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28/04/2016

Les réformes du marché du travail au Royaume-Uni

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Les réformes du marché du travail au Royaume-Uni
 Institut Montaigne
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Le projet de loi travail est en discussion à l'Assemblée nationale. La vivacité des débats, couplée à la technicité des sujets abordés, sont autant d'éléments qui nous poussent à proposer un nouvel éclairage de ces enjeux. L'occasion de revenir sur les principales réformes du marché du travail entreprises par nos voisins européens. Cette semaine : le Royaume-Uni.

Touché par la crise, le Royaume-Uni est aujourd’hui en situation de quasi plein-emploi

La crise de 2008 a fortement touché le Royaume-Uni où les services financiers jouent un rôle essentiel dans l’économie. Ainsi, sur la période 2008-2009, le pays a ainsi connu une diminution de 5,3 % de son PIB.
Entre 2007 et 2011, le taux de chômage au Royaume-Uni est passé de 5,3 %  à 8 %, et plus de 21 % pour les moins de 25 ans.
Le pays a retrouvé aujourd’hui une situation proche du plein emploi. Tous les indicateurs sont au vert : taux d’emploi à 73,3 %, taux de chômage à 5,6 %, taux d’activité à 77,8 %.
Deux millions d’emplois ont été créés dans le secteur privé entre le deuxième trimestre 2010 et le quatrième trimestre 2014, tandis que 400 000 emplois publics  étaient supprimés sur la même période.
Ces résultats tiennent en grande partie à la politique de Workfare mise en place par le ministre des affaires sociales Iain Duncan Smith. Celle-ci s’inscrit dans une certaine continuité avec les politiques du New Labour, avec la mise en place d’un accompagnement renforcé des demandeurs d’emploi – notamment les plus éloignés du marché du travail – qui se voient imposer en contrepartie un contrôle accru.

Des programmes ciblés sur les jeunes et les chômeurs de longue durée

En juin 2011, le gouvernement décide de concentrer les efforts et les moyens de la politique de l’emploi sur les chômeurs de longue durée. Il confie à des prestataires extérieurs le placement de ces chômeurs en les rémunérant selon la difficulté du placement et le caractère durable de l’emploi trouvé. Le Conseil d’Orientation pour l’Emploi (COE) estime que 1,35 million de personnes ont bénéficié de ce programme entre juin 2011 et décembre 2013.

Par ailleurs, les chômeurs de longue durée ont vu leurs obligations se renforcer. Toute personne sans emploi depuis au moins deux ans doit, pour continuer à percevoir ses indemnisations, soit effectuer des travaux d’intérêt général, soit se rendre tous les jours dans son agence pour l’emploi, soit suivre les formations proposées par son job coach.
Malgré une politique ciblée sur les chômeurs de longue durée, le taux de chômage de longue durée est en constante progression au Royaume-Uni : de 24,1 % en 2008, il a atteint 35,7 % en 2014 d’après l’OCDE.
Le gouvernement s’est aussi efforcé de cibler le chômage des jeunes en incitant les TPE à les embaucher, en finançant des apprentissages et des stages non rémunérés, tout en renforçant l’accompagnement du service public de l’emploi auprès de cette catégorie. Le taux de chômage des jeunes était de 15 % en 2008, puis de 21,3 % en 2011, et est retombé à 14,6 % en 2015.

Une réforme du droit du licenciement

Le gouvernement Cameron s’est attelé à réformer le droit du licenciement via différentes mesures visant à simplifier la procédure et réduire son coût pour les entreprises. D’abord, l’ancienneté nécessaire pour se prévaloir d’un licenciement injuste a été augmentée de 1 à 2 ans.  Puis, des frais de justice ont été mis en place pour l’accès aux tribunaux du travail : ils sont compris entre 160 et 230 livres pour le dépôt d’un recours, et entre 250 et 950 livres en cas d’inscription de l’affaire à une audience. Ces frais peuvent être remboursés en cas de gain de cause du salarié. La Chambre des Communes estime que le nombre de requêtes devant les juridictions du travail avait chuté de 64 % entre octobre 2013 et septembre 2014.


Le développement des « contrats zéro heure »

Depuis 2010, on observe une recrudescence des « contrats zéro heure » au Royaume-Uni qui existent légalement depuis 1996. Ils sont, sans conteste, l’évolution la plus marquante du marché du travail britannique. Les « contrats zéro heure » permettent à l’employeur de bénéficier d’une réserve de main d’œuvre disponible en fonction de l’activité en n’offrant aucune garantie au salarié en termes de nombre minimal d’heures travaillées.

En 2012, l’Office for National Statistics (ONS) dénombrait 250 000 titulaires d’un « contrat zéro heure », 583 000 en 2013, et 801 000 en 2015, soit 2,5 % des personnes en emploi. Néanmoins, dans sa dernière estimation qui date de décembre 2015, l’ONS estime qu’un titulaire de ce type de contrat en cumule en général au moins deux, ce qui représente 1,7 million de contrats sur le marché du travail, soit 6 % de l’emploi total.

Hausse du salaire minimum et coupes dans les aides sociales

Ces réformes du marché de l’emploi ont été récemment accompagnées d’une refonte des prestations sociales britanniques au sein d’un Universal Credit destiné à toutes les regrouper d’ici 2020. Le gouvernement Cameron a profité de cette refonte pour opérer d’importantes coupes dans les dépenses sociales de l’Etat dans le but d’inciter au retour à l’emploi. En contrepartie, le gouvernement a revu à la hausse le salaire minimum pour les plus de 25 ans (National Living Wage) afin d’apporter une garantie sociale à l’opposition travailliste.


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