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05/05/2023

Chine : endiguement ou engagement, le dilemme occidental

Chine : endiguement ou engagement, le dilemme occidental
 François Godement
Auteur
Expert Résident principal et Conseiller spécial - Asie et États-Unis

En l’espace de trois semaines, la France, les États-Unis et le Royaume-Uni ont successivement tenu, chacun à leur manière, des propos conciliants à l’égard de la Chine, la Chine telle qu'elle est et non pas telle qu'ils voudraient qu'elle soit. Bien que différents sur la forme et sur le fond, c'est la direction adoptée par ces déclarations qui est la plus significative. D'autres se sont rendus à Pékin, du chef du gouvernement espagnol au Premier ministre de Singapour. Fait notoire, Volodymyr Zelensky a sollicité et finalement obtenu un entretien téléphonique avec Xi Jinping. On peut certes penser que si le diable pouvait venir en aide à l'Ukraine, le président ukrainien ferait poliment appel au diable.

Une politique chinoise en dents de scie

L'interview controversée du président Macron à son retour de Chine a suscité de nombreux commentaires, quoiqu’un peu moins de l’autre côté de l'Atlantique : l'administration Biden et les médias américains y ont accordé beaucoup moins d'attention que leurs homologues européens. La politique étrangère française n’a plus l’impact d’antan, après deux décennies à la traîne en matière de croissance économique au sein du G7, juste devant l’Italie, et avec une société dans un déni de cet état de fait. Aux États-Unis, un discours récent de la secrétaire au Trésor Janet Yellen n’a pas non plus été très relayé au-delà de Washington. Pourtant, Mme Yellen y signale, à la Chine et aux alliés ou partenaires des États-Unis, un tournant, ou tout du moins la volonté de contenir une dérive de la politique chinoise des États-Unis dans l’opinion et au Congrès. "Certains voient les relations entre les États-Unis et la Chine sous le prisme d'un conflit entre grandes puissances : un affrontement bilatéral à somme nulle où l'un doit chuter pour que l'autre puisse s'élever. Le président Biden et moi-même ne voyons pas les choses de cette manière. Nous pensons que le monde est suffisamment vaste pour nous deux". Madame Yellen se réfère explicitement au soutien du président Biden, ce qui implique que le changement de cap n'a pas été si facile à adopter. Il est par ailleurs troublant qu'elle fasse écho à des déclarations antérieures de Xi Jinping faites en 2012 et 2013, selon lesquelles "le vaste océan Pacifique offr[ait] suffisamment d'espace pour les deux grands pays que sont la Chine et les États-Unis".

Par ailleurs, dans un autre discours, le conseiller à la sécurité nationale, Jake Sullivan, a reconnu que l'engagement économique était “toujoursessentiel" dans la relation sino-américaine, mais à une condition clé : “la Chine doit jouer son rôle". Enfin, James Cleverly, secrétaire d'État aux Affaires étrangères du Royaume-Uni, a multiplié les déclarations exhortant le Royaume-Uni à "ne pas fermer les portes de sa relation" avec la Chine, et affirmant qu'une guerre froide serait "contraire à notre intérêt national". Le tout est couronné par un discours présenté comme notable, dont le point de départ est "la profondeur et la complexité de l'histoire et de la civilisation chinoises, et donc, par extension, de notre propre politique", et qui s'achève sur la conclusion suivante : "notre approche à l’égard de la Chine doit additionner tous ces courants, pour protéger notre sécurité nationale, nous aligner avec nos amis, nous lier et commercer avec la Chine là où nos intérêts convergent, éviter une politique de la langue de bois et toujours défendre les valeurs universelles chères à la Grande-Bretagne".

