Avec la fin du charbon, la question ouverte sera celle du remplacement, par des EnR intermittentes et peu pilotables, de capacités de production stable, de tension élevée et continue, indispensables aux industries électro-intensives et au transport de masse (notamment ferroviaire). Le gaz constituera mécaniquement une partie de la réponse au besoin de flexibilité, au risque de renforcer la dépendance à la Russie (cf. Nord Stream 2 et la levée partielle des sanctions américaines). Les politiques font aussi porter leurs espoirs sur le biogaz et le biométhane ; toutefois, la pression sur les ressources en sols et en eau devra être prise en considération, l’Allemagne concentrant déjà près de la moitié des installations européennes de biogaz (valorisé sous forme de production électrique), selon un modèle industriel dont la croissance s’est affaissée à partir du milieu des années 2010.
Les espoirs se portent également sur l’hydrogène, qui ouvre sur une large gamme d’usages potentiels : pétrochimie, transport lourd et léger, stockage de la production "fatale" des centrales solaires et éoliennes… Mais l’hydrogène est aujourd’hui "gris" (c’est-à-dire produit à partir de charbon ou de gaz) et ne fera partie de la solution qu’une fois "verdi" (i.e. produit par des électrolyseurs alimentés par une électricité décarbonée) ou "bleui" (i.e. produit par vaporéformage en utilisant du gaz, mais avec captage et séquestration des émissions de carbone). Le Cabinet fédéral a adopté en juin 2020 une Stratégie Nationale pour l’Hydrogène (Nationale Wasserstoffstrategie). L'Allemagne investira 9 milliards d'euros dans cette filière et veut mettre en place une capacité de production de 5 gigawatts d'ici 2030, doublée en 2040. En février 2021, Bruno Le Maire et Peter Altmaier ont appelé de leurs vœux le lancement d’un Projet important d'intérêt européen commun (PIIEC) sur l'hydrogène, financé en partie par le plan de relance. Mais un hydrogène décarboné n’aura en définitive que très peu d’effet sur la trajectoire de décarbonation de cette décennie et ne concourt donc pas à remporter le pari du -65 % en 2030. En outre, les défis restent considérables, tant pour déployer une capacité de production d’hydrogène vert ou bleu (notamment pour valider techniquement et économiquement la séquestration du carbone et son stockage de masse) que pour développer les usages potentiels, avec des effets indéterminés pour aller vers la neutralité en 2045.
Du côté des EnR, l’effort à produire durant cette période se heurtera à différents obstacles. La loi allemande sur les énergies renouvelables (EEG 2021), entrée en vigueur le 1er janvier 2021, prévoit le passage de la part des EnR dans la consommation électrique allemande d’environ 42 % en 2019 à 65 % à l’horizon 2030. Toutefois, ce niveau devra être encore rehaussé compte tenu de l’avancement de l’horizon de neutralité en 2045 : le think tank allemand Agora Energiewende considère que la part des énergies renouvelables devrait représenter 70 % de la production d'électricité d’ici 2030 et presque 100 % au plus tard en 2045.
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