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18/12/2012

Construction de l’architecture financière européenne : quel bilan en 2012 ?

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 Iana Dreyer
Auteur
Chercheuse associée à l’Institut Montaigne



2012 aura marqué un tournant dans la gestion de la crise de la zone euro et permis la mise en place d’une réelle architecture financière à l’échelle européenne. Nécessairement lentes, ces réformes devront rester prioritaires en 2013 et ne pas s’arrêter en chemin.

Mettant fin à une gestion de crise des dettes souveraines de la zone euro par les Etats membres jugée trop réactive jusque-là, le sommet de l’Union européenne de juin dernier a changé la donne. Face à la pression des marchés et à la détresse financière et économique des Etats de la périphérie du Sud de l’Europe, ce sommet a jeté les bases d’une nouvelle architecture financière et monétaire, dont le maître-mot a été l’ "union bancaire", impliquant une supervision bancaire commune, un système de lois et de règles harmonisé, un mécanisme européen de résolution pour les banques en faillite et un système harmonisé de garantie des dépôts. Cette annonce a été suivie, durant l’été, par les déclarations de Mario Draghi, président de la Banque centrale européenne (BCE). Selon lui, cette institution fait son possible pour sauver l’union monétaire et serait disposée à financer indirectement de la dette publique d’Etats soumis à une crise de leur dette souveraine, à condition d’accepter en échange de suivre un programme de réformes économiques.

Où en sont ces projets actuellement ?

Depuis le sommet européen de jeudi et vendredi derniers, le principe est acté : c’est la Banque centrale européenne (BCE) qui aura la responsabilité de la supervision des banques en Europe. A partir de mars 2014, cette institution supervisera directement les banques disposant d’actifs de plus de 30 milliards d’euros ou dépassant 20 % du PIB de leur pays, ou bien ayant des activités dans au moins deux pays de la zone euro. La BCE, au sein de laquelle les activités de politique monétaire et de supervision bancaire seront séparées, collaborera avec les régulateurs nationaux. Les Etats de l’Union européenne non membres de la zone euro pourront être associés au mécanisme de supervision bancaire de manière volontaire. L’Autorité Bancaire Européenne, établie en 2010, sera également réformée pour l’adapter au nouveau contexte.

Cependant, la division concrète des tâches entre la BCE et les autorités nationales concernant les banques de moindre taille reste encore à négocier. On peut aussi déplorer que les dirigeants européens n’aient pu avancer sur la question du mécanisme de résolution des banques (c’est-à-dire d’organisation raisonnée de leur faillite si cela arrivait) et du mécanisme de garantie des dépôts. Néanmoins, le sommet a appelé à des propositions de Directives à ce sujet pour 2013. En termes de nouvelles règles, le sommet a appelé à la finalisation des projets en cours de Directives européennes sur la capitalisation des banques.

Pour l’Institut Montaigne, qui vient de publier un rapport formulant vingt propositions pour concilier régulation financière et croissance économique, les avancées européennes de 2012 vont dans le bon sens. Il est en effet nécessaire de penser la régulation financière et la régulation bancaire à l’échelle européenne. Si les projets actuels de Directives européennes sur la capitalisation des banques, basées sur les recommandations du Comité de Bâle, tardent à se matérialiser, c’est parce que la question des ratios de liquidité - c’est-à-dire le taux d’actifs vendables très rapidement (dépôts bancaires à vue, dette souveraine…) par les banques en cas de crise - est en débat. Le rapport de l’Institut Montaigne appelle en effet à reporter sine die l’introduction des ratios tels qu’ils sont actuellement définis et à reprendre les travaux sur ce sujet de façon approfondie. Ces derniers risquent en effet d’inciter les banques à détenir moins d’actifs de long terme, ce qui pourrait être nocif pour le financement de l’économie.

Si les récents développements européens sur la régulation et la supervision bancaire sont bienvenus, sans mécanisme solide de résolution des banques européennes et sans dispositif européen de garantie des dépôts, l’union bancaire restera bancale. Cependant, sans accord sur une union renforcée en matière budgétaire dans la zone euro, impliquant des transferts financiers entre Etats, il sera difficile de faire aboutir ces dossiers. En 2012, les annonces de changements institutionnels d’envergure ont permis une véritable accalmie des marchés financiers et ont évité une intervention massive de la banque centrale sur les marchés de la dette souveraine. Mais cette accalmie pourrait s’avérer temporaire et fragile si toutes les questions encore non résolues ne sont pas abordées frontalement l’année prochaine.

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