Le discours très sculpté de James Cleverly, où tout l'éventail des politiques est couvert, de la contre-attaque stratégique à la coopération et au commerce, reflète parfaitement le dilemme et les contradictions auxquels sont confrontés les pays occidentaux. Avec des nuances, les États-Unis et le Royaume-Uni souscrivent chacun à la définition européenne des relations avec la Chine et telle que retenue en mars 2019 : un partenaire en matière de coopération et de négociation, un concurrent économique, un rival systémique. Leur diplomatie publique doit donc jongler avec ces trois ballons, au risque d'en perdre un, à l'instar du président français à son retour de Chine, ou du Premier ministre espagnol Sanchez lorsque celui-ci a déclaré que la Chine et l'Espagne "croient en un multilatéralisme fort, transparent et fondé sur des normes". Il est difficile de trouver le bon équilibre entre les trois types de relation. L’exercice est rendu plus délicat encore par le décalage entre les perspectives de court et de long terme : les gains d’aujourd'hui avec la Chine peuvent être les vulnérabilités de demain.

Oublier le découplage

Ces discours pourraient être interprétés comme autant d’appels à la Chine pour qu'elle renonce à sa volonté de confrontation. La Chine a certes une capacité d'initiative, et elle pourrait contribuer à prévenir, en théorie, “la marche des somnambules vers la guerre". À l’inverse, les partisans de l’engagement et non d’un endiguement recommencent à se manifester aux États-Unis, comme l’illustre la récente mise en garde de Susan Shirk, ancienne membre de l'administration Clinton et spécialiste de la Chine, contre "la morosité fataliste quant à l'avenir des relations entre la Chine et les États-Unis". Mais la Chine n'a guère répondu à ces appels, en particulier à l’égard des États-Unis.

Le “découplage", ce spectre qui semble hanter les industriels et exportateurs européens, ne fait pas davantage partie du vocabulaire américain que du vocabulaire européen. C'est pourtant une réalité de la politique économique chinoise, qui substitue les producteurs locaux aux produits fabriqués à l'étranger au fur et à mesure que sa technologie parvient à maturité dans chacun des secteurs de production visés. La combinaison de l’ingéniosité (y compris avec l'aspiration forcée ou illégale de technologies) et des subventions étatiques aboutit à des résultats impressionnants. Après des cas emblématiques tels que les télécommunications et la téléphonie mobile, l'énergie solaire et éolienne, les batteries, les chantiers navals, c'est l'industrie automobile chinoise qui se hisse au premier rang mondial en termes de production nationale et déjà au second rang en termes d'exportations. Les économistes libéraux veulent se rassurer en rappelant qu’une partie de ces exportations chinoises sont faites par des entreprises à capitaux étrangers (Tesla, et même BYD, où Warren Buffett détient une participation minoritaire). Pendant ce temps, les consommateurs chinois se tournent massivement vers les modèles chinois. Et en parallèle, la Chine s'oppose à toute restriction sur les exportations, les transferts de technologie ou les investissements en Chine : Xi Jinping aurait déclaré à Ursula Von der Leyen qu'il n'était pas naïf et qu'il considérait le fait de "dérisquer" comme un synonyme de "découplage".

Les exportations chinoises ont augmenté de 30 % en termes absolus par rapport à leur niveau pré-Covid. L’excédent commercial pour les biens manufacturés a de nouveau dépassé 10 % du PIB de la Chine au quatrième trimestre 2022 – et ce, avant la forte hausse du premier trimestre 2023. Cette situation fut un temps considérée comme un indice de ce que certains appelaient l’effet "Chimerica" : l'excédent commercial de la Chine équivaudrait au déficit commercial de l'Amérique. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. Le seul déficit commercial de l'Union européenne vis-à-vis de la Chine a plus que doublé (passant de 165 à 395 milliards d'euros) en l'espace de trois ans (de 2019 à 2022). Il s'agit en grande partie d'un déficit lié aux biens manufacturés : la part de l'énergie (le GNL par exemple) dans les importations de l'UE en provenance de Chine reste très faible en valeur, même en 2022, et les exportations de produits miniers, bien que cruciales, ne pèsent pas lourd dans la balance commerciale.

La dépendance à l'égard de la Chine s'est toutefois accentuée pour certains intrants essentiels. L'industrie allemande est par exemple plus dépendante en proportion aux importations de métaux chinois qu’elle ne l’était au gaz russe, ce qui a même incité les autorités à rechercher de nouvelles ressources minières directement en Allemagne. Margrethe Vestager a de son côté souligné que la part des "fournisseurs non fiables" en matière d'infrastructures et de connectivité a plutôt augmenté que diminué sur le marché européen. C'est effectivement le cas pour Huawei et la 5G, exception faite pour la France.

