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19/07/2010

La révolution Obama prend forme

 François Rachline
Auteur
Directeur général de l'Institut Montaigne de 2009 à 2010

Nous l’avions déjà souligné ici, le discours de janvier 2010 du président Obama marquait un tournant majeur de la politique américaine en matière de régulation financière. Le tout récent vote du Congrès confirme la tendance en adoptant plusieurs types de mesures, tout à la fois destinées aux consommateurs et aux établissements financiers.

Parmi les plus importantes : limitation pour les banques des opérations de marché sur fonds propres, encadrement de la titrisation (transformation de créances en titres échangeables), contrôle des opérations touchant aux produits dérivés. Ces trois décisions vont dans le sens de ce que préconisait l’Institut Montaigne dans sa Note de mars 2009 : Reconstruire la finance pour relancer l'économie.

Quelle est la logique à l’œuvre ? Celle de la meilleure organisation possible de l’économie de marché. Cela suppose tout à la fois une affirmation de la liberté de mouvement et un contrôle régulier pour éviter les dérapages. Sur les autoroutes, cela correspond à une limitation de vitesse. Le but n’est pas d’éliminer les voitures mais de diminuer les accidents. Idem pour les banques : il ne s’agit pas d’entraver leur action mais précisément d’éviter qu’une nouvelle crise majeure ne les condamne à des réglementations bien plus restrictives. De même pour les transactions sur les produits dérivés. Jusque là, celles-ci échappaient à tout recensement. C’était notamment le cas pour des produits sophistiqués comme les Credit default swaps (CDS), ces assurances contre des défauts de paiement qui font l’objet d’échanges dits Over the counter (OTC), c’est-à-dire non répertoriés officiellement, soustraits jusqu’à maintenant à toute supervision. C’était d’ailleurs aussi le cas des fameux subprimes

Sans le dire, les Etats-Unis redécouvrent – et c’est tant mieux – qu’un marché n’est ni un don de la nature ni un bienfait divin, mais une création humaine. Qu’il n’est pas possible d’appeler « marché » n’importe quel arrangement passager pris entre deux protagonistes. Que la construction d’un marché digne de ce nom prend du temps (voyez le « marché unique » européen), que cela suppose des normes, des pratiques, des institutions qui garantissent son bon fonctionnement. Que cela exige donc une action soutenue du pouvoir. Que le marché ne s’oppose pas à l’Etat, puisqu’il en est l’enfant, certes parfois turbulent et pas toujours très obéissant, mais en fin de compte subordonné. Qu’enfin la crise que nous traversons toujours ne provient donc pas d’un excès du marché, mais d’un manque d’économie de marché.

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