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Rapport
Janvier 2018

ETI :
taille intermédiaire,
gros potentiel

<p><strong>ETI :<br />
taille intermédiaire,<br />
gros potentiel</strong></p>
Auteurs
Victor Poirier
Ancien directeur des publications

Victor Poirier était directeur des publications de l’Institut Montaigne jusqu’en décembre 2022. Il était spécialiste des questions de finances publiques et industrielles.

Chargé d'études entre 2015 et 2018, il a notamment contribué à la réalisation des rapports Pour une transition énergétique réussie, Industrie du futur, prêts, partez !, ETI : taille intermédiaire, gros potentiel, Quelle place pour la voiture demain ? ainsi qu’aux publications des notes Retraites : pour une réforme durable et L’impossible Etat actionnaire ?. Il était directeur adjoint des études depuis septembre 2018.

Victor a intégré Sciences Po Lille en 2010, en filière franco-britannique. Après une licence en Politiques et Relations internationales à l’Université du Kent et un master en Commerce et Finances Internationales à Sciences Po Lille, il a réalisé en 2014 un master of arts en Business et Econométrie à UCL (University College London). Il a ensuite intégré l’Université Paris-Dauphine en 2015 pour un master 2 en Diagnostic Economique International, réalisé en apprentissage.

Groupe de travail

Président du groupe de travail 

  • Arnaud Vaissié, co-fondateur et président-directeur général, International SOS 

Groupe de travail 

  • Emmanuelle Barbara, senior partner, August Debouzy
  • Philippe Chalon, directeur des relations institutionnelles, International SOS
  • Aulde Courtois, directeur général adjoint, Spallian
  • Vanessa Lamorre-Cargill, Innovation Champion Director / directrice innovation, Sodexo
  • Daniel Laurent, conseiller du président, Chargeurs
  • Jacky Lintignat, alors directeur général, KPMG
  • Alexandre Montay, délégué général, METI

Rapporteurs 

  • Marc-Antoine Authier, responsable des argumentaires, de la synthèse et des partenariats, METI
  • Ambre Limousi, assistante chargée d’études, Institut Montaigne
  • Victor Poirier, chargé d’études senior, Institut Montaigne
  • Simon Weill, économiste
Personnes auditionnées

Les opinions exprimées dans ce rapport n’engagent ni ces personnes, ni les institutions qu’elles représentent.

  • Nicolas Baverez, économiste, avocat à la cour d’appel de Paris
  • Augustin Bourguignat, secrétaire confédéral, CFDT
  • Marie Esnault-Bertrand, directrice des entreprises et de l’emploi, Région Ile-de-France
  • François Germinet, président de la commission formation et insertion professionnelle, CPU
  • Michaël Fribourg, président-directeur général, Chargeurs
  • Bruno Grandjean, président-directeur général, Redex
  • Stéphane Guinchard, associé fondateur, Héraxis
  • Bertrand Joab-Cornu, co-fondateur, Wingly
  • Hervé Joulia, secrétaire du club des ETI, Région Nouvelle Aquitaine
  • Ludovic Le Moan, directeur général et fondateur, Sigfox
  • Déborah Levy, chargée de mission formation, CPU
  • Isabelle Martin, responsable du service confédéral économie et société, CFDT
  • Bertrand Martinot, économiste, ancien DGEFP et Senior Fellow de l’Institut Montaigne 
  • René Ricol, trésorier et associé fondateur de Ricol Lasteyrie Corporate Finance
  • Frédéric Sanchez, président, Fives
  • Ulrike Steinhorst, président, Nuria Consultancy, et administrateur indépendant

Ce n’est pas la taille qui compte ! Entre les grandes et les petites entreprises, il existe tout un tissu économique : les Entreprises de Taille Intermédiaire (ETI) et les Petites et Moyennes Entreprises (PME) de croissance. Ces organisations créent des emplois, génèrent de la richesse, innovent, sont ancrées dans les territoires, ouvrent des filiales à l’étranger... mais subissent rapidement les blocages et rigidités administratives, réglementaires et fiscales de l’écosystème entrepreneurial français. 

C’est parce que les PME de croissance et les ETI portent en elles les ressources vitales pour notre économie que nous avons choisi d’y consacrer un rapport. C’est aussi parce que ces entreprises sont le baromètre des difficultés de l’économie française.