Cette dépendance excessive ne concerne pas seulement les matériaux essentiels – tels que les terres rares – que la Chine s'est accaparée, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de ses frontières, et qu'elle exploite aujourd'hui en grande proportion. Elle ne se limite pas non plus aux technologies à double usage. Il existe des secteurs et des niches dans lesquels la Chine s'est forgée une position dominante, ce qui ne peut pas s'expliquer uniquement par des facteurs de prix. Dans bien des domaines, la Chine est en train d'acquérir l'avantage dont elle jouissait déjà dans les produits bas de gamme tels que les vêtements, les jouets et l'électronique grand public. Ce devrait également être le cas pour les biens publics très visibles tels que les trains rapides, sous réserve que la politique intérieure et l’opinion publique n'interviennent pas. La montée en puissance de la Chine dans l'industrie nucléaire civile, et la cohérence de son plan de développement au fil des ans feront d'elle une source d'expertise internationale et de main d'œuvre qualifiée, sans oublier les moyens financiers.

En somme, le "découplage" pourrait se concrétiser à moyen terme dans deux cas de figure : sous un angle géopolitique, notamment en cas d'un conflit autour de Taïwan, avec pour conséquence des interruptions de trafic, des blocages et les sanctions attendues. Mais la perspective est bien réelle aussi, à mesure que le projet chinois de se recentrer sur son industrie nationale est mis en œuvre dans de nouveaux secteurs : c'est l'une des principales raisons pour lesquelles des entreprises se désengagent silencieusement de la Chine. Mais dans la vision court termiste des affaires, il ne s'agit que d'un simple épouvantail sans réels fondements.

La variable prix

Le seul facteur susceptible, à très court terme, de ralentir les exportations chinoises vers les principales économies industrialisées serait une chute considérable de la demande. Mais même cela dépend de l'évolution des prix relatifs de l'industrie manufacturière et des taux de change. Les coûts de production en Chine ont augmenté plus rapidement que l'indice des prix à la consommation (IPC), en raison de la faiblesse de la demande intérieure pour ces biens. Le yuan a baissé par rapport à l'euro entre septembre 2022 et avril 2023, et est revenu au même niveau que le dollar américain. Les coûts de fret et de transport sont retombés aux niveaux observés avant le Covid et la guerre en Ukraine. Cette réalité est encore plus frappante avec la vague inflationniste constatée en Europe et aux États-Unis dans le contexte de l’invasion russe de l’Ukraine. Comme cela a souvent été le cas en Asie orientale, la dépendance chinoise aux exportations comme moteur de croissance implique des prix bas, ce qui peut contribuer à réduire l'inflation dans les économies occidentales importatrices : il s'agit là d'un objectif clé pour les dirigeants politiques soumis au cycle électoral. De fait, de part et d’autre de l’Atlantique, d'excellents motifs économiques de court terme expliquent l'émergence d'un consensus pour  "dérisquer" plutôt que "découpler".

