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04/07/2012

Sommet de la Zone euro – les défis de la compétitivité économique demeurent

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Sommet de la Zone euro – les défis de la compétitivité économique demeurent
 Iana Dreyer
Auteur
Chercheuse associée à l’Institut Montaigne


Les sommets conjoints du Conseil européen et de la zone euro du 28 et 29 juin derniers ont jeté les bases d’une intégration économique et politique plus poussée en Europe. Mais le défi de la compétitivité des Etats-membres reste la première des priorités pour éviter qu’à l’avenir une nouvelle crise financière et politique n’éclate.

Trois décisions clés pour l’Union économique et monétaire
Vendredi dernier, les Etats membres de l’Union européenne ont endossé l’idée d’une "véritable Union économique et monétaire" incluant : "un cadre financier intégré, un cadre budgétaire intégré, un cadre de politique économique intégré et un renforcement de la légitimité démocratique". Les modalités précises de cette Union seront précisées d’ici la fin 2012 (cf. Conclusions du Conseil européen).

Ensuite, un pas vers une "union bancaire" a été réalisé. La "Déclaration du sommet de la zone euro" introduit le principe d’un "mécanisme de surveillance unique" de l’ensemble des banques de la zone euro. De plus, le Mécanisme Européen de Stabilité, instrument créé en 2011 pour venir en aide aux Etats en difficulté, se voit doté de "la possibilité de recapitaliser directement les banques" et permet, en attendant, à l’Espagne de recapitaliser ses établissements financiers.

Enfin, les Etats européens ont adopté un "Pacte pour la croissance et pour l’emploi" qui prévoit : "l’assainissement budgétaire différencié, axé sur la croissance, qui respecte le pacte de stabilité et de croissance" ; la lutte contre le chômage et l’approfondissement du marché unique ; un paquet de 120 milliards d’euros dédié à des projets économiques concrets -- incluant l’augmentation en capital de la Banque européenne d’investissement ; l’émission d’obligations liées à des projets ainsi que la mobilisation de 55 milliards d’euros de fonds européens actuellement en sommeil.

Vers un nouvel équilibre politique favorisant une vision commune ?
Les marchés financiers ont réagi positivement à l’annonce de décisions qui sont le fruit d’un équilibre politique nouveau. En effet, contrairement aux sommets précédents dominés par le tandem franco-allemand, on a assisté à une action coordonnée des institutions communautaires – notamment de la Commission et de la Banque centrale européenne, ainsi qu’à une mobilisation conjointe de la France, de l’Italie et de l’Espagne pour convaincre l’Allemagne d’accepter, par exemple, d’engager l’argent de ses contribuables au profit de banques et Etats périphériques. Le Pacte pour la croissance et pour l’emploi est une avancée symbolique forte qui répond au souhait des populations européennes de se voir offrir de nouvelles perspectives de croissance.

Les écarts de compétitivité et les divisions politiques restent d’actualité
Mais rien n’est encore gagné. L’endettement excessif des États et la faible compétitivité des économies restent les causes premières de la crise actuelle. Le sommet n’a pas effacé la fracture entre les pays entrés dans la crise avec des niveaux de dette maîtrisés et des économies compétitives et ceux dont la compétitivité est en déclin.

Classée comme la sixième économie la plus compétitive au monde par le Forum économique mondial, l’Allemagne a, dès 2009, mis en place une politique de rigueur budgétaire afin de stabiliser son niveau d’endettement (81,5 % de son PIB en 2011). Les Pays-Bas sont la septième économie la plus compétitive, avec un niveau d’endettement de 66,2 % du PIB et la Finlande se place au 4ème rang avec une dette publique de 48,4 %.
En face, on trouve l’Italie, au 43ème au rang, l’Espagne (36ème), le Portugal (45ème), la Grèce (90ème). La dette publique de l’Italie s’élève à 120 % de son PIB, celle de la Grèce à 160 %, celle du Portugal à 106,8 %. L’endettement de l’Espagne risque de passer de 68 % de son PIB en 2011 à près de 80 % fin 2012.

Dans ce cadre, on note sans surprise l’absence de toute référence lors du dernier sommet à une mutualisation de la dette sous la forme d’Eurobonds, demandée par de nombreux Etats membres. L’Allemagne, comme la Finlande et les Pays Bas, y sont opposés.

Les tensions entre pays membres de la zone euro vont donc persister, surtout si les réformes structurelles et la consolidation des finances publiques dans le Sud de l’Europe venaient à ralentir.

La France, principal partenaire économique et politique de l’Allemagne en Europe, avec laquelle l’écart de compétitivité s’est creusé au cours des la dernière décennie, envoie des signaux contradictoires : l’annonce de mesures de réduction des dépenses de l’Etat répond à l’exigence affichée au sommet d’ "assainissement différencié des finances publiques". De même, la volonté affichée de ratifier le Pacte de stabilité de 2011 rassure nos partenaires. En revanche, des mesures comme le retour partiel à la retraite à 60 ans, ont été perçues comme un pas en arrière et ont alimenté le scepticisme dans le débat public outre-Rhin sur l’intérêt d’aider les autres pays européens (dont ici un exemple, en allemand).

La France doit donc clarifier sa politique pour faire avancer la solidarité européenne. A cet égard, deux réformes nous semblent fondamentales et urgentes :
- une action significative en vue d’améliorer la compétitivité-coûts de notre économie - l’Institut Montaigne dans son rapport Une fiscalité au service de la "social compétitivité" (mars 2012) propose un basculement de 50 Mds€ des charges pesant sur la production vers un impôt à assiette large comme la TVA ou la CSG ;
- une réforme ambitieuse de son système de retraite. Pour garantir la pérennité de notre système de retraite par répartition, mais aussi pour le rendre plus compréhensible et plus équitable, une réforme structurelle, plutôt que paramétrique, est indispensable. En vue du débat public sur la réforme du système des retraites qui doit être lancé en 2013, l’Institut Montaigne propose, dans sa note Réformer les retraites : pourquoi et comment (juin 2010) de mettre en place un régime national de retraite par répartition unique, à la carte, et à cotisations définies.

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