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05/09/2008

Le bouclier sanitaire ou comment éviter de gâcher une bonne idée ? *

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Cette idée, lancée par Martin Hirsch en juin 2007, consiste en la prise en charge à 100 % des dépenses de santé reconnues par l’assurance maladie dès lors que le montant laissé à la charge de l’assuré dépasse x % de son revenu. D’où le terme de « bouclier » qui suggère l’idée de protection, chacun étant assuré que les dépenses de santé qu’il devra supporter ne peuvent excéder un certain montant de son revenu.

Un tel bouclier soulève néanmoins un certain nombre de questions :

1) constitue-t-il un progrès ?
2) peut-il s’articuler avec notre système d’assurance-maladie tel qu’il fonctionne aujourd’hui ?
3) peut-il contribuer à réinventer l’assurance-maladie, comme l’a proposé l’Institut Montaigne ?

1. Le bouclier sanitaire constitue-t-il un progrès ?

La réponse est oui !

o Il permet une simplification et une meilleure lisibilité par la suppression de tous les dispositifs de plafonnement et d’exonération des forfaits, franchises et tickets modérateurs qui s’empilent aujourd’hui en fonction de l’évolution des déficits (résolution du problème des ALD) ;
o Il permet un accès aux soins plus justes qu’aujourd’hui, le reste à charge fonction du revenu.

2. Le bouclier sanitaire peut-il s’articuler avec notre système d’assurance-maladie tel qu’il fonctionne aujourd’hui ?

La réponse est non !

o Aux cotisations d’assurance-maladie dont le montant est fonction de l’ensemble des revenus (CSG) et des salaires (cotisations patronales), se superposerait une prise en charge qui serait également fonction des revenus : dans un tel système, on est plus dans le cadre de l’assurance, ni de la solidarité, mais dans un schéma de redistribution massif.
o Le maintien du ticket modérateur, c’est-à-dire d’un remboursement proportionnel, et d’un bouclier sanitaire intégrant les tickets modérateurs et excluant les dépenses hospitalières (tel que cela est envisagé dans le rapport Briet-Fragonard), ne va pas dans le sens de la simplification de la gestion et d’une plus grande clarté.

3. Le bouclier sanitaire peut-il contribuer à réinventer l’assurance maladie comme l’a proposé l’Institut Montaigne ?

La réponse est oui ! Pour ce faire, il faut :

o Définir les contours du bouclier sanitaire par rapport à l’ensemble des dépenses de santé référencées par l’assurance universelle (intégrant les dépenses hospitalières !). Ce bouclier défini individuellement ou par ménage serait le même pour tous. Par exemple, au-delà de 1000 ou 2000 €, les dépenses seraient prises en charge à 100 %.
o Séparer clairement assurance et solidarité :

1. La cotisation d’assurance maladie, souscrite auprès d’institutions d’assurance en concurrence, correspondrait au risque maladie au-delà du seuil
2. Le financement de la solidarité reposerait sur une CSG assise sur l’ensemble des revenus
3. La solidarité couvrirait alors, par exemple :
• tout ou partie des dépenses de santé en-dessous du seuil, compte tenu de l’ensemble des revenus du ménage ;
• tout ou partie des cotisations d’assurance-maladie souscrite auprès des institutions d’assurance-maladie et qui sont également fonction des revenus.
4. La gestion du risque maladie serait assurée par les institutions d’assurance à partir du 1er euro pour les dépenses de santé couverte par l’assurance maladie universelle.

Le bouclier sanitaire, c’est donc une excellente idée... sur le papier. Reste donc à mettre en œuvre les réformes indispensables sans lesquelles il ne pourra pleinement fonctionner.

* Excellente analyse par François Ecable « Le bouclier sanitaire en France » Futuribles Avril 2008 – numéro 340 – voir aussi Mission bouclier sanitaire : Raoul Briet, Bertrand Fragonard 28 Septembre 2007
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