C'est tout le paradoxe de la campagne menée par Donald Trump. Après quatre années à la Maison-Blanche, il se présente encore comme l'outsider. Il mobilise ses troupes - qui lui sont restées globalement fidèles - en jouant de leur réflexe de peur, mais plus encore de leur sentiment d'humiliation face aux élites : "Moi je parle votre langage, je ne vous méprise pas." Leur fidélité fait dire à certains analystes qu'il pourrait y avoir une continuation du trumpisme sans Trump, après l'éventuelle défaite du candidat républicain. Mais les populismes ont besoin d'incarnation à leur tête. Que serait la Hongrie d'Orbán sans Orbán ? La personnalité de ceux "qui commencent comme des démagogues et terminent comme des tyrans", pour reprendre la belle formule d'Alexander Hamilton dans les Federalist Papers, fait toute la différence. Or il n'y a pas deux Donald Trump. Son mélange de narcissisme et de cynisme, d'ignorance et d'aplomb, d'amoralité et de ruse fait de lui un contre-modèle unique dans toute l'histoire des États-Unis.
De fait, Donald Trump avait tout prévu, sauf l'épidémie. Et le fait qu'elle renforcerait l'opposant que le parti démocrate lui avait désigné, peut-être par défaut. Mais son âge, les cicatrices de son histoire personnelle font de Joe Biden l'homme de la situation. Il n'est plus "Sleepy Joe", le vieillard assoupi, mais "Uncle Joe", l'homme compatissant et digne, celui prêt à vous écouter, à vous entourer, et à vous protéger, parce qu'en matière de souffrance il s'y connaît.
On ne peut certes exclure des scénarios catastrophes, favorisés ou non par des puissances extérieures. Rien n'est joué encore. Mais les États-Unis ne sont pas une "république bananière". Les juges et l'armée y sont les garants de la démocratie. L'Amérique du Nord n'est pas l'Amérique du Sud.
Copyright : TASOS KATOPODIS / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP
Avec l'aimable autorisation des Echos (publié le 18/09/2020)
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