Tandis que Viktor Orban constatait l’inefficacité de la réponse de l’Europe au Covid-19, il fut semble-t-il surpris par la rapidité de la réponse européenne. Réaction prudente au lendemain du vote de la loi donnant les pleins pouvoirs à Orban de la part d’Ursula von der Leyen qui, le 31 mars, rappelait le souci de préserver les droits fondamentaux et les valeurs démocratiques sans toutefois mentionner la Hongrie. Le président du Parlement européen, Davide Sassoli, demandait le lendemain que la Commission évalue si la nouvelle loi hongroise était compatible avec l’article 2 du Traité de l’Union avant d’ajouter : "Pour nous, les parlements doivent rester ouverts et la presse doit rester libre. Personne ne peut s’autoriser à utiliser la pandémie pour saper nos libertés".
La réponse européenne à la crise du Covid-19 a révélé la persistance d’une division Nord-Sud apparue au lendemain de la crise financière il y a plus d’une décennie. Les réactions politiques des pays membres ont plutôt révélé une différence Est–Ouest. La déclaration des ministres des Affaires étrangères a rallié 16 pays et exprime bien que "les mesures d’urgence doivent être limitées au strict nécessaire, proportionnées et limitées dans les temps". Elle ne mentionne pas non plus la Hongrie, mais personne ne s’y est trompé. À commencer par les pays du Groupe de Visegrad qui, comme pour l’usage de l’article 7 par la Commission, n’ont pas signé, réticents à sanctionner Orban car craignant qu’un jour eux-mêmes puissent être pointés du doigt.
C’est finalement au PPE que se décide véritablement le sort de la "question hongroise" pour l’Europe. Le Fidesz en a été suspendu l’an dernier, et malgré le nouveau pas franchi par Orban dans sa dérive autoritaire, le PPE reste divisé entre les adeptes de la suspension et ceux de l’expulsion. Manfred Weber, qui dirige le groupe au Parlement européen, semble rester sur sa position de longue date de protecteur indulgent du leader hongrois. Treize partis membres du PPE (Nordiques, Benelux, Grèce et la Plateforme civique polonaise à l’initiative de Donald Tusk) ont demandé l’expulsion du Fidesz. À l’inverse, la CDU/CSU ainsi que Les Républicains en France pensent qu’il est urgent d’attendre. Orban a beau jeu de répondre à la direction du PPE : "Votre discussion, en pleine pandémie, est un luxe que je ne peux me permettre". Orban s’est arrogé les pleins pouvoirs persuadé que, dans l’urgence sanitaire, les Européens regarderaient ailleurs, sans voir que la démocratie hongroise au temps du Covid-19 a été placée sous respirateur.
Copyright : FERENC ISZA / AFP
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