2. L’accord de l’Eurogroupe est bon, mais il ne pare qu’au plus pressé
Même en cas de crise gravissime, la règle de la zone euro est le compromis. Celui du 9 avril est plutôt bon : les eurobonds, qui auraient pu être introduits sous la forme de coronabonds, ont été écartés – les pays épargnants ayant de bonnes raisons de s’en méfier – et l’Italie a finalement accepté la possibilité d’un recours au Mécanisme Européen de Solidarité, grâce à une conditionnalité très allégée. Ce faisant, elle s’est placée potentiellement sous le parapluie nucléaire des "transactions monétaires directes" (OMTs) inventées par la BCE en 2011.
L’idée d’une mutualisation partielle des assurances chômage des pays de la zone euro (y compris sous forme de réassurance, comme proposé par l’économiste belge Daniel Gros) a pris forme avec le programme SURE. Enfin, la BEI, d’ordinaire d’une prudence extrême, s’est mise en ordre de bataille. Au total, 540 milliards d’euros sont mobilisés, soit 4,5 % du PIB. C’est considérable, mais ne représentera qu’une fraction des déficits budgétaires cumulés pour 2020 et 2021, estimés par le FMI à 11 points de PIB, soit 1 300 milliards d’euros, une estimation que je trouve pour ma part conservatrice.
Avec ce plan et le soutien de la BCE, les pays de la zone euro pourront faire face à la crise, dans le scénario le moins mauvais. Dans le cas du scénario noir, ce sera insuffisant.
En réalité, il y a une forte endogénéité dans cette dynamique : la conception même des plans sanitaires de sortie de confinement, et l’adéquation des plans de soutien nationaux et européens feront pencher la balance d’un côté ou de l’autre.
N’ayant aucune qualification pour parler des plans sanitaires, je me contenterai de dire un mot des plans de réponse économique nationaux, qui vaudra également au niveau européen.
Protéger l’offre, avant tout les PME, et préserver l’emploi, ont été les fils directeurs des dispositions gouvernementales en France et dans tous les pays de l’UE, ce qui montre que les gouvernements ont bien compris la nature du choc, un choc d’offre à l’origine, qu’il faut empêcher de déchirer le tissu économique en attendant que l’épidémie s’atténue. Mais il est temps de penser à l’étape suivante, la reprise.
Un principe général : soutenir la demande, mais ne pas oublier l’offre
En raison de l’incertitude créée par la crise, les acteurs économiques ne pouvant s’inspirer d’aucun repère tiré du passé, il y a un fort risque de comportement excessivement prudent des entreprises et des ménages, en matière d’investissement pour les premières, et de consommation de biens durables pour les seconds.
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