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03/10/2008

Grenelle de la Presse : comment sauver le journalisme papier

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 Philippe Manière
Auteur
Président-fondateur de Footprint > consultants

Nicolas Sarkozy a donné hier matin le coup d'envoi des états généraux de la presse, un « Grenelle » qui s’étendra sur 2 mois. Il tentera de répondre à cette question : peut-on trouver des solutions pour sauver la presse écrite ?

Vraisemblablement, le Gouvernement semble persuadé qu’un tel sauvetage est possible, puisqu’il lance ce grand brainstorming. Pour la première fois depuis longtemps une vraie réflexion sera menée sur ce sujet, et nous nous en réjouissons.

Un sujet qui nous est cher
A l’Institut Montaigne, nous n’avons pas attendu ces états généraux pour nous intéresser à la question. Dès août 2006, nous avons publié un rapport sur ce thème. Nous sommes en effet convaincus que la presse écrite, son indépendance et son dynamisme, participe activement à l’affermissement de notre démocratie. Or, aujourd’hui, presque tous les quotidiens nationaux connaissent d’importantes difficultés.

Subventions et indépendance
Pourtant, la presse française est sûrement la plus aidée au monde, avec plus de 2 milliards d’euros versés tous les ans. Nos journaux perçoivent des aides indirectes (tarifs postaux, etc.) mais aussi des subventions directes et massives, ce qui est un phénomène assez unique en son genre. Partout ailleurs, on considèrerait cela comme une sorte d’ingérence de l’Etat.

Des aides qui n’aident pas… à la créativité
Toutefois, ces subventions ne semblent pas aider réellement les éditeurs de presse : leurs budgets étant bouclés quoi qu’il arrive, ils n’innovent que trop peu. Ainsi sont-ils à la traîne sur Internet, et n’impriment-ils presque pas à l’étranger, même dans les villes où résident des centaines de milliers de Français, comme à Londres. Ils se limitent éternellement à la distribution en kiosque quand le New York Times est, par exemple, distribué dans tous les Starbuck cafés aux Etats-Unis

Aide-toi, le ciel t’aidera
Pour autant, soyons raisonnables, je ne préconise pas l’arrêt immédiat des distributions de fonds publics. Je sais que cela aurait pour conséquence la mort de notre presse, ce que je souhaite moins que tout. Ces aides ne pourront être supprimées que lorsque les journaux auront retrouvé un modèle économique. Mais en attendant, il me paraît impératif qu’elles soient conditionnées. En d’autres termes, il faut financer des plans de remise à plat de leur outil industriel, des plans de développement, etc. – mais cesser de verser cet argent sans contrepartie.

Moderniser et simplifier
Il faudrait également alléger une partie des contraintes subies par les journaux. Des règles rigides empêchent la presse d’innover – j’évoque ici notamment le bureau de placement du livre CGT qui jouit d’un monopole d’embauche totalement illégal, je pense aussi à toutes les lois héritées de la Libération en matière de distribution de la presse quotidienne qui me paraissent dépassées.

Un seul à la fois !
Enfin, les règles anti-concentration doivent également être revues : aujourd’hui, il existe ce qu’on appelle la règle « deux sur trois ». Pour résumer, tout groupe de presse doit choisir entre télévision, radio et presse écrite. Il peut être présent dans deux secteurs, mais pas davantage. Or, la presse écrite est forcément moins rentable, et, par conséquent, les groupes solides ne veulent généralement pas éditer de quotidien… La diversité est nécessaire, c’est évident, et tous les journaux ne doivent pas appartenir au même groupe. Mais chaque journal devrait pouvoir avoir un actionnariat puissant et présent dans la télé ou la radio. Et pour ce faire, une solution très simple existe : une loi imposant aux groupes de ne posséder qu’un seul quotidien gratuit et un seul quotidien payant.

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