Et l’on ne saurait s’en plaindre : le renchérissement du prix des ressources fossiles est l’incitation la plus puissante à s’en écarter ; l’augmentation du prix relatif de l’énergie elle-même est un aiguillon poussant à réduire l’intensité énergétique de nos économies, comme on le constate depuis plus de vingt ans. Sans en être une condition suffisante, l’augmentation des prix de l’énergie est nécessaire à la décarbonation de nos économies - l’autre volet étant les investissements en infrastructures et le financement de la recherche et de l’innovation.
Le "chèque énergie", c’est bien mieux qu’une taxe flottante…
Le traumatisme du mouvement des gilets jaunes a rendu les décideurs allergiques aux augmentations des prix de l’énergie. Comme, cette fois, il ne s’agit pas seulement des carburants liquides mais aussi du gaz de chauffage et de l’électricité, chacun a répondu dans l’urgence. Pour sa part, le gouvernement Castex a opté pour un encadrement du prix de l’électricité et une augmentation de 100 € du chèque énergie payable en décembre aux ménages dont le revenu annuel n’excède pas un certain seuil. Pour une famille de trois personnes (1,8 unités de consommation) ayant un revenu annuel inférieur à 10 080 €, le chèque devrait s’élever à 377 €, soit une augmentation de 3,7 % du revenu.
À son crédit, le gouvernement a résisté au chœur des sirènes appelant à compenser l’augmentation du prix du gaz ou de l’essence par une baisse des taxes, modulation parfois appelée "taxe flottante"
Cette idée est en réalité contre-productive, car elle revient à transférer des recettes du budget de la nation vers les comptes des fournisseurs, Gazprom ou Saudi Aramco. Imaginons en effet que tous les pays importateurs réagissent à une hausse des prix en baissant leurs taxes sur les combustibles. Ce faisant, ils augmenteraient la demande et les producteurs pourraient revenir au même équilibre de marché en augmentant leurs prix, empochant ainsi une rente supplémentaire. Comme quoi une idée apparemment de bon sens peut totalement se retourner contre son intention première.
"L’homme veut avoir bien chaud, tous les jours", chantaient les révolutionnaires allemands
L’augmentation du prix de l’énergie peut faire éclater le budget des ménages aux revenus les plus bas et, comme, les révolutionnaires allemands le chantaient en 1934 :
L’homme veut avoir des bottes, oui
Il veut avoir bien chaud tous les jours
dans le "Front des travailleurs", dont les paroles étaient de Bertold Brecht. Lors d’un pic extrême de prix de l’énergie, le chèque énergie leur répond de façon adéquate. Mais, comme son nom l’indique, il ne peut être utilisé que pour payer les factures d’énergie ou de rénovation énergétique. Il vise donc à effacer la hausse du prix de l’énergie, réduisant de ce fait l’incitation à réduire sa consommation d’énergie.
Ajouter un commentaire