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03/01/2011

Mathématiques et échec scolaire dans PISA 2009 : un phénomène minimisé !

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Mathématiques et échec scolaire dans PISA 2009 : un phénomène minimisé !
 Maylis Brandou
Auteur
Directrice adjointe

 

L’Association pour la Prévention de l’Innumérisme a analysé les données de PISA 2009.

Avons-nous beaucoup d’élèves en difficulté ? Comment notre pays a-t-il évolué depuis les premières données recueillies par PISA en 2003 ?

A première vue, nous pourrions penser que les résultats des élèves français en mathématiques, après avoir baissé entre 2003 et 2006, sont meilleurs en 2009.

Cependant, la France est passée en trois ans du groupe des pays de l’OCDE les plus performants au groupe de ceux dont la performance est dans la moyenne. Il existe dans PISA six niveaux de compétences, plus un niveau inférieur au niveau 1, "chacun de ces niveaux correspondants à un ensemble de compétences mathématiques spécifiques" (source OCDE, pdf). Mais la moyenne ne rend pas compte des disparités entre groupes de niveaux, et plus particulièrement ceux situés aux extrémités (niveaux 0 -1 et niveaux 5-6).

  • Echec scolaire en hausse, élite en baisse

La proportion d’élèves en très grande difficulté en mathématiques (inférieur au niveau 1) – qui "sont incapables d’appliquer de manière routinière les connaissances et compétences mathématiques les plus élémentaires que l’enquête PISA cherche à mesurer"[1] et ne peuvent résoudre que 50% des tâches les plus simples – est en progression constante. En effet, entre 2003 et 2009, cette proportion de la population scolaire est passée de 5,6% à 9,5%. Quant à celle des élèves en grande difficulté (niveau 1) – à savoir ceux uniquement capables "de suivre des instructions directes et explicites, d’exécuter des actions qui vont de soir et d’appliquer des modèles simples à des problèmes sans difficulté qui s’inscrivent dans des contextes familiers"[2] –, elle est passée de 11% à 13,1%. Nous sommes donc passés de 16,6% à 22,6% d’élèves en grande et très grande difficulté. Soit, comme corroboré par la récente note d’information du ministère de l’Education nationale, plus d’un élève sur 5 se situant au niveau 1 ou en-deçà[3].

Scores moyens et pourcentages d’élèves par niveau de compétences en culture mathématique pour la France et l’OCDE

A l’autre bout du spectre, la proportion d’élèves très performants (niveau 5 et 6) en mathématiques a également baissé depuis 2003, passant de 15,1% à 13,7%.

  • La France parmi les pays ayant la proportion d’échec scolaire la plus élevée

En ne considérant que les élèves en très grande difficulté, la France se place au 21ème rang des pays européens (sur 25 pays ayant participé), soit parmi les derniers aux côtés de la Grèce, de la Roumanie, de la Bulgarie et du Luxembourg.

Au classement de l’OCDE, elle se classe 28ème sur 34 pays membres, et 36ème sur 65 (en comptant les économies et pays partenaires de l’OCDE ayant participé à PISA), presque ex æquo avec la Russie.

Taux en % d'élèves en très grande difficulté

Source : Association pour la prévention de l’innumérisme, extraits partiels et retraités des tableaux de PISA 2009, table 1-3-1 page 221.

Un quart des jeunes français âgés de 15 ans souffrent donc d’un réel retard en mathématiques, alors que deux médailles Fields de mathématiques (récompense la plus prestigieuse pour les travaux en mathématiques) ont cette année été décernées à deux Français. Si la filière scientifique au lycée est aujourd’hui la filière d’excellence et que la France est fière de son système de grandes écoles d’ingénieurs, rappelons toutefois que les pays qui ont une proportion d’élite supérieure à celle que nous avons ont également une faible proportion d’élèves en échec scolaire.

Quelle est la corde la plus sensible ? Le sort des élèves en difficulté suscite-t-il moins d’intérêt que celui des plus performants ? Par un bout ou l’autre, peu importe, il faut saisir le problème à pleine main : réduire drastiquement le nombre d’élèves en difficulté, augmenter la proportion de bons élèves et réduire l’écart entre les deux. Il n’y a pas de fatalité.

Nous ne pouvons plus faire l’économie d’une recherche de très haut niveau en éducation – évaluée et transposable – en liaison avec le travail effectué dans les salles de classe, seule à même de faire progresser les outils mis à disposition des enseignants. Si nous voulons véritablement enrayer la baisse de performances de notre pays, réduire le nombre d’élèves en grande difficulté et gonfler notre élite, nous ne pouvons plus faire l’économie de la création de centres de recherche spécialisés en éducation, pluridisciplinaires et internationaux. La recherche en mathématiques est quasi inexistante en France et peu d’expérimentations dans ce domaine ont vu le jour. Celles actuellement conduites par Michel Vigier, président de l’association pour la Prévention de l’Innumérisme, ont permis d’améliorer significativement les résultats d’élèves en classes S.E.G.P.A (Section d'Enseignement Général et Professionnel Adapté). Ces résultats sont très prometteurs et doivent être évalués rigoureusement.

- Le site de l’Association pour la Prévention de l’Innumérisme

Notes

[1] OCDE 2006, Regards sur l’éducation, p. 89.

[2] Ibid., p. 88.

[3] DEPP, note d’information N° 10.23 "L'évolution des acquis des élèves de 15 ans en culture mathématique et en culture scientifique : premiers résultats de l'évaluation internationale PISA 2009", 2010.

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