La mort de Mahsa Amini a à la fois généralisé et radicalisé le mouvement, car en brûlant leur voile les femmes ont transformé leur désobéissance civile en un mouvement révolutionnaire contre la théocratie et pour "La femme, la vie et la liberté." Et les hommes qui les avaient regardées indifférents au début, puis avec sympathie en 2017, les ont rejoint en 2022 et les ont soutenues.
Quelle place pour la question kurde dans la révolte ?
Pendant de nombreuses années, le régime a fait peur aux Iraniens en prétendant que les Kurdes étaient des séparatistes. Ils ont ainsi réussi à désolidariser les Iraniens de leurs compatriotes Kurdes. On peut faire l’analogie avec les femmes, qui subissent une double discrimination par un régime manipulateur. Mais pour la première fois, la solidarité a déjoué cette ruse du régime, les Kurdes ne cessent de revendiquer leur identité de Kurdes iraniens ; ils disent qu’ils n’ont aucune volonté de se séparer de l’Iran. On peut éventuellement discuter de fédéralisme, mais plus aucun parti n’évoque le séparatisme. Cela a déjoué la stratégie propagandiste du régime qui tentait de monter la société contre les communautés kurdes. Des manifestations en solidarité avec le Kurdistan se développent partout en Iran. Le slogan le plus répandu dans le mouvement actuel, "Femme vie liberté", est un slogan kurde (qui se traduit par "Jin, Jiyan, Azadî" ; en perse : زن زندگی آزادی).
Le régime est atteint dans le cœur de son idéologie. Au point où en sont les choses, que peut-il faire ? Quel est l'avenir de la contestation ?
J'observe le régime depuis 43 ans. Je pense que sa nature et sa constitution ne permettent aucune réforme. Le guide suprême est désigné par Dieu. Quand Ayatollah Khomeini est arrivé au pouvoir, il a précisé dès le mois de février 1979, que certes il s’était appuyé sur le soutien du peuple pour prendre le pouvoir, mais qu’il tenait sa légitimité de la désignation divine. Il avait clairement mis en garde ceux qui voulaient défier son autorité divine. S’opposer à lui était, avait-il affirmé, s’opposer à Dieu, un crime passible d’un sévère châtiment. Une autorité qui émane de Dieu ne se soumet pas à la volonté du peuple.
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