Séparer l'économie de la politique

La logique qui sous-tend ces discours récents pourrait correspondre à un ultime effort pour séparer économie (ou commerce) et politique (ou géopolitique). De nombreux praticiens chevronnés de la Chine, dont les carrières se sont principalement déroulées à l’ère de la réforme économique chinoise et de l'intégration croissante du pays à l'économie mondiale, souhaitent ressusciter ce passé. Ils se réfèrent pour cela à une époque où la voie de la raison commandait de se concentrer sur les intérêts économiques et les grandes causes globales,  avec l'espoir d’emporter l'adhésion de la Chine. Mettre l'accent sur les enjeux et conflits idéologiques et territoriaux, se focaliser sur la dimension militaire de la montée en puissance de la Chine et sur son chauvinisme peut sembler irrationnel, et même constituer une prophétie auto-réalisatrice nous entraînant vers un conflit généralisé. Pourtant, ces tendances existent bel et bien en Chine, et la chronologie indique qu'elles ont précédé les réponses de l'Occident et, plus encore, celles des voisins asiatiques. Il peut sembler sage de rester à l'écart d’un conflit entre grandes puissances pour l’hégémonie mais il est aussi tout à fait illusoire d'imaginer qu’un conflit épargnerait les spectateurs. Si un blocus total autour de Taïwan devait se produire, une étude a estimé que son coût pour l'économie mondiale s'élèverait à 2 000 milliards de dollars (1 800 milliards d’euros au taux du 14 décembre). Lors de son discours, Jake Sullivan a préféré citer l’estimation de l'Asia Nikkei et ses 2 600 milliards de dollars (2 340 milliards d’euros au taux du 27 avril 2023), laissant peut-être entendre que les États-Unis sont les derniers à sous-estimer l'impact mondial de ce que certains voudraient considérer comme un "conflit régional".

Deux observations doivent dès lors être formulées.
 
Premièrement, les communiqués officiels chinois ne disent strictement rien d’une politique étrangère et d’une attitude géopolitique plus conciliante envers les pays occidentaux. À l’inverse, les liens avec la Russie semblent s'intensifier, comme en témoigne la dernière visite du ministre chinois de la Défense à Moscou. Celle-ci est intervenue après la rencontre, le mois dernier, de nombreux membres de l'establishment militaire et spatial russe lors de la visite de Xi Jinping à Moscou. La pression autour de Taïwan n'a pas diminué, bien au contraire. Et pour évoquer des préoccupations bioéthiques ou environnementales, à l'heure où nous écrivons ces lignes, la Chine occulte les recherches sur les origines du Covid, et continue d’augmenter ses investissements dans de nouvelles centrales à charbon. Plus généralement, l'ère Xi se caractérise par la subordination de l'économie au politique. Ce qui peut sembler irrationnel pour d'autres est un calcul parfaitement rationnel pour le PCC, dont la priorité absolue est la domination politique à l'intérieur du pays, quel qu'en soit le coût. Fait plus dangereux encore, la plupart des canaux d'information destinés au peuple chinois ont été bloqués, tandis que les médias de désinformation du PCC sont omniprésents dans le pays.

Deuxièmement, l'économie chinoise, bien qu'elle se soit partiellement rétablie après les crises du Covid et de l'immobilier en 2021-2022, est loin d'être florissante. C'est particulièrement vrai pour les importations, qui sont évidemment un objectif majeur des exportateurs occidentaux. La hausse de la consommation chinoise début 2023 repose sur les services et plus particulièrement sur la restauration et les loisirs, les produits de luxe, l'argent, l'or et la joaillerie. Les ventes d'appareils électroménagers et d'automobiles sont en recul – et c'est encore plus vrai pour les produits étrangers. Les investissements aller et retour, par exemple depuis Hong Kong, des entreprises chinoises sont aujourd'hui plus importants que les investissements étrangers. La Chine fait appel aux entreprises étrangères et à leur technologie en fonction de besoins spécifiques, et non dans le cadre d'une politique d'ouverture générale. Ce n'est pas, ou du moins ce ne devrait pas être, l’espoir de gains immédiats sur le marché chinois qui motive les nouvelles initiatives occidentales.

Si celles-ci ne sont pas coordonnées, elles se font tout de même écho entre elles. Elles ont un fil conducteur commun : dans le nouveau cycle inflationniste qui a commencé, la Chine reste le seul grand centre manufacturier où l'inflation est quasi nulle. Les responsables du Trésor américain (et de la Réserve fédérale) l'ont souvent souligné et se sont prononcés contre des droits de douane spéciaux qui se seraient répercutés sur les consommateurs américains. Pour l'Europe, la crainte de perdre l'accès aux chaînes d'approvisionnement logistiques en provenance de Chine est très présente : dérisquer et mener une politique industrielle au niveau de l'Union européenne n'est pas un projet à court terme, et nécessite davantage de coordination et de financement. Un effort est en cours, avec l'ajout au budget annuel de plusieurs budgets pluriannuels sur la période 2021-2027. En supposant que le montant total soit effectivement déboursé (ce qui n'est presque jamais le cas pour les dépenses pluriannuelles), cela représenterait 16,8 % du PIB de l'UE en 2021, et donc une avancée significative.

