Un deuxième défi majeur soulevé par cette pandémie concerne les hôpitaux : la capacité en lits est plus faible aux États-Unis que dans la plupart des autres pays riches. Cela s'explique en partie par le fait que nous laissons les forces du marché décider de la disponibilité des services. L’allocation des ressources est mauvaise : nous avons trop peu de lits dans les unités de soins intensifs, et trop peu de ventilateurs pour faire face à la crise à laquelle nous sommes confrontés. De nombreux hôpitaux de New York indiquent avoir déjà atteint leur capacité maximale, et beaucoup sont des hôpitaux qui agissent comme filets de sécurité pour des patients démunis. Le manque de personnel formé pour manier les respirateurs est également problématique. Cette pénurie s’explique notamment par les faibles revenus de ces spécialistes par rapport aux autres professionnels de santé.
Une troisième difficulté à laquelle les États-Unis doivent faire face est l'absence de couverture santé universelle : environ 10 % de la population n'est toujours pas couverte par une assurance maladie et la moitié des Américains déclarent être sous-assurés. Ces personnes sont confrontées à des franchises et à des frais importants lorsqu'elles se font soigner, et les restes à charge peuvent être élevés. Nous savons depuis des décennies que les personnes qui n'ont pas de moyens financiers suffisants finissent par ne pas avoir accès aux soins : ils évitent de consulter un médecin et d'aller à l'hôpital, à moins d’être gravement malades. Pourtant, lors d’une pandémie comme celle-ci, il faut que les citoyens puissent identifier rapidement leurs symptômes afin d’être pris en charge au plus vite. La propagation du coronavirus va sans doute être accélérée par ce manque d'accès aux soins. Au départ, les tests n’étaient pas pris en charge par les assurances santé. Cela a évolué et maintenant les tests sont remboursés, mais cela ne résout pas le problème des soins : dès lors qu'une personne est malade et se rend à l'hôpital, ou nécessite une ambulance pour se rendre à l'hôpital, elle peut être confrontée à des coûts financiers importants, et donc rédhibitoires.
L’état de santé des Américains, globalement plus faible que celui des citoyens d’autres pays de l’OCDE, constitue un autre point faible. En moyenne, les Américains sont un peu plus jeunes qu'au Japon ou en Europe. Mais une proportion plus élevée de la population souffre de maladies chroniques : cholestérol élevé, diabète, obésité, problèmes cardiaques et respiratoires. Le nombre important de maladies chroniques est en partie due à l'insuffisance de prise en charge par les assurances et au manque d'accès aux soins. Les États-Unis comptent également une importante population de sans-abri ayant de lourds problèmes de santé. Toutes ces personnes entrent dans la catégorie des malades à hauts risques en cas de contamination au Covid-19. Or nous n'avons ni la capacité hospitalière et médicale, ni les unités de soins intensifs, ni les respirateurs nécessaires pour faire face à la crise que nous traversons. À New York, qui est aujourd'hui l'épicentre de la pandémie américaine, des dizaines de milliers de personnes sont sans abri et vivent dans la rue, dans le métro ou au sein de refuges. Le virus peut se transmettre facilement à travers ces communautés et le risque de décès pour les sans-abri est très élevé.
Chaque pays adopte une réponse différente face à l'épidémie. Que peut-on faire aux États-Unis pour contenir et atténuer la propagation du coronavirus ?
Je suis actuellement à New York, et l'État de New York est devenu l'épicentre de l'épidémie aux États-Unis au cours des deux dernières semaines. C'est probablement dû au fait que cette ville, qui accueille beaucoup de voyageurs, est une zone urbaine à forte densité : New York a une densité de population deux fois plus élevée que celle de Los Angeles.
Nous observons dans l'État de New York une réponse très vigoureuse face à la situation. La première réaction a été une stratégie de distanciation physique, également appelé distanciation sociale. L'État a rapidement fermé les écoles, les entreprises non essentielles et déclaré le confinement : ces changements peuvent ralentir la progression de la maladie, comme cela a été fait avec beaucoup de succès en Chine. Il faut espérer que cette stratégie réduise le nombre de personnes nécessitant des soins hospitaliers dans les semaines à venir.
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