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02/09/2008

Réforme de l'ISF : injustes couacs

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 Philippe Manière
Auteur
Président-fondateur de Footprint > consultants

Cette semaine, Christine Lagarde annonçait dans la Tribune une réforme de l’ISF. Une information importante très vite été démentie par François Fillon. Le Gouvernement ne souhaite, apparemment, pas rouvrir le dossier…

1er septembre, 1er couac de rentrée ? Cet « aller-retour » a quelque chose d’un peu troublant, à vrai dire. Mais ce n’est pas le premier en son genre. La semaine dernière, déjà, le financement du RSA a provoqué quelques grincements de dents. Sans compter le bras de fer entre Jean-Louis Borloo et Bercy sur le financement du bonus malus qui a animé l’été… Visiblement, dans la majorité et même au sein du Gouvernement, on a un peu de mal à se mettre d’accord sur les questions fiscales.

La raison de ces dissonances Cela dit, soyons honnête, ces désaccords peuvent se comprendre.

- D’abord parce que le budget est très, très tendu cette année, et la révision en forte baisse de nos prévisions de croissance n’arrange évidemment rien ;

- Ensuite, parce que les questions fiscales, chez nous, sont toujours très passionnelles et fortement teintées d’idéologie.

Un impôt politique Tout cela est exacerbé dès lors qu’il s’agit d’ISF, un impôt créé en 1982 dans un contexte de « revanche sociale », (il s’appelait d’ailleurs l’impôt sur les GRANDES fortunes, IGF…). Il a ensuite été aboli, puis rétabli. Tant dans son inspiration que dans sa conception, il s’agit davantage d’un impôt « politique » que d’un impôt frappé sous le coin de la rationalité économique !

Abolir comme ailleurs Si l’on regarde l’ISF à tête reposée, sans a priori, en mettant en balance ses avantages et ses inconvénients, difficile de ne pas être tenté par sa suppression pure et simple. C’est d’ailleurs ce qu’ont fait pratiquement tous les pays européens qui en avaient un. C’est le cas de la Suède, temple de la sociale-démocratie, ou encore de l’Espagne du Premier ministre socialiste Zapatero.

Une juste abolition

Abolir l’ISF, pourrait-on penser, c’est se priver de 4 milliards d’euros environ. Dure à avaler au moment où le Gouvernement peine à boucler le Budget… C’est en fait tout le contraire. Voici pourquoi :
1) Il faut bien comprendre que tous ceux qui fuient la France pour échapper à l’ISF, paient ailleurs qu’en France leur Impôt sur le Revenu, leurs cotisations sociales, leur TVA. Sans compter qu’ils créent ailleurs des entreprises et des emplois, pour certains. Nous, à l’Institut Montaigne, nous plaidons pour l’abolition de cet impôt absurde, absurde parce qu’il coûte plus que ce qu’il ne rapporte en réalité.

2) Nous avons fait une étude sur ce sujet, il y a quelques mois. Nous avons regardé les sorties de capitaux et les expatriations vers les pays qui taxent peu ou pas le capital. Au final, pour 4 petits milliards de recettes, l’Etat subit chaque année 16 milliards de manque à gagner !

3) Bien sûr, depuis 2007, il y a eu le bouclier fiscal qui va dans le bon sens. Mais il présente aussi beaucoup d’inconvénients. En effet ce bouclier fiscal est complexe et discutable en matière d’égalité et de justice sociale. Mais surtout, il ne fait revenir personne. Tous les spécialistes le disent, il y a peut-être moins d’expatriation, mais il y a extrêmement peu de retour d’expatriés fiscaux…

Il est absurde qu’une grande partie des Français les plus riches engraissent sa Gracieuse majesté britannique ou le Roi des Belges plutôt que notre bon vieux Trésor public. Ceci, n’en déplaise à François Fillon, justifierait vraiment, que l’on remette à l’étude la question de l’ISF pour lui apporter une réponse plus radicale certes, mais surtout plus appropriée …

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