Cette semaine, l'OTAN célèbre son 70ème anniversaire à Washington. Les inquiétudes à l’égard de l’avenir de cette organisation ont été intensifiées par la turbulence des relations transatlantiques, la pression de Washington sur la part du budget porté par les alliés européens ainsi que par les rumeurs selon lesquelles le président Trump aurait envisagé de retirer les Etats-Unis de l’Alliance. L'Union européenne de son côté prend des mesures visant à renforcer son "autonomie stratégique" afin d’anticiper la perte potentielle du cadre de sécurité américain.
Le président américain a le pouvoir de choisir de se retirer, mais ni le Congrès, ni l’opinion américaine n’y sont favorables. De nombreux observateurs affirment que l’agitation créée par Donald Trump, conjuguée à la détérioration des relations avec la Russie et à l'évolution de la situation en Ukraine, renforce le bien-fondé de l'OTAN. Les Européens dépensent davantage pour la défense, des bataillons prêts au combat ont été implantés dans les pays baltes et en Pologne, Washington s'est engagé à déployer des troupes américaines supplémentaires et deux nouveaux commandements ont été créés pour renforcer la sécurité des liaisons maritimes entre l'Amérique du Nord et l'Europe, ainsi que la mobilité des forces au sein du continent européen.
Afin de discuter de l'avenir de l'Alliance, Soli Özel, Visiting Fellow spécialiste des relations internationales à l’Institut Montaigne, a rencontré à Cambridge (Massachusetts) l'ancien représentant permanent des États-Unis auprès de l'OTAN, Nicholas Burns, qui a récemment cosigné, avec l’ambassadeur Douglas Lute, un rapport intitulé NATO at Seventy: An Alliance in Crisis. Les deux auteurs font de l'absence de leadership américain la principale source des problèmes de l'OTAN. Au nom de l’avenir de l’organisation, ils identifient dix défis à relever. Il est intéressant de noter que l'un de ces défis, considéré comme nuisant au bon fonctionnement et à la cohérence de l'organisation, réside dans le nombre croissant d'Etats membres peinant à "faire respecter les valeurs démocratiques de l'OTAN".
SOLI ÖZEL
Monsieur l’Ambassadeur, bonjour et merci d'avoir trouvé le temps de me parler de votre récent rapport, NATO at Seventy: An Alliance in Crisis. Ce rapport, que vous avez co-signé, en tant qu’ancien ambassadeur des Etats-Unis auprès de l'Alliance, avec une autre personnalité ayant exercé cette fonction, Douglas Lute, arrive à point nommé. En plus des articles de foi habituels défendant le but et l'importance de l'organisation, ce rapport comprend un certain nombre de propositions importantes. Vous êtes très critique à l'égard de l'administration Trump et la façon dont elle traite avec l'organisation. Vous faites confiance au Congrès et à l’opinion américaine. Mes questions seraient donc les suivantes : le Congrès peut-il vraiment compenser l'absence de l'exécutif ? Et combien de temps encore l’opinion américaine continuera-t-elle à soutenir l'OTAN ?
NICHOLAS BURNS
D'abord, je ne pense pas que le Congrès puisse compenser complètement l'exécutif. Dans notre système politique, rien ne saurait remplacer les paroles et les actes du président des États-Unis. Mais le Congrès a tout de même un rôle - utile - à jouer. Il est très intéressant de constater que notre président ne croit pas en l'OTAN, qu'il ne l’a pas dirigée, qu'il a même cherché à la diviser et, surtout... qu'il n'a pas tenu tête au président russe Vladimir Poutine. En 70 ans, c'est le premier président américain que l’on ne saurait qualifier de dirigeant fort de l'OTAN.
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