Concrètement, cela veut dire que l’industrie automobile, par exemple, doit mettre en place une production compétitive et neutre en carbone de véhicules et de batteries en Europe. Avec un chiffre d’affaires de 436 milliards d’euros, elle représente le principal secteur industriel d’Allemagne. À titre de comparaison : en Allemagne, l’automobile emploie 833 000 personnes, soit 11,8 % des actifs de l’industrie manufacturière, contre 7,4 % en France. Les chaînes de production allemandes sont conçues pour les moteurs à combustion, or ces derniers vont devoir disparaître de nos routes dans le courant des années 2030 - tel est l’impératif climatique, qui rend la situation si inconfortable. Les pays comme le Japon, qui ont très tôt misé sur les véhicules électriques, sont aujourd’hui leaders sur le marché, et même la fabrication des batteries se fait essentiellement dans d’autres régions du monde. L’Europe a donc raison de vouloir mettre en place sa propre production. Une production durable de batteries implique qu’on ait aussi les compétences et les capacités de les recycler, et ce recyclage doit impérativement être envisagé à l’échelle européenne si l’UE veut rester leader de cette technologie et profiter des synergies et des effets d’échelle.
Les industries de base, grandes consommatrices d’énergie, doivent, elles aussi, faire face à des défis qui sont avant tout d’ordre économique, comme le montre une étude du groupe de réflexion berlinois Agora Énergiewende. Techniquement parlant, la fabrication d’acier neutre en CO2, par exemple, est déjà possible, mais elle est encore loin d’être compétitive. Pourtant, d’ici 2030, de nombreuses installations de production devront être renouvelées. Dans l’industrie chimique, la chaleur industrielle doit être produite sans impact sur le climat - l’électricité le permet, mais le processus est très coûteux. Dans l’industrie de l’aluminium, on développe actuellement des approches innovantes comme l’électrolyse flexible de l’aluminium, et l’industrie du ciment évolue en direction de la neutralité carbone grâce à l’augmentation de la part de matériaux recyclés, et plus récemment grâce au piégeage du carbone. Mais les technologies clés peu émettrices de CO2 se heurtent pour le moment à une trop faible demande de produits climatiquement neutres, et les coûts de réduction des émissions sont largement supérieurs au prix du CO2 sur le marché des droits d’émission.
Ajouter un commentaire