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16/06/2008

Le bac : 200 ans et 2 vitesses...

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Aujourd’hui, c’est le jour J pour le baccalauréat, édition 2008 ! Les élèves des filières générales ont planché ce matin sur l’épreuve de philo, alors que le bac fête cette année ses 200 ans…

Un bicentenaire agité Cet anniversaire n’avait des airs de fête pour personne… Le coup d’envoi des épreuves a été donné ce matin pour une partie des 615 625 candidats, qui s’attaquaient à la traditionnelle épreuve de philo et, statistiquement, cela nous promet à peu près 500 000 bachelières et bacheliers dans un mois. Le bac a fait un sacré chemin depuis la toute première épreuve, il y a 200 ans. A l’époque, il y avait eu 31 lauréats, et bien sûr uniquement des hommes…

Décrié et aimé à la fois Nombreux sont ceux qui réclament la suppression pure et simple du bac au motif qu’il ne servirait plus à grand-chose d’autre qu’à effrayer les candidats. Pourtant, Xavier Darcos n’est pas du tout sur cette ligne, et, selon un sondage Sofres pour La Croix, 72 % des Français jugent cette épreuve indispensable pour réussir sa vie professionnelle (contre seulement 60 % en 1978). Autant dire que notre bon vieux bac a encore de beaux jours devant lui… Mais il n'est pas exclu pour autant qu’il soit procédé à une vraie remise à plat du diplôme.

Des idées pour le renouveler En théorie, on pourrait parfaitement conserver le bac tout en le faisant évoluer. D’ailleurs, ce ne sont pas les idées qui manquent : les sénateurs proposent d'étaler le diplôme sur deux ans, plusieurs rapports de Bercy ont déjà suggéré d'en alléger les coûts (cette affaire revient quand même à 38 millions d'euros par an), et certains syndicats militent pour plus de contrôle continu… Si la petite réforme annoncée par Xavier Darcos pour 2012 ne remet pas réellement l’épreuve en cause, de plus en plus, derrière ce parchemin apparemment unique, se cache bien des épreuves très différentes…

Vers une banalisation ? Incontestablement, les bacheliers sont plus nombreux que dans les années 70, puisque 64 % d'une génération obtient le bac dans les années 2000, contre 30 % à l’époque. Mais en même temps, le taux de bacheliers stagne autour de 60 % depuis quinze ans. On a donc un peu l’impression que la démocratisation a été spectaculaire, mais qu’elle est à bout de souffle.

Un diplôme à deux vitesses Si le diplôme s’est démocratisé, un véritable tri social s’opère entre milieux aisés et milieux défavorisés. Les enfants de milieux modestes sont plus nombreux qu'auparavant à parvenir au bac, mais ils sont très surreprésentés dans les filières professionnelles, qui sont les plus adaptées au marché du travail mais qui ne conduisent pas à des études longues. Et bien sûr, symétriquement, les fils de cadres trustent la filière S, qui est devenue le véritable sésame vers les classes préparatoires aux grandes écoles. C’est vraiment là que le bât blesse, d’autant que les familles ont une connaissance très inégale de ces subtilités en fonction des milieux sociaux, si bien qu’on frôle le délit d’initié…

L’enjeu de l’après bac Aujourd’hui, le véritable enjeu n’est plus le bac, dont la valeur de sésame a pratiquement disparu, mais l’après-bac, qui en France est dual avec d’un côté, la fac et, de l’autre, les classes préparatoires aux grandes écoles. Or, si l’université remplit à peu près son rôle de formation de masse – quoiqu’il y ait des problèmes comme vous le savez - la voie royale pour les futurs managers, en revanche, reste en France celle des classes prépa et ensuite des grandes écoles où la part d’élèves issus des milieux défavorisés ne cesse de décroître au fil du temps.

Favoriser l’accès aux grandes écoles Ces élèves sont sous-informés, voire pas informés du tout des moyens d’accès aux grandes écoles. Souvent, ils savent à peine qu’elles existent et quand ils le savent ils pensent que ce n’est pas pour eux. A l’Institut Montaigne, nous proposons donc d’abord de lutter contre cette auto-censure scolaire en sensibilisant les élèves des ZEP à la possibilité de faire des d’études supérieures via les grandes écoles. Mais au-delà, il nous semble aussi qu’on pourrait purement et simplement réserver quelques places dans chaque classe prépas pour les meilleurs de ces élèves de ZEP. Les quotas et les traitements différentiés ne figurent pas tellement dans notre tradition, mais je crois sincèrement qu’il faut en passer par là pour faire tomber les barrières psychologiques, pour garantir après le bac, qui n’est qu’un début, une vraie égalité des chances.

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