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07/09/2012

Où faut-il concentrer les dépenses d’éducation ?

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Où faut-il concentrer les dépenses d’éducation ?
 Lucie Piolot
Auteur
Chargée d 'études



Améliorer notre système éducatif répond à un double objectif de renforcement de la cohésion sociale et de la compétitivité de notre pays : favoriser l’insertion scolaire, sociale et professionnelle des individus et investir dans le capital humain. Une étude récemment publiée par Natixis, Croissance potentielle, dépenses d’éducation ; performance du système éducatif, analyse l’impact des dépenses publiques sur les performances du système scolaire et révèle une corrélation forte si l’investissement budgétaire est destiné à l’éducation primaire. Dans son rapport Vaincre l’échec à l’école primaire, l’Institut Montaigne appelait déjà en 2010 à une réallocation des marges budgétaires à destination de l’école primaire.

Comment donner le plus grand impact socio-économique à la politique éducative ?
Où faut-il concentrer les dépenses d’éducation ? Pour le savoir, une étude publiée par Natixis [1] a analysé l’intensité du lien entre la croissance potentielle, mesurée à partir des gains de productivité, et l’effort d’éducation, mesuré par différentes variables :
- la structure de la population active par niveau d’éducation ;
- le niveau des élèves, mesuré par les résultats aux tests PISA menés par l’OCDE ;
- les dépenses publiques et totales d’éducation pour les différents niveaux composant le système éducatif (primaire, secondaire et tertiaire), en pourcentage du PIB.
Lequel de ces trois leviers est le plus efficace pour améliorer la productivité du pays ? Selon l’équipe dirigée par Patrick Artus, la réponse est sans appel : c’est en accroissant les dépenses dans l’école primaire qu’on obtient la plus grande augmentation de la productivité moyenne par tête. La corrélation entre la productivité par tête et les dépenses d’éducation primaire est positive et forte, tandis qu’elle est faible pour les dépenses d’éducation tertiaire et nulle pour les dépenses d’éducation secondaire ainsi que pour le score moyen aux tests PISA.

Investir dans le capital humain dès la petite enfance
Chaque année, quatre écoliers sur dix quittent l’école primaire avec de graves lacunes en lecture, écriture et calcul. Ces difficultés se forment dès le plus jeune âge et persistent tout au long de la scolarité, générant ensuite des obstacles majeurs à l’insertion dans le marché de l’emploi.
Or, le retour sur investissement dans le capital humain est d’autant plus élevé que l’effort intervient tôt dans la scolarité. Cette corrélation entre éducation primaire et bénéfices économiques a été mise en évidence par l’OCDE [2] qui souligne qu’une augmentation des capacités cognitives des enfants (mesurée par les résultats aux tests PISA) de 25 points apporterait un gain de plusieurs milliards d’euros.
S’il faut investir dans l’école primaire plutôt que dans le lycée, c’est aussi parce que le lycée bénéficie de moyens plus importants alors même qu’une partie de la génération n’y continuera pas sa scolarité. Dans le contexte actuel de raréfaction des ressources budgétaires, il convient d’en réallouer une partie vers l’école primaire.
L’étude publiée par Natixis va dans le sens des recommandations mises en avant depuis longtemps par l’Institut Montaigne : investir dans la petite enfance et dans l’éducation primaire est une priorité absolue pour lutter contre l’échec scolaire en favorisant le développement des capacités cognitives et langagières fondamentales dès le plus jeune âge.

Agir sur l’ensemble de l’écosystème scolaire
Concomitamment à cette redistribution budgétaire, des leviers doivent être actionnés pour assurer une amélioration notable de notre système scolaire. Dans sa note Contribution à la concertation sur l’école : priorité au primaire ! parue en juillet 2012, l’Institut Montaigne formule quatre autres propositions :
- former les professionnels de la petite enfance aux outils stimulant le développement cognitif et langagier et augmenter le nombre de places en crèches, en particulier dans les zones urbaines sensibles où les populations sont les plus fragiles socialement ;
- améliorer l’offre de formation à destination des enseignants : proposer des formations initiales en alternance mettant l’accent sur la pédagogie et enrichir la carte des formations continues ;
- rendre obligatoires des rencontres régulières entre les parents d’élèves et les équipes pédagogiques pour réarticuler scolaire et périscolaire ;
- repenser les rythmes scolaires pour revenir à une année plus ample et moins dense.

Aller plus loin :
- Voir la vidéo de Laurent Bigorgne présentant des propositions pour agir contre l’échec scolaire

Tags : éducation, école primaire, compétitivité, croissance.

Notes

[1] Natixis, Croissance potentielle, dépenses d’éducation ; performance du système éducatif, Flash Economie, n°543, 21 août 2012.

[2] OCDE, The high cost of low educational performance – The long-run economic impact of improving PISA outcomes, 2010.

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