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09/07/2014

Nouvelle étude : Pour une véritable politique publique du renseignement

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Nouvelle étude : Pour une véritable politique publique du renseignement
 Institut Montaigne
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Dans son étude Pour une véritable politique publique du renseignement, réalisée à la demande de l'Institut Montaigne, Sébastien-Yves Laurent, professeur à l'Université de Bordeaux et spécialiste des questions de sécurité, revient sur les rouages et les défis du renseignement en France. Sur la base d'auditions menées auprès de plus d'une cinquantaine d'experts et d'officiels, notamment les directeurs des services de renseignement, il développe quarante-huit propositions à destination des pouvoirs publics et des acteurs du renseignement avec une double ambition : d'une part, rendre les services français plus efficaces dans leur missions traditionnelles et mieux armés pour intervenir sur le nouveau champ de bataille du cyberespace et d'autre part, garantir un meilleur respect des libertés individuelles.

Etre mieux armé pour naviguer dans le cyberespace…

L’émergence du monde numérique a profondément bouleversé les repères traditionnels des Etats et le fonctionnement du renseignement. A la fois lieu de collecte d’informations et lieu d’affrontements, le cyberespace représente une menace pour la souveraineté nationale et la protection des données personnelles des individus mais aussi des données stratégiques des entreprises. Le renseignement doit dès lors relever un double défi : non seulement défendre ses citoyens et entreprises mais également riposter à d’éventuelles cyberattaques.

"La compréhension de ce qu’est le cyberespace doit être une priorité pour nos services de renseignement. Elle passe par une cartographie de ses acteurs afin d’identifier les lieux réels de pouvoirs et de décision", explique Sébastien-Yves Laurent. Pour renforcer la souveraineté cybernétique et numérique de la France, ce dernier préconise également de renforcer le secteur informatique dans les domaines du hardware et du software. "Nous devons nous émanciper de la domination des Etats-Unis et développer nos propres solutions informatiques d’hébergement sécurisé des données et de détection d’attaques. La France possède de nombreux atouts dans le domaine cybernétique : une complémentarité public-privé, un enseignement supérieur public reconnu mondialement pour la qualité de ses informaticiens et mathématiciens, un secteur privé du numérique en forte expansion et une industrie informatique de qualité dans les domaines industriels et embarqués".

Néanmoins, le développement du secteur passe par le renforcement du financement public de la recherche. Or, comme le regrette Sébastien-Yves Laurent, "les sommes mobilisées par l’Etat, notamment pour la recherche fondamentale et la R&D dans le domaine du numérique et du traitement de l’information qui irriguent le secteur privé et permettent le développement de nombreuses PME, sont encore relativement modestes et nécessiteraient d’être doublées ou triplées". 

Bâtir une relation de confiance avec les citoyens

Le contexte post-2001 de lutte contre le terrorisme international a entraîné l’adoption de législations qui ont renforcé les moyens de surveillance utilisés par les acteurs du renseignement, souvent au détriment des libertés individuelles. Le renseignement pâtit en France d’un manque de "clarté" dans son organisation et son fonctionnement : "Le renseignement se compose aujourd’hui de six agences dépendantes de trois ministères régaliens différents, apparues par sédimentation sur plus d’un demi-siècle, sans que jamais la volonté de simplification ait été prise en considération", constate Sébastien-Yves Laurent. Pour restaurer un climat de confiance entre les citoyens-contribuables et les services, il faudrait transformer le cadre général de chaque service qui doit dépendre d’une loi débattue par le Parlement, à l’instar de la plupart des pays européens. Il faudrait également mettre en place un authentique contrôle parlementaire sous la forme d’une commission permanente de contrôle, adapté aux missions et moyens particuliers de services.

Autre proposition de l’auteur : publier des indicateurs annuels (volume des écoutes administratives par service, interconnexion de fichiers, nombre de cyberattaques, etc.) mais aussi sur le modèle des services britanniques, établir une communication à destination de l’opinion publique sur les missions et les objectifs de sécurité des services de renseignement. "L’objectif principal est de faire disparaître l’assimilation de l’action des services à la surveillance de l’opinion", explique Sébastien-Yves Laurent. Enfin, dans un contexte de baisse des dépenses publiques, des outils de pilotage budgétaire pour les services inspirés du cadre de la LOLF permettraient de gagner en efficacité et en reconnaissance publique.

"Nos services de renseignement sont indispensables pour la sécurité des citoyens : il faut les renforcer, mais aussi les contrôler. Leurs modes d’action sont singuliers : il faut les préserver, dans le cadre de la loi votée par le Parlement. Le secret est indispensable pour l’État : face aux désirs de transparence, il faut le garantir, mais aussi le réguler" conclut Sébastien-Yves Laurent.

Consulter l'étude Pour une véritable politique publique du renseignement

Lire l'article de Laurence Neuer, paru sur LePoint.fr, le 8 juillet 2014

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