En filigrane, ces discours laissent aussi transparaître une course aux opportunités offertes par la Chine. L'Europe et les États-Unis, par exemple, ne se font pas entièrement confiance en matière commerciale. Le président Biden et la présidente de la Commission Von der Leyen sont toutefois en première ligne pour remédier à cette situation : ils doivent tous deux faire face à leur propre administration dans un cas, à la désunion ou à la réticence des États membres dans l'autre. Les États-Unis craignent que l'Europe n'utilise les interdictions américaines de technologies chinoises pour améliorer ses propres ventes. L'Europe craint que les subventions américaines aux secteurs critiques ne créent des conditions de marché défavorables aux producteurs basés en Europe. Le Royaume-Uni, avant et après le Brexit, a souvent cherché à doubler l’UE à la baisse dans les négociations avec la Chine. La France et son président sont en lice pour obtenir à la fois un statut et des contrats en Chine. La vague de visites gouvernementales en Chine après le 20ème Congrès, initiée par le chancelier Scholz, a poussé d'autres pays à se tourner vers Pékin. Les discours sur le pic de croissance de la Chine, le futur déclin de la population et les dégâts de l'autoritarisme sur l'innovation rassurent sur le long terme, et favorisent l’opportunisme à court terme. Souvenons-nous pourtant des spéculations sur “l'après-Poutine" qui eurent cours à partir de 2008, lorsque Poutine avait été remplacé par Medvedev pour un mandat présidentiel. Il s’agit là d'une "politique vaudou", tout comme il y a eu une économie vaudou, qui repose sur la croyance qu'un problème laissé sans solution disparaîtra de lui-même.

Une réalité duale

La Chine, très critiquée pour ses orientations géopolitiques, idéologiques et en matière de droits de l'Homme, fait pourtant partie des vainqueurs sur la scène économique internationale. L'adoption par les États-Unis d'une politique industrielle et de développement témoigne de cette réalité. La percée économique de la Chine se fait en dépit des mesures défensives et des réglementations adoptées entre autres par l'Europe, les États-Unis et le Japon. La controverse sur le découplage a occulté ce que les stratèges chinois ont toujours escompté : nous avons présentement et dans un avenir proche besoin de la Chine comme fournisseur, autant qu'elle a besoin de nous comme client.

Devant cette réalité duale, c’est la proportion des différentes politiques à adopter qui compte. “Dérisquer” - atténuer les risques, par exemple, est une condition nécessaire au découplage qui devrait intervenir en cas de conflit majeur. Un vrai découplage à court terme n'est pas judicieux sur le plan économique et pourrait même renforcer les forces léninistes et chauvinistes en Chine qui se nourrissent de la "lutte" et de conflictualité. Nouer le dialogue avec la Chine – en pratique, avec des dirigeants chinois non élus, puisque la société civile chinoise s'efface pour mieux se protéger – est utile mais à deux conditions : que ce dialogue ne soit pas gaspillé en louanges superficielles, et qu'un bilan certifié soit tenu des résultats obtenus, par rapport aux assurances données. Sur des questions brûlantes telles que la montée en puissance militaire de la Chine et ses actions dans la région Asie-Pacifique, il est impossible de prédire quand un conflit éclatera. Mais le bon sens veut que les partenaires de la Chine pratiquent conjointement la dissuasion, et qu'ils soient conscients des risques encore plus élevés encourus sur le long terme. C'est à ces deux conditions simultanées que nous devrions évaluer hommes politiques et experts quand ils formulent leurs politiques à l'égard de la Chine.

 

Copyright Image : LUDOVIC MARIN / POOL / AFP

Le président chinois Xi Jinping, son homologue français Emmanuel Macron et la présidente de la Commission européenne Ursula von de Leyen se rencontrent à Pékin le 6 avril 2023.

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