Au cours des derniers mois, l’Institut Montaigne et le Mouvement des Entreprises de taille intermédiaire (METI) ont rencontré des entrepreneurs français afin d’identifier les principaux blocages et freins qui pèsent sur ces organisations. Forts de ces échanges, nous formulons des propositions pour que la France capitalise sur ce vivier d’entreprises stratégiques pour notre croissance et notre compétitivité.

ETI, PME de croissance : de quoi parle-t-on ?

ETI, PME de croissance : de quoi parle-t-on ?

Définition et caractéristiques des ETI 

Les ETI recouvrent toutes les entreprises de 250 à 4 999 salariés qui remplissent au moins l’un des deux critères suivants :

  • le chiffre d’affaires se situe entre 50 millions et 1,5 milliard d’euros ;
  • le total du bilan se situe entre 43 millions et 2 milliards d’euros.

 Le profil type d’une ETI s’articule autour de trois caractéristiques principales :

  • leur taille les rapproche plus des PME que des grandes entreprises (la moitié des ETI ont moins de 500 salariés) ;
  • leur capitalisation est majoritairement patrimoniale, voire familiale ;
  • leur distribution par secteur d’activité révèle une surreprésentation de l’industrie (elle représente une ETI sur trois, contre une sur dix pour l’ensemble des entreprises).

Définition et caractéristiques des PME de croissance

Les PME de croissance sont des entreprises qui n’entrent pas encore dans la catégorie des ETI mais qui y aspirent par leur dynamique de développement. Leurs principales caractéristiques sont les suivantes :

  • leur nombre de salariés se situe entre 20 et 250 ;
  • leurs dépenses de personnel ont crû d’au moins 15 % par exercice sur deux exercices consécutifs ;
  • elles répondent aux critères européens de la PME, notamment en termes de taille, de chiffre d’affaires, de bilan et d’indépendance ;
  • elles sont assujetties à l’impôt sur les sociétés.

Pourquoi les rassembler ?

Dans la suite de notre développement, nous évoquerons les ETI, mais nous considérerons que les PME de croissance peuvent être incluses dans cette catégorie des ETI, et ce pour trois raisons :

  • les problématiques qu’elles rencontrent dans leur croissance les confrontent aux mêmes obstacles que les ETI ;
  • les bénéfices qu’elles apportent à l’économie et à la société se confondent avec ceux qu’apportent les ETI : propension à l’innovation, création d’emplois, projection à l’international ;
  • comme les ETI, elles sont profondément ancrées dans le territoire.

Les ETI, des atouts stratégiques pour notre pays...

Les ETI, des atouts stratégiques pour notre pays

Ancrage local et présence internationale

Les ETI et les PME de croissance sont implantées dans tout l’Hexagone et y ancrent des savoir-faire, notamment industriels. Elles structurent ainsi l’activité à l’échelle régionale et participent à l’intégration économique de l’ensemble des territoires. 78 % des sites de production des ETI se situent en régions et 41 % des salariés qu’elles emploient travaillent dans l’industrie (contre 25 % pour l’ensemble des entreprises).

Cet ancrage local ne les empêche pas de se projeter à l’international, à la fois par l’exportation et par l’implantation de filières de production et de distribution à l’étranger. Ainsi, trois ETI sur quatre exportent, on compte 12 000 filiales à l’étranger et elles représentent le tiers des exportations françaises, contribuant de ce fait au rétablissement de la balance commerciale française.

Capacité d’innovation, projection dans le temps long

Les ETI se caractérisent également par une capitalisation patrimoniale et familiale : 64 % d’entre elles ont un capital détenu par des personnes physiques et 45 % sont familiales. Cette particularité les encourage à dépasser la seule rentabilité à court terme pour viser un développement à plus long terme.

L’innovation constitue un moteur essentiel de leur croissance. Hors de nos frontières, ces dernières font face à la concurrence internationale. Elles n’ont d’autre choix que d’innover pour rester compétitives et gagner des parts de marché. En 2016, près de trois ETI sur cinq ont innové en investissant dans la R&D, en déposant un brevet, en lançant un nouveau produit ou en acquérant une licence.

