Rechercher un rapport, une publication, un expert...
L'Institut Montaigne propose une plateforme d'Expressions consacrée au débat et à l’actualité. Il offre un espace de décryptages et de dialogues pour valoriser le débat contradictoire et l'émergence de voix nouvelles.
13/07/2012

Mettre fin au cumul des mandats

Imprimer
PARTAGER
 Institut Montaigne
Auteur
Institut Montaigne

Laurent Bigorgne, directeur de l’Institut Montaigne

Laurent Bigorgne, directeur de l’Institut Montaigne, est intervenu le 4 juillet dernier à l’occasion de la soirée des think tanks organisée par Acteurs Publics sur le renouveau du service public. Son intervention a permis de revenir sur une réforme essentielle pour la vitalité de notre démocratie : l’interdiction du cumul des mandats électoraux.

Le cumul des mandats : une désolante exception française

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : le cumul des mandats est, en France, une pratique aussi persistante que répandue. 75 % des députés de la nouvelle Assemblée exercent au moins un autre mandat, soit à peine mieux qu’en 2007 où ils étaient 83 %. A titre de comparaison, en Allemagne, 24 % des parlementaires cumulent plusieurs mandats, ils sont 3 % au Royaume-Uni et… 0 % aux Etats-Unis.

Laurent Bach, professeur assistant à la Stockholm School of Economics, a analysé les résultats aux élections ainsi que le travail des députés depuis 1988 dans son ouvrage Faut-il abolir le cumul des mandats (2012). Ses recherches montrent que le cumul des mandats limite la présence des députés en commissions parlementaires, les éloigne davantage des débats publics nationaux et les pousse à orienter leurs activités et interventions à l’Assemblée en fonction des intérêts propres à leur collectivité locale.

Pourquoi mettre fin à cette pratique

Le Parti socialiste défend depuis quelques années la limitation du cumul des mandats. Déjà présent lors de sa convention « Rénover la politique » de juillet 2010, cet engagement a été renouvelé par François Hollande lors de la campagne pour l’élection présidentielle de 2012, puis réaffirmé par son Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, lors de son discours de politique générale : "pour permettre aux parlementaires de se consacrer pleinement à leur mission, il sera mis fin, comme c'est déjà le cas pour les membres du gouvernement, au cumul entre un mandat de parlementaire et l'exercice de fonctions exécutives locales. Cette réforme sera applicable en 2014".

Pourtant, nombre de députés, y compris socialistes, continuent à se montrer réticents, notamment car ils jugent indispensable de conserver un ancrage local afin d’être en prise avec la réalité du terrain. Pourtant, 93% des Français interrogés à l’occasion d’un sondage IFOP se sont montrés favorables à l’interdiction du cumul des mandats.

L’interdiction du cumul des mandats permettrait d’améliorer l’efficacité du travail parlementaire et la représentativité des assemblées – en ce début de quatorzième législature, seules 25 % des députées sont des femmes et 2 % sont issus de la diversité. Elle entrainerait également un plus grand renouvèlement des effectifs des assemblées : sur 577 députés, 360 ont déjà effectué au moins un mandat dont 344 lors de la dernière législature.

Comment y mettre fin

Depuis plusieurs années, l’Institut Montaigne défend l’interdiction du cumul des mandats pour les parlementaires dans le temps et dans l’espace. Cette position se résume par la formule suivante "un homme, un mandat". Dans l’idéal, le non-cumul devrait également être étendu aux membres des cabinets ministériels afin que ceux-ci à l’instar de leurs ministres ne puissent détenir par ailleurs un mandat local.

La contrepartie évidente de cette exigence serait d’accorder aux élus un statut renouvelé et consolidé qui leur permettrait notamment d’envisager plus sereinement leur réinsertion professionnelle à l’issue de leur mandat.

La vitalité de notre démocratie est à ce prix.

Par Marguerite de Tavernost et Nicolas Ferrière pour l'Institut Montaigne

Recevez chaque semaine l’actualité de l’Institut Montaigne
Je m'abonne