Mais cette crise est aussi une formidable opportunité pour l’industrie française de se réinventer. La pandémie a fait prendre conscience de l’importance stratégique de nos actifs physiques industriels, et il est possible d’utiliser la crise pour inverser la vague de désindustrialisation qui s’étend depuis des décennies. L’industrie française a perdu près de 20 % de son poids dans le PIB en 15 ans et 1,4 million d’emplois en 25 ans. Les industriels doivent saisir cette chance pour réinvestir dans l’industrie française et faire naître une industrie plus régionalisée, plus forte et plus digitale ! La France devra pour cela adresser de front le sujet de la productivité. Nous sommes l’un des rares pays en Europe à voir sa productivité manufacturière se dégrader (- 0,7 % entre 2015 et 2019, alors que l’Allemagne l’a améliorée de 2,4 %). Il est urgent de s’attaquer à ce problème structurel en accélérant la digitalisation et en capitalisant sur la dynamique enclenchée ces dernières années.
Au-delà de la France, ne soyons pas pessimiste quant à la capacité de l’Europe à exister à l’issue de cette crise. La sortie de la pandémie entraînera une résurgence des frontières, notamment pour certaines industries dont on voudra sécuriser l’approvisionnement au niveau national. Il en sera probablement ainsi pour l’industrie pharmaceutique ou les composants électroniques. Ces quelques exceptions mises à part, c’est le phénomène de régionalisation des chaînes industrielles qui va s’accélérer. Nous allons accélérer l’entrée dans une nouvelle phase de la mondialisation, ou chaque "cluster" régional aura sa chaîne de production localisée. Ce phénomène était à l’œuvre depuis plusieurs années, tiré par la convergence des coûts salariaux, les exigences de développement durable, la digitalisation et les guerres commerciales. En sortie de crise, les entreprises vont accélérer leurs efforts de régionalisation des flux, dans l’objectif de créer de la redondance dans les chaînes de valeur tout en rapprochant lieux de production et de consommation. À terme, 10 à 15 nouveaux clusters apparaîtront à l’échelle internationale. L’Europe en comptera probablement deux à trois, d’où l’importance de dessiner une politique industrielle forte, accélérant l’agenda de digitalisation et la collaboration entre acteurs.
La numérisation peut-elle être la solution salvatrice pour l’industrie française ? Quelles autres solutions peut-on imaginer pour reconsolider notre tissu industriel ?
La numérisation des usines est primordiale pour la relance de la productivité de l’industrie française ! Les technologies digitales peuvent permettre d’augmenter la productivité de 15 à 20 %, ce qui est justement ce dont les usines françaises ont besoin, pour être capable de bénéficier de la régionalisation qui est à l’œuvre. La digitalisation doit impérativement faire partie des plans d’investissements pour la réinvention de l’industrie française. Ceux-ci doivent notamment permettre la création et l’animation d’écosystèmes propices à la transformation digitale, tels que nous les présentions dans notre rapport réalisé avec l’Institut Montaigne en 2018, Industrie du futur, prêts, partez !
Plusieurs technologies digitales sont d’ailleurs au cœur de la stratégie de redémarrage. La réalité augmentée aide à construire des redondances dans le réseau industriel en formant rapidement des ouvriers à des gestes opératoires permettant de produire d’autres produits.
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