Création d’emplois et source de croissance

Même si les ETI sont peu nombreuses en France, elles stimulent la croissance. Elles emploient 24 % des effectifs salariés en France et elles sont les seules catégories d’entreprises à avoir créé des emplois en France entre 2009 et 2015
 

...mais qui rencontrent des obstacles à leur déploiement en France

Un déficit de notoriété 

Les ETI sont moins célèbres que les grands groupes, moins en vogue que les startups et moins connues que les petites entreprises. En conséquence, elles restent sous le radar des pouvoirs publics. Concrètement, les réformes économiques ne sont jamais orientées spécifiquement vers le développement de ces entreprises Elles se concentrent sur les grands groupes ou les petites entreprises dont les problématiques divergent nettement.

La France compte environ 5 800 ETI sur son territoire. La dynamique de création et de croissance existe bel et bien, mais elle n’est pas suffisante pour rattraper le retard vis-à-vis de nos voisins européens : en l’espace de deux quinquennats, la France n’a donné naissance qu’à 1 200 ETI nouvelles.

Les ETI en France et en Europe

Mais il n’y a pas de fatalité ! En 1981, la France comptait le même nombre d’ETI que l’Allemagne. Outre-Rhin, ce tissu d’entreprises, que l’on appelle le Mittelstand, constitue le moteur de l’économie, notamment pour ce qui concerne le commerce extérieur. Il est à l’origine de 35 % du chiffre d’affaires total en Allemagne, propose 60 % de l’ensemble des emplois et 82 % des postes de formation en apprentissage. 

Un cadre juridique et réglementaire inadapté

Les PME de croissance et les ETI subissent plus que les grands groupes les lourdeurs réglementaires et fiscales qui peuvent bloquer l’activité économique de notre pays : si elles franchissent rapidement les seuils qui déclenchent de nouvelles réglementations, elles n’atteignent pas forcément la taille critique qui leur permettrait de franchir ces obstacles.

Un autre frein important à l’agilité des ETI réside dans la volatilité du droit. Le régime juridique et fiscal évolue régulièrement et peut bloquer certaines organisations dans leur déploiement. L’exemple du Crédit Impôt Recherche (CIR) est à ce titre éclairant : plus de la moitié des entreprises ont dû attendre le second semestre 2016 pour obtenir le remboursement de leur CIR 2015. Ces retards de paiement peuvent porter préjudice au développement des petites structures.

Des formations inadaptées à ces structures

Les ETI sont des structures moins “formatées” que les grands groupes et permettent ainsi d’accorder plus rapidement une autonomie et des responsabilités managériales. La formation initiale pourrait intégrer davantage les compétences indispensables au travail en entreprise telles que la capacité à mener un projet en équipe, la prise de parole en public ou la maîtrise parfaite d’un anglais opérationnel. 

Cinq champs d’action pour un développement rapide et ambitieux des ETI

1
Agir sur le champ culturel
Détails

Réaffirmer le lien qui existe entre profitabilité des entreprises et pérennité du modèle social.
 
Proposition 1 Faire connaître les ETI et l’ensemble des métiers qu’elles recouvrent auprès des lycéens et des étudiants.

Proposition 2 Adopter un discours positif sur la création d’emplois en mettant en avant les réussites individuelles sur le plan local et régional.

2
Agir sur le champ social
Détails

Associer les salariés à la réussite de l'entreprise et à sa pérennité. Evaluer la mise en œuvre des nouvelles obligations législatives et créer une culture de la confiance entre entreprises et administrations.

Proposition 3 Développer l'actionnariat salarié, l'intéressement et la participation.

  • Exonérer de forfait social, actuellement à 20 %, les politiques volontaristes d’intéressement (c’est-à-dire tout accord d’épargne salariale supérieur au minimum imposé par la loi) ainsi que les politiques volontaristes de participation qui vont au-delà de la participation légale.
  • Harmoniser les dispositifs de participation et d’intéressement.

 
Proposition 4 Laisser la possibilité aux PME et aux ETI d'expérimenter un "Conseil d'entreprise" à l'allemande.
 
Proposition 5 Encadrer et évaluer la mise en œuvre des nouvelles obligations législatives et réglementaires en direction des entreprises. Publier à la fin de chaque année un rapport faisant état de l’évolution quantitative du code du travail en termes de pages et d’articles.
 
Proposition 6 Créer un "passeport croissance" pour accompagner l’entreprise dans son développement.
 

3
Agir sur le champ fiscal
Détails

Pour garder les centres de décision en France et soutenir les stratégies de conquête internationale de nos ETI, assurer la continuité du capital et en faciliter la transmission.
 
Proposition 7 Aménager la fiscalité des transmissions d'actions afin de sanctuariser le capital productif avec :

  • un sursis d’imposition pour la transmission aux descendants ;
  • une restriction de l’imposition aux cas de cession effective.

