Rechercher un rapport, une publication, un expert...
L'Institut Montaigne propose une plateforme d'Expressions consacrée au débat et à l’actualité. Il offre un espace de décryptages et de dialogues pour valoriser le débat contradictoire et l'émergence de voix nouvelles.
06/09/2016

Climat : une priorité de façade ?

Imprimer
PARTAGER
Climat : une priorité de façade ?
 Marc-Antoine Authier
Auteur
Chargé d'études - Energie, Développement durable

La France, championne de la lutte contre le réchauffement climatique ?

En matière de lutte contre le réchauffement climatique, la réussite de la COP21 a permis à la France d'apparaître comme un leader sur la scène internationale. Cette aura nouvelle repose en effet sur le rôle moteur qu'elle a su jouer dans la réussite des négociations tenues sous son égide en décembre dernier. Son action reste ainsi auréolée du succès de l'accord de Paris alors que s'opère le passage de relais au partenaire marocain, qui organisera la prochaine conférence des parties du 7 au 13 novembre à Marrakech.

La France peut donc sembler, aux yeux de nombreux observateurs internationaux, en avance sur les autres nations en matière de lutte contre le réchauffement climatique. Ainsi, lors du sommet du G20, à Hangzhou, les États-Unis et la Chine, les deux plus grands émetteurs de gaz à effet de serre, ont enfin ratifié l’accord de Paris, plusieurs mois après la France et alors que l’Union européenne se fait encore attendre. Déjà avant l’ouverture du sommet international, Ségolène Royal, ministre de l'Environnement, et Michel Sapin, ministre de l'Économie et des Finances, avaient annoncé que la dette souveraine se financerait dès 2017 au moyen d’obligations vertes, et ce pour un montant estimé à neuf milliards d’euros. La France a ainsi devancé de peu la Chine et le Royaume-Uni, qui devraient également opter pour ces obligations d’un genre nouveau. Au-delà de ce rayonnement diplomatique, qu’en est-il vraiment de l’action en faveur du climat ?

Des moyens en-deçà des ambitions

Quelles avancées concrètes attendre pour la France en matière de lutte contre le réchauffement climatique durant l’année à venir? La question mérite d’être posée, car les efforts fournis dans l'Hexagone en matière de politique énergétique ne semblent pas à la hauteur des ambitions affichées sur la scène internationale. Certes, les outils financiers constituent des leviers efficaces pour diffuser des technologies sobres en carbone : l’étude de l’Institut Montaigne Climat et entreprises : de la mobilisation à l'action, parue en novembre 2015, formule à cet effet des propositions concrètes pour optimiser le financement de la lutte contre le réchauffement climatique. Pour autant, l'action en faveur du climat ne peut se limiter au seul projet innovant de ces green bonds.

Les différents leviers actionnés par le gouvernement sont-ils à la hauteur du défi climatique ? Ainsi, comme le signale un rapport de l’OCDE paru cet été, « la France s’est fixé des objectifs ambitieux en matière d’environnement. Le grand défi est maintenant de tenir ces engagements ». Or, il est aujourd'hui certain que tous ne pourront être atteints. Le cas des énergies renouvelables en constitue un exemple probant : leur rythme de déploiement ne permettra pas d’atteindre les objectifs fixés par la loi de transition énergétique (LTE) en termes de mix. Comme l’a confirmé un rapport du Commissariat général au développement durable, rendu public en août 2016, soit un an seulement après la promulgation de la LTE, le pays n'a pas suivi la trajectoire permettant d’atteindre l’objectif de 27 % d’énergies renouvelables dans la consommation finale d’électricité en 2020 : elle prévoyait d'atteindre 20,5 % en 2015, et les données provisoires indiquent un retard de 1,6 point.

L'énergie, grande absente de la campagne à venir ?

À quelques mois des élections présidentielles, il semble nécessaire que les questions énergétiques prennent toute leur place dans les débats, et il appartient aux responsables politiques de s'emparer de ces problématiques et de convenir d'un même constat : les objectifs fixés par la LTE ne pourront pas être atteints dans les délais impartis. Aussi convient-il de les réviser au plus vite, tout en précisant clairement le plan d'action correspondant aux nouveaux objectifs.

Certes, le dernier volet de la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) rendu public cet été a contribué à clarifier les moyens qui doivent permettre de poursuivre la transition énergétique. En particulier, le gouvernement a dessiné dans les grandes lignes le pilotage du parc nucléaire, qui représente près de 77 % du mix électrique et qui permet à la France de produire une énergie peu émettrice de carbone. Cependant, comme nous le montrons dans le rapport Nucléaire : l'heure des choix, paru en juin 2016, les orientations données par la PPE ne répondent pas au besoin de visibilité de la filière. Or, l’articulation entre performance industrielle et action en faveur du climat constitue le socle d’une politique énergétique soutenable sur le long terme. Afin de relever sereinement les grands défis énergétiques et climatiques auxquels notre pays devra faire face dans les années à venir, nous formulons des propositions concrètes afin de doter la France d'un mix tout à la fois durable, abordable et fiable.

Pour aller plus loin :

Climat et entreprises : de la mobilisation à l’action – sept propositions pour préparer l’après-COP21 (novembre 2015)

Nucléaire : l’heure des choix (juin 2016)

Recevez chaque semaine l’actualité de l’Institut Montaigne
Je m'abonne