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Opération spéciale
Février 2024

Baromètre européen des
impôts de production 2024
Troisième édition

Auteurs
Lisa Thomas-Darbois
Directrice adjointe des études France et Experte Résidente

Lisa Thomas-Darbois est directrice adjointe des études France à l’Institut Montaigne.

Raphaël Tavanti-Geuzimian
Chargé de projets - Économie

Raphaël Tavanti est chargé de projets sur les questions économiques à l’Institut Montaigne depuis 2023.

Groupe de travail

Pour cette troisième édition du baromètre européen des impôts de production, l’Institut Montaigne a de nouveau collaboré avec les équipes de Mazars Société d’Avocats. Leurs experts en fiscalité ont ainsi été en mesure de proposer une approche juridique harmonisée des impôts de production grâce à l’appui du réseau international de Mazars Société d'Avocats, basé dans chacun des douze pays concernés par l’étude.

 

Contributeurs :

  • Bruno Pouget, associé chez Mazars
  • Élena Aubrée, avocate associée chez Mazars Société d’Avocats
  • Lauranne Quesne, avocate chez Mazars Société d’Avocats

Dans la continuité des deux années précédentes, l’Institut Montaigne dévoile en collaboration avec Mazars Société d'Avocats sa troisième édition du baromètre européen des impôts de production dont l’objectif est de comparer, au niveau européen, la fiscalité sur la production qui pèse sur les entreprises. En effet, le niveau des impôts de production constitue un réel enjeu de compétitivité et de dynamisme économique, national et européen. Cet outil s’avère particulièrement pertinent pour la France, qui affiche une fiscalité de production historiquement plus élevée que ses voisins européens.

La dernière édition avait révélé une baisse du poids de la fiscalité de production dans le PIB français, lié à la politique volontariste menée par le Gouvernement depuis 2020, en particulier la CVAE, pour atteindre ses objectifs de réindustrialisation. Depuis, ce volontarisme s’est quelque peu érodé, alors que la suppression définitive de la CVAE en deux ans, actée par la Loi de Finances 2023, s’est vue reportée jusqu’en 2027 à raison de contraintes budgétaires.

À l’aune de ces changements et enjeux d’attractivité au niveau national et européen, notre baromètre demeure plus que jamais, un outil nécessaire pour apporter de la visibilité sur cette fiscalité pour les entreprises et mesurer, dans le temps long, les marges de manœuvre françaises au sein du marché unique.

Cette troisième édition cherche à poursuivre cet objectif, et propose une analyse comparative des différentes tendances observables parmi les principaux pays européens, entre 2021 et 2022. La France maintient-t-elle une dynamique à la baisse ?

La définition d’un cahier des charges précis

Les experts impliqués se sont appuyés sur le Règlement européen n° 549/2013 du 21 mai 2013 définissant les impôts sur la production, ainsi que sur les normes juridiques françaises, notamment issues de jurisprudences rendues par les hautes juridictions françaises.

Une fois les contours de la définition juridique de l’impôt sur la production formalisés, les équipes de Mazars en France ont élaboré un cahier des charges listant les informations nécessaires à l’identification et à l’analyse des impôts sur la production pour chacun des douze pays à mettre en perspective. Le cahier des charges comprend ainsi la liste de tous les impôts existants et signale les impôts, taxes et contributions répondant à la définition d’impôts sur la production (exemples : impôts sur la propriété ou l’utilisation de terrains, bâtiments et constructions à des fins de productions (cotisation foncière des entreprises, taxe foncière…), impôts sur les actifs mobiliers utilisés à des fins de production (taxe sur les véhicules de société…), impôts sur le travail (taxe sur les salaires…), en s’appuyant sur 4 critères principaux.

Ces impôts doivent être :

  • obligatoires ;
  • dus par les entreprises ;
  • prélevés par les administrations publiques ou les institutions de l’Union européenne ;
  • dus au titre des capacités de production.

Ce cahier précise également les points de difficultés et propose une justification étayée du classement de certains impôts, par exemple l’exclusion de la taxe sur les friches commerciales (due au titre de la détention d’un immeuble inexploité et qui ne constitue donc pas un moyen d’exploitation) ou encore l’inclusion de la Contribution Sociale de Solidarité des Sociétés ou C3S (principalement assise sur le chiffre d’affaires, mais dont les particularités permettent malgré tout de l’inclure dans la catégorie des impôts sur la production).

Vous pouvez retrouver ici le détail du cahier des charges.

Comparaison du cahier des charges et des données Eurostat, par les équipes de Mazars en France et en Europe

Les experts Mazars, basés dans les onze autres pays concernés par l’étude, ont reçu de Mazars en France, pays coordinateur du projet, le cahier des charges ainsi que les données Eurostat sur les impôts de production. Si elles constituent un point de départ intéressant, les informations Eurostat prennent en compte des contributions et taxes qui relèvent d’une approche de l’imposition de production à certains égards différente de celle retenue par Mazars, car moins précise.