 
Proposition 8 Simplifier les Pactes Dutreil : simplification et renforcement de la sécurité juridique des "Pactes" (suppression des attestations annuelles, élargissement du paiement différé fractionné, élargissement des actifs éligibles aux Pactes notamment immobilier et actifs immatériels).

4
Agir sur le champ territorial
Détails

Développer des hubs de croissance dans les régions.
 
Proposition 9 Confier aux régions la cartographie des ETI présentes sur leur territoire afin de mieux connaître les besoins et les ressources de ces entreprises. 
 
Proposition 10 Demander aux régions de structurer et d'animer le triangle d'or "recherche - université - entreprise", en lien avec les structures patronales locales. Les régions doivent agir comme catalyseurs dans l’écosystème collaboratif de l’innovation technologique au service des entreprises. Il s’agit d’associer les universités, les PME, les ETI et les grandes entreprises mais aussi les pôles de compétitivité, les Instituts de Recherche Technologiques (IRT) et les branches industrielles en région (par exemple l’UIMM et son Fonds d’Innovation pour l’Industrie).
 
Proposition 11 Afin de rendre les collectivités locales et le site France attractifs, supprimer la Cotisation sur la Valeur Ajoutée des Entreprises (CVAE) qui grève le capital productif avant même que toute valeur économique n'ait été générée. La suppression de la CVAE serait un accélérateur de croissance au niveau régional. A l’heure où les collectivités locales recherchent à attirer très activement les investissements sur leurs territoires, il est paradoxal d’avoir un impôt qui pénalise ces mêmes investissements.
 
Proposition 12 Transférer aux régions l’ensemble du pilotage de la formation professionnelle initiale (apprentissage et lycées professionnels) et prendre appui sur les ETI pour développer l’apprentissage en :

  • Simplifiant le cadre juridique de l’alternance (avec des contrats alignés sur le CDD et une harmonisation progressive des contrats de professionnalisation et ceux d’apprentissage).
  • Basculant la majeure partie de l’enseignement secondaire professionnel vers l’apprentissage.
5
Agir sur le champ numérique
Détails

Les PME de croissance et les ETI sont résolument engagées dans la transformation digitale. Ce mouvement doit être amplifié et accéléré à travers la mise en place d’un environnement davantage incitatif.
 
Proposition 13 Ecrire la stratégie de la transformation numérique de l’économie. Cette stratégie numérique nationale est essentielle pour structurer ensuite les budgets publics et les dispositifs fiscaux de soutien à l’innovation. Les outils doivent être au service de cette stratégie qui aura été validée au préalable par les grandes branches industrielles. La "stratégie numérique 2025" du gouvernement allemand peut certainement constituer une source d’inspiration.
 
Proposition 14 Mettre en œuvre un dispositif de "suramortissement numérique de 150 %" (comme cela a été réalisé avec succès pour le suramortissement productif) favorisant, sans plus attendre, les investissements dans le numérique et le rapprochement des ETI et PME avec les start-up innovantes.
 
Proposition 15 Adapter le CIR au défi de la transformation digitale en créant le CIMENT (Crédit d’Impôt pour la Modernisation des Entreprises) pour en faire un crédit d’impôt nouvelle génération rendu accessible à toutes les tailles d’entreprise, notamment les PME et les ETI.
 
Proposition 16 Dans le cadre de la formation professionnelle dans les PME de croissance et dans les ETI, créer les conditions pour la formation des hommes et des femmes aux nouveaux métiers du numérique.
 
Afin de créer un environnement propice à l’acquisition et au développement des compétences digitales, il est nécessaire :

  • de favoriser le développement en région de partenariats entre les ETI et les entreprises sociales agréées solidaires comme Simplon qui permettent à des chômeurs de se former au métier du digital ;
  • d’exonérer temporairement l’entreprise de charges salariales pour tous les profils recrutés (apprentissage et CDI) via ces formations et qui sont effectivement affectés à des métiers "digitaux" ;
  • de favoriser l’émergence "d’écoles du digital" créées par une ou plusieurs ETI avec une structure comme Simplon et de défiscaliser les investissements consacrés à la mise en place et au fonctionnement de ces structures. Ces écoles seraient ouvertes à des demandeurs d’emploi ou à des étudiants souhaitant réorienter leur formation.
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(122 pages)
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