavorable. Cela aurait pu être entamé au cours d’une réflexion stratégique d'ampleur associant les forces politiques, et permettant de mobiliser la nation toute entière. La guerre en Ukraine le montre : la sécurité est l’affaire de tous.
Co-écrit avec Axel Noisette, assistant chargé d'études
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