Le déficit public primaire (hors intérêts de la dette publique) représente 0,8 % du PIB en 2018. Il est quasiment égal à celui qui permet de stabiliser la dette aux environs de 100 % du PIB, compte tenu de la croissance du PIB et du taux d’intérêt de la dette. Le Gouvernement prévoit d’ailleurs la quasi-stabilisation de celle-ci un peu au-dessous de 100 % du PIB sur les années 2018-2020. Or, selon la Commission européenne, la dette publique de la zone euro serait ramenée à 86 % du PIB fin 2019, celle de l’Union européenne à 79 %, et celle de l’Allemagne à 58 %.
La baisse des prélèvements obligatoires est forte et la croissance prévue des dépenses est modérée
Le taux des prélèvements obligatoires devrait passer de 45,0 % du PIB en 2018 à 44,7 % en 2019, et 44,3 % en 2020, hors impact de la réforme du CICE, ce qui correspond à une baisse des impôts et cotisations sociales de 20 Mds€ sur l’ensemble des deux années.
La décomposition des prélèvements obligatoires entre ceux qui pèsent sur les ménages et ceux qui pèsent sur les entreprises est toujours économiquement discutable, car les impôts et cotisations payés par les entreprises finissent toujours par être répercutés sur des ménages (actionnaires, salariés, clients…). Le ministère de l'Economie et des Finances considère néanmoins que cette baisse de 20 Mds€ sur deux ans se fera presque entièrement (19 Mds€) au profit des ménages.
Les principales mesures sont en 2019 :
- l’effet en année pleine de la baisse des cotisations salariales intervenue fin 2018 en contrepartie de la hausse de la CSG (- 4,0 Mds€) ;
- la deuxième étape de la suppression de la taxe d’habitation sur la résidence principale de 80 % des Français (-3,6 Mds€) ;
- l’exonération de cotisations et la défiscalisation des heures supplémentaires (-3,0 Mds€) ;
- l’annulation de la hausse de la CSG pour les retraités modestes (-1,6 Mds€).
Parmi les quelques mesures de hausse, la plus importante est l’augmentation du taux des cotisations aux régimes de retraite complémentaire (+ 1,8 Mds€).
Pour 2020, les principales mesures prévues sont :
- la réforme du barème de l’impôt sur le revenu (-5,0 Mds€) ;
- la troisième étape de la suppression de la taxe d’habitation (-3,7 Mds€) ;
- la poursuite de la baisse du taux de l’impôt sur les sociétés (-2,5 Mds€).
Parmi les quelques mesures de hausse figurent l’augmentation des taxes sur les tabacs (+ 0,4 Md€) et la remise en cause partielle de la déduction forfaitaire spécifique sur l’assiette des cotisations sociales, dont bénéficient certaines professions (+ 0,4 Md€).
Pour réduire très légèrement le déficit public structurel en dépit de ces mesures de baisse des prélèvements obligatoires, la croissance des dépenses publiques doit être modérée.
Le taux de croissance des dépenses (hors crédits d’impôts) prévue par le Gouvernement est de 0,7 % en volume (c’est-à-dire après déduction de la hausse des prix) en 2019 comme en 2020. Ce rythme de croissance est effectivement modéré au regard de la progression moyenne observée dans les années 2003-2007 (2,1 %), 2008-2012 (1,4 %) et 2013-2017 (0,9 %). Encore faut-il que ce taux de croissance soit respecté en exécution.
Le résultat obtenu en 2018 est certes notable, et le Gouvernement peut s’en prévaloir puisque la croissance en volume des dépenses publiques hors crédits d’impôt a été négative (-0,3 %). Toutefois, cette modération résulte, pour partie, d’une inflation plus forte que prévu (1,6 % au lieu de 1,0 % prévu lors du dépôt du projet de loi de finances). En effet, les budgets sont votés en valeur, et les outils de pilotage de la dépense permettent de ne pas les augmenter significativement lorsque l’inflation est plus forte. En outre, les prestations sociales ne sont indexées sur l’inflation de l’année N qu’au début de l’année N+1. Dans ces conditions, une inflation non anticipée une année donnée diminue le taux de croissance en volume des dépenses de la même année, mais tend à majorer celui de l’année suivante.
Toutefois, cette baisse en volume des dépenses publiques en 2018 résulte également de mesures d’économies : réduction du nombre d’emplois aidés, report de la réforme des grilles salariales de la fonction publique et gel de la valeur du point, réduction des aides au logement… Sous la contrainte de la baisse des dotations de l’Etat, de 2014 à 2017, puis de leur gel en 2018 en contrepartie d’un engagement de modération de leurs dépenses de fonctionnement, les administrations publiques locales ont nettement réduit ces dernières (-0,7 % en volume).
La réalisation des objectifs de croissance des dépenses publiques en 2019 et 2020 n’est pas pour autant acquise, même si la baisse de la charge d’intérêt de la dette y contribuera certainement. Les mesures d’économies (réforme de l’indemnisation du chômage, revalorisation des prestations sociales de seulement 0,3 % sauf pour les retraités modestes…) sont limitées au regard des dépenses nouvelles (hausse de la prime d’activité, augmentation du budget militaire, plan de lutte contre la pauvreté…). Les objectifs de dépenses d’Assurance maladie deviennent plus difficiles à tenir. Le quasi-abandon des suppressions de postes dans les services de l’Etat laisse craindre une forte hausse de la masse salariale, notamment lorsqu’il s’agira de dégeler le point de la fonction publique. Plus particulièrement, le Haut Conseil des Finances Publiques (HCFP) a relevé que les dépenses d’investissement des collectivités locales semblent repartir fortement à la hausse en 2019, à la veille des élections municipales, et que les versements à l’Union européenne paraissent sous-estimés dans le budget de 2020.
Si le Gouvernement atteint néanmoins ses objectifs de maîtrise des dépenses publiques, celles-ci diminueront dès lors en pourcentage du PIB, de 54,4 % en 2018 à 53,4 % en 2020 (hors crédits d’impôt).
Le Gouvernement a engagé des réformes structurelles des services publics, souvent recommandées par le comité "Action Publique 2022", qui permettront de réaliser des gains de productivité : adaptation du statut de la fonction publique, plan stratégique "Ma Santé 2022", assouplissement du contrôle budgétaire… Toutefois, les économies qui en résulteront ne seront constatées qu’à moyen ou long terme, et resteront insuffisantes si les missions assignées aux administrations publiques ne sont pas revues à la baisse.
La réduction de la dette publique reste nécessaire malgré des taux d’intérêt négatifs
Les économistes considèrent généralement que la dette publique doit pouvoir être stabilisée en pourcentage du PIB pour éviter une crise des finances publiques dont les conséquences sont toujours très dures pour la population, qui subit alors des mesures de redressement drastiques imposées de l’extérieur. Mais il est impossible de déterminer le seuil d’endettement au-delà duquel une crise survient et le niveau auquel il faut pouvoir stabiliser la dette, car ils dépendent de multiples facteurs qui ne sont pas toujours quantifiables, comme la crédibilité de la politique économique menée par les gouvernements.
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