Le CRRC a déjà une présence mondiale importante, avec des projets dans plus de 100 pays. Au cours des dernières années, les activités internationales du groupe ont connu une croissance rapide. Par exemple, entre juin 2015 et novembre 2016, le groupe est passé d'une présence dans environ 90 pays ou régions à une implantation dans 102 pays ou régions. Cela représente 83 % des pays ou régions possédant des chemins de fer. Cette évolution est conforme à la politique "d’expansion hors des frontières" (走出去) que suit le groupe et correspond à sa volonté de profiter de l'initiative des "nouvelles routes de la soie" pour remporter des contrats d'infrastructure de connectivité dans le monde entier. La plupart de ces projets concernent des locomotives diesel, des voitures et des wagons, mais le groupe parvient également à remporter des contrats prenant pour objet des locomotives électriques et des systèmes de transport urbain, s'étendant même ainsi en Europe et aux États-Unis. Parmi les contrats signés par le groupe CRRC à l’étranger ces dernières années, notons par exemple une commande de 10 millions de dollars de pièces de trains souterrains passée par Transport for London (2016), un contrat de 178 millions de dollars avec la Los Angeles County Metropolitan Transportation Authority (2017) ou un contrat de 278 millions de dollars avec le ministère des Transports argentin (2018).
Mais la stratégie internationale du CRRC se heurte à certains obstacles et a déjà connu des revers importants. En 2017, le taux de réussite des contrats d'exportation signés n'était que de 63 % et la valeur des contrats signés au cours des trois premiers trimestres de 2018 ne représentait que 20 % de l'objectif annuel. Le CRRC n'est pas un cas isolé : toutes les entreprises chinoises d'équipement ferroviaire ont récemment dû affronter un certain retour à la réalité. Par exemple, l’entreprise CRSC (China Railway Signal & Communication Co., Ltd) n'avait signé que 10 % des contrats qu’elle se fixait comme objectif international annuel pour 2018 au cours du premier semestre de l'année.
Cela est d’autant plus vrai pour le joyau de la couronne des marchés d'exportation chinois en la matière, à savoir le train à grande vitesse, dans le domaine duquel la Chine compte un certain nombre d'entreprises actives, comme CRRC, CREC, CRCC, CMC, etc. Un rapport publié conjointement par le Financial Times et le Center for Strategic and International Studies en 2017 a révélé que parmi les dix-huit projets de train à grande vitesse soutenus ou financés par la Chine, seul un projet a été achevé, les dix-sept autres demeurant à différents stades d’avancement, entre la planification et la construction. Entre l'attribution du projet et l'ouverture de la ligne, il a fallu plus de huit ans pour que la ligne Ankara-Istanbul soit achevée, alors qu'un tel projet n'aurait pris que trois à quatre ans en Chine. Deux ans plus tard, seul un autre projet a été mené à bien (la ligne Haramain reliant Médine et La Mecque), l’avancement des autres ayant peu progressé.
| Projet | Statut en 2019 |
---|
1 | Ankara-Istanbul | Opérationnel |
2 | Moscow-Kazan | Signé |
3 | Budapest-Belgrade | Retardé |
4 | Medina-Mecca (Haramain Line) | Opérationnel |
5 | Jakarta-Bandung (Indonasia) | Retardé |
6 | Vientiane – Kunming | En cours |
7 | Bangkok-Nong Khai (Thailand) | En cours |
8 | Bangkok - Kuala Lumpur | Retardé |
9 | Tehran-Mashhad (Iran) | Signé |
10 | Kuala Lumpur - Singapore | Retardé |
11 | Dhaka-Jessore | Signé |
12 | Phnom Penh – Sihanoukville | Signé |
13 | Karachi- Peshawar (Mainline-1) | Retardé |
14 | High Speed 2 (HS2) | Retardé |
15 | Puerto de Ilo / Brazil - Puerto Santos / Peru (Central Bi-Oceanic railway) | Signé |
16 | Yekaterinburg - Chelyabinsk (Russia) | Signé |
17 | Muse - Mandalay | Retardé |
18 | Samara - Togliatti | Signé |
D'un point de vue chinois, nul doute qu’une fusion entre Alstom et Siemens aurait effectivement accru la pression subie par le groupe CRRC. Un interlocuteur du CRRC craignait que "la fusion Siemens-Alstom n'affecte l'environnement commercial international du CRRC, n'accélère dans une certaine mesure l'internationalisation du CRRC et n'accroisse encore la barrière à l'entrée du marché européen du CRRC". Le conseiller commercial de l'ambassade de Chine en Allemagne, Weidong Wang, soulignait en revanche que "le fait d'être soutenu par deux grands pays, l'Allemagne et la France, permettra non seulement de renforcer la capacité à remporter des appels d'offres et d'obtenir des financements en Europe, mais aussi de réduire les coûts et de développer les ressources". Une telle hypothèse fait écho au discours que l’on peut entendre en Chine selon lequel la fusion CNR/CSR avait eu des effets positifs en matière de réduction des coûts (1+1<2) et en matière de performance (1+1>2). Mais elle néglige la question de la surcapacité une fois la fusion réalisée, ce problème restant irrésolu. Dans la même veine, elle laisse de côté la question des subventions.
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