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22/05/2008

Le poids économique des barils bruts

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 Philippe Manière
Auteur
Président-fondateur de Footprint > consultants

Le pétrole a franchi un nouveau record ce jeudi… Les cours semblent s’affoler. Cette flambée va-t-elle durer ? Comment le marché peut-il réagir?

L’irrésistible accélération

Un jour seulement après les 130$, la barre des 135$ a été franchie ce mercredi. Au total, en un an, les prix du pétrole brut ont plus que doublé ! Et les analystes n'anticipent pas, pour l'instant, de repli des cours. D’aucuns pensent même qu’on n’a encore rien vu : Goldman Sachs avait par exemple pronostiqué, début mai, un baril à 200 dollars d'ici à 6 à 24 mois.

Le pourquoi de la flambée

Il y a plusieurs causes à cette escalade des prix du pétrole… Tout d’abord, la semaine dernière, le département américain de l'Energie a annoncé une baisse des stocks de pétrole brut des Etats-Unis. Or une baisse des stocks inquiète toujours les marchés… Ensuite, l'attitude de l'OPEP n’arrange rien. Son refus d'augmenter son offre est somme toute légitime, mais ne fait évidemment pas nos affaires. Mais enfin, et c’est ici une explication plus nouvelle, des rumeurs véhiculées par le Wall Street Journal évoquent une baisse dans les chiffres de la prévision de production mondiale de brut qui est faite par l'Agence Internationale de l'Energie.

A sec d’ici 20 ans

En fait, dans ce rapport à paraître en novembre, on pourrait découvrir une correction à la baisse drastique des prévisions d'approvisionnements dans les 20 prochaines années, cela du fait de l'âge des champs pétrolifères et aussi de la diminution des investissements. A ce stade, ce sont des conjectures, mais si on regarde vers la Russie ou l’Arabie Saoudite dont les productions ont chuté ces derniers mois, il n’y a pas de quoi être optimiste.... Et puis bien, sûr, la spéculation vient s’ajouter à tout ça, sans compter ce vieux mouvement de bascule traditionnel qui fait que quand le dollar baisse, les matières premières grimpent.

Affolement mondial

Les conséquences de cette folle hausse se font déjà sentir un peu partout dans le monde. En vrac : l'Indonésie a annoncé qu'elle allait augmenter de 28% le prix des carburants, les marins-pêcheurs bretons se sont mis en grève contre l'envolée du gazole, la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest s'inquiète de ce qu’elle considère comme un "défi majeur" pour la croissance de la région, etc.

Bilan économique

Sur ce sujet, on sait trois choses. Premièrement, la hausse du prix du pétrole est moins grave en 2008 qu’il y a trente ans. Je pense évidemment, par exemple, à la fameuse crise du pétrole de 1973, parce que nos économies sont aujourd’hui davantage des économies de service que des économies industrielles. Deuxièmement, ce sont toujours les plus pauvres, qu’il s’agisse des pays ou des ménages, qui paient le plus lourd tribut à une hausse du prix de l’énergie. Et troisièmement, une hausse forte et durable des prix du pétrole pèse forcément sur l’économie mondiale.

La durée de la flambée

Justement, la hausse encours, forte, sera-t-elle, aussi, durable ? Personne ne peut le dire ! Il faut être extrêmement prudent sur ce type de prévisions : rien n’est irréversible, et on a vu par le passé des tendances de ce type s’inverser très vite et des experts chevronnés se tromper complètement…Mais, quelle que soit l’évolution à venir, on sait déjà que les pays consommateurs ne se coordonnent pas assez sur ce sujet. On sait aussi que nous avons tous intérêt à diminuer notre sensibilité aux fluctuations des cours.

Eco-consommateurs

Quoi faire ? Au plus petit échelon, c'est-à-dire celui de l’individu citoyen, nous proposons, à l’Institut Montaigne, de renouer avec une vraie politique d’économies d’énergie et, pour commencer, d’imposer aux bailleurs l’installation de portes et fenêtres offrant des performances suffisantes en termes d’isolation dans les locaux qu’ils mettent en location. Le chauffage et la climatisation inutiles constituent une énorme source d’économies potentielles dont il faut s’occuper.

Unité oblige

Mais, au-delà, au niveau géopolitique, on ne peut pas seulement regarder les trains passer ! Aussi proposons-nous que soit créée, au niveau européen, une Haute Autorité Indépendante servant de lieu de concertation et d’élaboration des grands choix énergétiques européens. Si la hausse continue, il faut absolument que les Européens aient une politique commune face aux producteurs.

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