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21/01/2015

Quelles sont les filières qui mènent le plus à l'emploi ? Quelles sont celles à éviter ?

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Quelles sont les filières qui mènent le plus à l'emploi ? Quelles sont celles à éviter ?
 Institut Montaigne
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La plateforme Admission Post-Bac a ouvert le 20 janvier. Elle permet la préinscription des étudiants en 1ère année de licence et coordonne les admissions dans les formations sélectives publiques et privées.
Laurent Bigorgne revient sur la réforme du personnel d'orientation et le développement de l'apprentissage.

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Laurent Bigorgne, le directeur de l’Institut Montaigne, est avec nous. Vous vous êtes intéressé à cette question, notamment une note pour remédier au chômage des jeunes peu qualifiés, parce qu’il y a un vrai problème d’adéquation entre le monde de l’éducation et l’emploi ?

Il y a deux problèmes très bien identifiés en France, quand je dis qu’ils sont bien identifiés c’est aussi que nous avons du mal à y porter remède. Le premier, c’est que nous avons une Éducation nationale qui est essentiellement conçue comme une machine à trier et qui s’intéresse, au fond, uniquement à une élite qu’on emmène vers le baccalauréat d’enseignement général, vers une classe préparatoire, vers l’université. C’est le premier grand problème. Un système fondé sur du tri, du tri permanent.

Et puis vous avez un second problème. La coupure entre toute une partie, pas toute, mais une partie du monde éducatif et le monde du travail et le monde de l’entreprise, une coupure très idéologique
Cette double difficulté, ce sont les élèves et les familles qui la payent au moment de l’orientation.

Vous voulez dire que le personnel de l’orientation connaît mal le monde du travail ?

Le personnel de l’orientation, il faut quand même le savoir, a une formation assez monodisciplinaire qui renvoie à des compétences en psychologie. Je déplore que le personnel de l’orientation aujourd’hui soit trop peu au fait, même si des efforts sont faits, il ne s’agit pas de jeter la pierre. Mais au fond, c’est un personnel qui connaît mal la réalité de l’entreprise.

De ce point de vue, l’Éducation nationale française a raté beaucoup d’opportunités de faire contribuer davantage des petites, des moyennes, des grandes entreprises à une présence dans les établissements, autrement que par les forums de parents d’élèves qui sont organisés. Ça vaut dans les endroits où il y a du travail, mais il y a des endroits où je vous rappelle que les taux de chômage sont très importants, donc ça contribue à ghettoïser, à différencier. Je trouve que le système public comme le système privé s’est trop peu interrogé sur la place au fond des professionnels, et pas seulement une fois par an mais de façon beaucoup plus régulière dans les établissements, tout simplement pour emmener les enfants, et notamment ceux des collégiens et lycéens dont les familles connaissent mal cette réalité.

Si on suit votre logique, de quelle manière peut-on associer les professionnels de l’entreprise au monde enseignant ?


Il y a des manières qui existent déjà de manière empirique dans les territoires et qui consistent à organiser des forums, du temps de présence régulier. Il y aurait une façon très volontaire de le faire, c’est ce qu’on s’apprête à créer, avec beaucoup d’emplois dans l’Éducation nationale. Plutôt que créer systématiquement des emplois titulaires, on avait proposé, à l’Institut Montaigne, de créer des emplois de professeurs associés. Sur des périodes de 3 ans, permettre à des établissements d’aller chercher dans leur tissu économique environnant des professionnels dont la mission sur une partie de leur temps de travail serait d’être associé à certains enseignements. Cela permettrait une modularité, une pluridisciplinarité d’approche. Cela permettrait, des temps de présence, des temps de formation, des temps de meilleure connaissance pour les élèves vis-à-vis d’un certain nombre de métiers, de secteurs. Nous n’avons pas suffisamment cette intelligence de collaboration entre public et privé en France.

Plus de privé au sein du public ?


Vous savez, qui sont les parents d’élèves, qui sont la famille des enseignants. Cette coupure privé/public pour moi elle est factice et idéologique. Ce qui compte d’abord et avant tout, c’est de permettre aux élèves de discuter avec des professionnels qui vont leur donner envie. C’est d’avoir ce qu’on appelle en anglais des master class. Un professionnel vient raconter son métier, son parcours pour donner à des jeunes qui n’ont pas nécessairement en tête les parcours à la fois ce qui est facile ce qui est difficile, de leur donner envie. Les situations, c’est aussi de l’ambition et de l’envie.

Laurent Bigorgne, on parlait de la réforme du personnel de l’orientation. Ne faudrait-il pas aussi supprimer certaines filières qui sont réellement des passages pour le chômage ?


Il y a des filières à l’université qui connaissent à la fois des taux d’échec très élevés et recrutent trop d’élèves. C’est un vrai sujet. Il faut vraiment que l’université le traite et il faut que l’État refuse tout simplement de financer ces filières quand leurs résultats sont mauvais. Il faut faire entretenir aux universités une culture du résultat.

Quelles sont les filières les plus problématiques ?


On sait très bien qu’à l’université les filières en lettres et sciences humaines sont des filières passionnantes, j’en suis moi-même issu, mais ce sont des filières pour lesquelles les débouchés ne sont pas les plus évidents. Ce sont souvent, d’ailleurs, des débouchés dans les métiers du professorat. A la fois des élèves qui peuvent avoir un bac en décalage avec les objectifs de ces filières ou quand ces filières ne sont pas correctement organisées c’est-à-dire on ne s’occupe pas de la réussite des élèves, on s’occupe tout simplement de leur donner un accès et puis ensuite advienne que pourra. On sait qu’elle a des comportements qu’il faut éviter.

J’aimerais revenir un instant sur un des problèmes en dessous du niveau universitaire qui me paraît absolument essentiel, c’est la question de l’apprentissage. On nous rabat les oreilles avec le fait qu’il faut créer davantage de places d’apprentissage, c’est vrai. Il faut transformer le lycée d’enseignement professionnel. Il faut que l’apprentissage, qui est aujourd’hui une voie marginale dans l’enseignement en France, devienne une voie centrale. Tout simplement parce que c’est la voie de formation la plus sûre, c’est la voie de formation qui en Allemagne fonctionne le mieux pour emmener des jeunes sur  le marché du travail. Si le gouvernement a un effort à faire, c’est celui-ci. D’autant plus que les entrées en apprentissage baissent de façon dramatique dans notre pays, ce qui est contradictoire avec le discours qui nous est tenu.

Pour aller plus loin :
Choisir les bons leviers pour insérer les jeunes non qualifiés
, Note, janvier 2012

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