De tous les alliés de Washington au Moyen-Orient, Israël est une cible de choix pour la Chine. L’État hébreu a développé au cours de la dernière décennie une relation avec Beijing, source d’inquiétude pour Washington. Les concessions accordées par le gouvernement de Netanyahu dans différents ports du pays, dont celui hautement névralgique de Haifa (escale de la Sixième flotte), offrent une voie fort pratique à la Chine pour se procurer des renseignements sensibles touchant à la sécurité nationale américaine.
Certains font remarquer que Beijing cible en priorité les plus proches alliés des États-Unis, mais la Chine se lie également à l’Iran. Elle a signé il y a quelques semaines avec Téhéran un accord dit de partenariat stratégique global sur 25 ans, dont le contenu exact n’est pas rendu public, mais qui couvre quasiment tous les domaines, des infrastructures portuaires, au système bancaire, en passant par la santé, les télécoms, les technologies de l’information, pour un montant de 400 milliards de dollars. La Chine profite de l’étranglement économique imposé par les États-Unis, empêchant le régime iranien de vendre son pétrole, pour obtenir une garantie à long terme de fourniture de pétrole iranien à un tarif dérisoire. Là encore, le ministre chinois des affaires étrangères met en avant "le soutien sans faille de la Chine à la souveraineté de l’état iranien et de sa dignité nationale", dénonçant les sanctions américaines et "les mesures juridiques tentaculaires qui visent à punir la Chine et d’autres pays" désireux de commercer avec l’Iran. L’accord prévoit également une coopération militaire renforcée incluant la recherche, le développement de systèmes d’armes et le partage du renseignement.
On note à Washington comme en Europe que le rythme des négociations sino-iraniennes est étroitement lié à l’évolution des tractations de Téhéran avec l’Amérique. Dès qu’il y a tension ou détente avec Washington, le rapprochement avec la Chine est ralenti ou au contraire accéléré. Ainsi, les négociations de l’accord de 25 ans ont duré cinq ans. Elles avançaient lentement durant la période qui a suivi l’accord sur le programme nucléaire iranien, Téhéran ayant alors obtenu un relâchement des sanctions américaines et européennes. Mais lorsque Donald Trump a décidé de se retirer de l’accord nucléaire en 2017, les perspectives d’une normalisation avec les pays occidentaux se sont évaporées et l’Iran s’est à nouveau tournée vers la Chine, conduisant avec elle et la Russie des manœuvres navales conjointes et accélérant les négociations pour la conclusion du partenariat. L’alternative chinoise sapait de toute évidence la stratégie d’asphyxie des États-Unis à l’égard de l’Iran. Subversion ou simple opportunisme ?
La Chine souhaite tout autant que les Occidentaux un Moyen-Orient stable pour assurer la sécurité de ses approvisionnements énergétiques. Elle a ainsi pleinement coopéré lors des négociations 5+1 pour limiter les ambitions nucléaires de l’Iran. Il y a pourtant quelques raisons de s’inquiéter. En effet, Beijing entretient des liens étroits avec les Gardiens de la Révolution iraniens et, à travers eux, avec les milices chiites actives dans différents pays de la région.
La Chine a tous les atouts du nouveau venu au Moyen-Orient, vierge de l’héritage des puissances "colonialistes et impérialistes" occidentales. Elle joue même la fraternité avec les pays de la région dont elle partageait jusque récemment le statut de pays subalterne du tiers-monde. Cette image de puissance bénigne lui permet de se déployer avec aise dans tous les domaines sans susciter de soupçons.
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