Elle découle de la présidence Trump même si d’autres évolutions éclairent ce positionnement, comme l’affection pour la Russie au nom de valeurs traditionnelles chrétiennes communes, tendance plus ancienne au parti républicain. Ses arguments s’appuient toujours sur les deux mêmes présupposés : Biden et les démocrates mentent forcément, tandis que Poutine dit toujours la vérité ; cette vision embrasse donc les arguments russes.
Au Congrès, les positionnements républicains reflètent l’horizon électoral des élus, répétant une dynamique déjà connue pendant toute la présidence Trump : les sénateurs non soumis à réélection en novembre prochain (le Sénat est renouvelé par tiers tous les six ans, tandis que le mandat de la Chambre dure deux ans) ou les élus dont la retraite a été annoncée défendent l’Ukraine sans ambiguïté. La majorité des autres - et en particulier les élus à la Chambre - sont sur la ligne Carlson Fox News, le positionnement dominant côté républicain étant bien résumé par Paul Gosar, ainsi que par de nombreux autres élus républicains.
Dans l’article déjà cité des trois hérauts du national-conservatisme, les parallèles avec Hitler ou les accusations d’apaisement invoqués par les sénateurs Rubio et Cotton sont dénoncés avec virulence, tandis que même le sénateur Josh Hawley au poing levé du 6 janvier est mis en garde car sa virulence contre la Chine inquiète. Hawley s’est fendu d’une lettre à Blinken et Austin exigeant un abandon clair par l’administration Biden de l’élargissement de l’OTAN. Expliquant que "le monde de 2008 n’existe plus", il y affirme que les États-Unis "ne peuvent plus porter la lourde charge qu’ils avaient assumée dans le passé dans des théâtres secondaires comme l’Europe", et exige des Européens qu’ils prennent en charge leur défense en commençant par augmenter leurs dépenses militaires au-delà de l’exigence des 2 % du PIB, considérée également comme "obsolète" dans le nouveau contexte international.
La convergence des visions alternatives
Cette position de Hawley rencontre un large écho favorable non seulement chez les intellectuels réalistes comme Mearsheimer, mais aussi chez certains politiques progressistes - même s’ils prennent tous soin de dire à quel point ils n’aiment pas Hawley avant de déclarer que, tout de même, il n’a pas tort : "he’s got a point". Bernie Sanders, qui s’est montré un auxiliaire fidèle de Biden sur la politique intérieure, vient également de rappeler dans un article la doctrine Monroe sur les sphères d’influence pour justifier la prise en compte des craintes russes concernant l’extension de l’OTAN.
Ces convergences traduisent ainsi l’émergence d’un "anti-blob" qui n’a pas d’objectifs communs et encore moins d’affection réciproque mais exprime à Washington dans les think tanks et la classe politique cette "war fatigue" de l’opinion, illustrée par de nombreux sondages des deux côtés du spectre politique depuis la fin de la décennie 2000.
Un président affaibli par les divisions de l’opinion et l’absence de soutien du Congrès
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