La réforme de la PAC pour la période 2021-2027 fait actuellement l’objet de négociations entre les institutions européennes et s’inscrit dans la révision du cadre financier pluriannuel de l’Union européenne. Faustine Bas-Defossez, directrice du Programme Agriculture de l’Institute for European Environmental Policy, revient pour nous sur cette réforme, son contenu et les défis qui restent à relever pour allier protection des agriculteurs européens et protection de l’environnement et du climat.
Point de bascule à l’horizon
"L’état de l’environnement en Europe est à un point de bascule. Il nous reste une fenêtre d’opportunité étroite au cours de la prochaine décennie pour intensifier les mesures de protection de la nature, atténuer les impacts du changement climatique et réduire radicalement notre consommation de ressources naturelles". (traduit de l’anglais) Hans Bruyninckx, directeur exécutif, Agence européenne de l’Environnement.
10 ans, voilà ce qu’il nous reste pour renverser drastiquement la tendance. C’est dans ce cadre que s’inscrit la réforme de la Politique Agricole Commune (PAC). Tous les voyants sont actuellement au rouge : la biodiversité, les espèces et leurs habitats se réduisent comme peau de chagrin (81 % des habitats protégés dans l’UE et 63 % des espèces ont montré un état de conservation défavorable), le mercure est monté entre 1,1 °C et 1,2 °C au-dessus de la température moyenne de l’ère préindustrielle ces cinq dernières années, faisant de celles-ci les plus chaudes jamais enregistrées. Par ailleurs, la pandémie de Covid-19 nous rappelle à quel point la pression humaine sur la biodiversité peut s’avérer dangereuse et que si cette dernière ne se réduit pas, les pandémies à venir ne seront que plus virulentes que celle d’aujourd’hui. Dans ce contexte se décident à Bruxelles, entre les différentes institutions européennes, les détails de la distribution de près de 40 % du budget de l’Union européenne (UE).
Cette révision est d’autant plus cruciale aujourd’hui que l’agriculture et l’environnement sont intrinsèquement liés : si nos sols se vident complètement de leur matière organique, si la ressource en eau se tarit, si les pollinisateurs ne sont plus là pour polliniser nos champs, que reste-t-il de la production agricole ? Cette révision est aussi unique car, si elle représente l’une des dernières opportunités d’aider le secteur à amorcer une transition nécessaire vers plus de durabilité, elle s’inscrit aussi dans le cadre du Pacte Vert de l’UE, un pacte horizontal avec pour principal objectif de rendre l’UE climatiquement neutre en 2050 et de rendre son économie durable.
Future PAC, future CAP : révolution ou évolution ?
En termes d’argent public, c’est environ 40 % du budget de l’UE (soit plus de 55 milliards d’euros) qui aujourd’hui est alloué pour la PAC, en soutien au secteur agricole. La PAC représente donc potentiellement un outil non négligeable pour la gestion (durable) de nos ressources naturelles.
Récemment cependant, la Cour des Comptes européenne a publié un rapport sans appel : alors que l’agriculture intensive constitue l’une des principales causes d’érosion de la biodiversité, la PAC, en dépit de ses dernières réformes orientées vers plus de verdissement, n’est pas parvenue à enrayer ce déclin.
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