Il faut donc laisser jouer les stabilisateurs automatiques, sans contrainte, et ne pas hésiter à dépenser pour mettre en œuvre une politique active de prévention, de confinement et de soins. Les autorités italiennes en ont d’ailleurs déjà fait la demande à la Commission européenne, et elles ont raison. Ensuite, les fermetures d’entreprises, même temporaires, peuvent rapidement conduire à la faillite, déclenchant un cercle vicieux par la dégradation du bilan des banques. Si les banques centrales ne peuvent pas produire de médicaments, il leur revient d’assurer que la liquidité ne vienne pas à manquer, tandis que les autorités de contrôle des banques peuvent autoriser temporairement une augmentation du risque dans les bilans bancaires. Que les États viennent au secours des entreprises mises en difficulté par leurs liens commerciaux avec la Chine ou en conséquence de mesures locales, par des facilités de crédit par exemple, est également justifié, puisque des faillites causées par un choc externe et non pas par un manque de compétitivité, endommageraient durablement le potentiel économique du pays. C’est la voie que l’Allemagne a décidé d’emprunter. Il faut néanmoins anticiper que les mesures de soutien de l’offre de ce type peuvent également des conséquences indésirables à long terme, si, par exemple, elles permettent à des entreprises non rentables de rester à flot. Dans toute mesure générale, aussi justifiée soit-elle, il y a des effets d’aubaine, mais ce n’est pas une raison pour ne pas les entreprendre.
Faut-il craindre qu’un krach financier vienne s’ajouter aux dégâts de l’épidémie ?
Jusqu’au 24 février, les marchés financiers mondiaux n’avaient pas réagi significativement aux nouvelles venant de Chine. Implicitement, les investisseurs considéraient que, tant que l’épidémie restait essentiellement une affaire chinoise, l’économie mondiale ne serait pas trop affectée, et que les banques centrales viendraient de toutes façons à la rescousse, à commencer par le Réserve Fédérale américaine, ce que les marchés à terme de taux avaient commencé à intégrer. La spectaculaire augmentation du nombre de cas en Italie, et surtout le communiqué du CDC indiquant que l’épidémie allait selon toute probabilité se muer en pandémie et toucher les États-Unis changea radicalement la situation. Depuis, les marchés boursiers ont perdu entre 10 % (CAC 40) et 15 % (DAX 30), le marché américain (S&P 500) perdant quant à lui 12 %. Correction sévère, certes, mais sans signes de panique pour autant : les volumes de transactions ont augmenté, mais raisonnablement. En réalité, et jusqu’à présent, les marchés financiers suivent le flux de nouvelles, réagissant à l’inattendu (l’Italie) plutôt qu’à des scénarios noirs. Ainsi, alors que les obligations souveraines considérées comme des valeurs refuge prenaient de la valeur - le rendement à dix ans des obligations de l’État fédéral allemand a baissé d’environ 0,25 point de pourcentage, celles de la République italienne augmentaient de la même valeur.
Les marchés semblent avoir intégré une sorte de scénario moyen, où les profits des entreprises baisseraient significativement en 2020, par rapport aux prévisions précédentes du moins, avant de se reprendre en 2021, sans que l’économie mondiale ne soit prise dans une spirale descendante incontrôlée. D’une certaine façon, les marchés comptent sur une intervention des autorités pour limiter la casse en assouplissant momentanément les règles de crédit, comme on l’évoquait plus haut.
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