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Impôt européen : le gouvernement français se trompe de cible

Analyses - 18 Août 2010

Pourquoi les réactions négatives de l’Allemagne, du Royaume-Uni et de la France face aux propositions de la Commission sont mal fondées

En pleine période estivale, le projet d’instituer un impôt versé directement au budget communautaire a été avancé par le commissaire européen au Budget, Janusz Lewandowski. En moins de vingt-quatre heures, Londres, Berlin et Paris faisaient valoir leur opposition, au nom du respect de la compétence des parlements nationaux, de l’allègement de la pression fiscale et d’une meilleure maîtrise de la dépense publique.

Aucun de ces arguments ne tient vraiment.

Le premier, surtout brandi par les Britanniques, occulte le fait que l’impôt européen existe dans les faits. Mais il est caché dans les arcanes de documents budgétaires accessibles aux seuls initiés. Il représente, pour la France, plus de 19 milliards d’euros, essentiellement "attribués" au budget des Affaires étrangères. Le transit de bon nombre de ces ressources (par exemple, la "ressource TVA") par les budgets nationaux, avant d’alimenter le budget européen, est une fiction bureaucratique qui pourrait être avantageusement remplacée par leur versement direct dans les caisses de l’Union européenne. On y gagnerait en termes de responsabilisation des élus et de sensibilisation des citoyens, donc de maîtrise des dépenses, puisque chaque contribuable identifierait clairement le coût que représente l’Europe.

Dans son Rapport d’octobre 2003 Vers un impôt européen ?, l’Institut Montaigne appelait de ses vœux un tel effort de transparence, donc de démocratie. Il préconisait une solution où l’impôt européen serait en réalité composé de plusieurs types de prélèvements : un pourcentage, plafonné, de la TVA collectée par les Etats, ainsi que certaines accises, notamment les taxes sur l’énergie, auxquelles on pourrait utilement ajouter, aujourd’hui, la taxe sur les émissions de carbone. Non seulement ces impôts avaient été choisis en raison de leur rendement, mais aussi parce qu’ils pouvaient être les vecteurs d’une vraie politique européenne de l’énergie et de l’environnement.

D’aucuns pourraient s’émouvoir de voir accorder aux parlementaires européens un pouvoir de décision sur de telles recettes. Mais il n’y a pas de raisons de penser que les parlementaires européens seront moins rigoureux que les parlementaires nationaux. Au demeurant, une période d’apprentissage de la "démocratie fiscale" par les institutions communautaires pourrait être prévue, imposant un plafond de recettes, voire des ratios à respecter entre ces différentes impositions.

En conclusion, par leurs réactions négatives, les trois plus importants pays européens se trompent de cible. Ils confondent contrôle du niveau des dépenses et choix des modes de prélèvement. Un peu comme si, en France, on refusait toute autonomie fiscale aux communes, sous prétexte d’un risque de mauvais usage. Par ce blocage qui semble insuffisamment réfléchi, on empêche l’émergence d’initiatives nouvelles, telles une politique européenne de l’énergie mieux coordonnée ou une harmonisation des bases de certaines impositions (accises, impôt sur les sociétés, par exemple). En lieu et place d’une telle réaction épidermique, quasiment idéologique, on attend désormais une vraie réflexion, technique, économique et politique.

 

  • Commentaires
    Commentaires
    mer 18/08/2010 - 17:51 Par Teo Toriatte

    Je n'ai pas le moindre doute sur l'avancée significative que serait un véritable impôt européen.

    Mais les décisions, les propositions doivent être annoncées au bon moment.

    Au moment ou les gens voient leur niveau de vie se dégrader,
    Ou ils voient que l'avenir de leurs enfants de leur petits enfants sera plus sombre que le leur au même age,
    Ou ils ont le sentiment que les institutions européennes, non seulement ne les ont pas aidé mais ont favorisés cette crise,
    Ou, ils comprennent que pour les même montants (taux ) d’impositions, les services publics rendus vont être moindres,

    On leur annonce comme une super idée la création d’un impôt européen. Ils ne le prennent pas bien et c’est compréhensible.

    Quand à la réaction des politiques, c’est tout simplement d’être collé le plus possible au ressenti populaire. En ces temps ou la confiance en les dirigeants est au plus faible, il serait presque suicidaire d’aller contre l’opinion publique sur un sujet tel que celui là.


    mer 25/08/2010 - 20:08 Par Monrdhil

    L'acceptation (ou non) de la mesure est aussi la conséquence de l'ensemble des politiques de communication et des communications des politiques sur le sujet ...

    La classe politique française a toujours dénigré le rôle de l'Europe. Maintenant, ils ne peuvent avoir le discourt inverse.
    Parallèlement, les fonctionnaires sont responsables de tous les maux (ils sont en particulier trop nombreux), alors comment expliquer qu'il va y avoir encore moins d'infirmières à l'hopital et de policiers dans les rues ?


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