Ainsi, sur la base du cahier des charges, les experts Mazars ont été chargés de classer les informations d’Eurostat, d’analyser et, si nécessaire, de revoir la classification préexistante au regard des critères établis.

À titre d’exemple, les données Eurostat comptabilisent, pour la France, la totalité de la taxe foncière en tant qu’impôt de production, sans réussir à différencier la part due par les entreprises de la part due par les ménages. L’analyse inédite proposée par ce nouveau baromètre, fondée sur des sources juridiques préexistantes, a nécessité un travail d’analyse particulièrement minutieux mené par les fiscalistes du groupe Mazars.

Les équipes ont alors dressé la liste exhaustive de l’ensemble des impôts par pays puis ont déterminé, ligne par ligne, s’il s’agissait ou non d’un impôt sur la production en justifiant leur choix et en prenant en compte la complexité des règles fiscales propres à chaque pays.

Le degré de précision atteint par cet exercice est inédit : il convient toutefois de signaler qu’il existe une marge d’erreur s’agissant de l’exercice d’isolement des parts de ces impôts, dues par les ménages et par les entreprises. En effet, pour certains pays, tels que l’Espagne ou la Pologne, certaines données sont manquantes et ne permettent pas de conclure à une absence de contribution des ménages sur des impôts de production, supportés selon la définition juridique établie par les entreprises. En France, certaines taxes identifiées par le cahier des charges comme relevant des impôts de production et collectées par les collectivités locales, souffrent également d’un manque de transparence et ne sont pas systématiquement remontées à Eurostat.

Élaboration de l’indicateur

Ces données commentées et classées ont ensuite été transmises par Mazars à l’Institut Montaigne. L’Institut Montaigne, avec l’aide d’HEC Junior Conseil, a ensuite exploité ces données afin de construire l’indicateur nécessaire à la comparaison du montant global annuel des impôts sur la production entre la France et les onze autres pays européens. Cet indicateur commun est présenté en proportion du PIB 2022.

Spécificités de cette nouvelle édition du baromètre

Cette troisième édition du baromètre des impôts de production s’inscrit dans la continuité du travail engagé au cours des deux années précédentes. L’Autriche fait son apparition dans cette troisième édition du baromètre. Sa présence se justifie par son tissu industriel robuste, agile, et spécialisé dans des secteurs de pointe à forte valeur ajoutée. Rapporté à son nombre d’habitants, le PIB de l’Autriche est le 5e plus élevé de l’Union européenne, et le 3e parmi les pays de ce baromètre (derrière le Danemark et les Pays-Bas). La vitalité de son modèle économique rend donc d’autant plus pertinente l’étude de sa fiscalité de production.  

Également, les chiffres de croissance, importants au regard des difficultés économiques au cours de l’année 2022 (13 % pour la Pologne par exemple), tiennent dans une prise en compte des grandeurs nominales en monnaie locale courante, dont les ordres de grandeur sont importants par la résultante des tensions inflationnistes apparues au début de cette année après le début de la guerre en Ukraine. Pour corriger les effets de la hausse des prix, une solution consiste à déflater l’ensemble des recettes fiscales mais cette méthode n’a pas été retenue ici car elle aurait induit des distorsions et donc des biais sectoriels.

Après deux années de baisse, une tendance à la hausse des impôts de production au niveau Européen

Cette nouvelle édition du baromètre confirme une augmentation généralisée du poids des impôts de production en Europe. Précisément, on constate que parmi les douze pays étudiés dans la précédente édition, sept ont enregistré une hausse du poids de leurs impôts de production dans leur PIB en 2022. Parmi eux, la Pologne (+18 %), l’Allemagne (+8,7 %), la France et l’Italie (+5 %), connaissent les hausses les plus importantes. En Pologne comme en Allemagne, à l’instar de la précédente édition, c’est la progression de la fiscalité environnementale qui pèse pour l’essentiel sur cette augmentation.

Baromètre européen des impôts de production 2024

Une position de la France qui s’enracine

La France conserve sa deuxième place pour la troisième année consécutive de notre baromètre, une nouvelle fois derrière la Suède, dont le poids très élevé de la fiscalité de production s’explique par un système très complexe et particulier.

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Selon les résultats de notre baromètre, le poids des impôts de production en France en 2022 renoue avec une légère augmentation et représente 4,0 % du PIB en 2022 contre 3,8 % en 2021. Ces chiffres sont tirés par des hausses sur plusieurs postes fiscaux à commencer comme le poids de la contribution sur l’apprentissage et de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM). La CVAE, affiche également une importante hausse, qui bien que contre-intuitive, tient dans un système de collecte très particulier et que l’on retrouve sur peu d’autres impôts, et à une sensibilité marquée à l’activité économique.

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