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01/12/2016

L’Autriche, prochaine prise des populistes?

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L’Autriche, prochaine prise des populistes?
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Ce dimanche 4 décembre, les électeurs autrichiens sont appelés aux urnes pour la troisième fois cette année afin de désigner leur futur président fédéral. Le 24 avril 2016, le premier tour de la présidentielle avait placé en tête Norbert Hofer, le candidat du Parti de la liberté d'Autriche (FPÖ), formation d'extrême droite, avec 35,5 % des voix, suivi par le candidat des Verts, Alexander Van der Bellen, avec 21,34 %.

Le second tour a désigné comme vainqueur le candidat écologiste avec une très courte majorité. La Cour constitutionnelle a cependant annulé ce vote en raison de multiples irrégularités dans le décompte des bulletins.
 
Les électeurs autrichiens sont donc une nouvelle fois appelés aux urnes ce week-end afin de départager les deux hommes. Les derniers sondages font état d’une courte avance du candidat du FPÖ avec 52 % des intentions de vote, contre 48 % pour son rival.
 
Si c’est au chancelier que la constitution autrichienne donne la majorité des pouvoirs exécutifs, comme la mission de représenter le pays au sein des instances européennes, le président dispose de prérogatives non négligeables, telles que la possibilité de révoquer le gouvernement et le chancelier, ou de refuser de signer un traité international.
 

Une histoire compliquée avec l’UE
 
C’est à la chute du rideau de fer, en 1989, que l’Autriche présente sa demande d’adhésion à la Communauté européenne. Le 12 juin 1994, les Autrichiens votent par référendum à plus de 66 % pour une entrée de leur pays dans l’UE. L’adhésion devient effective en 1995 et, quatre années plus tard, le pays adopte l’euro comme monnaie. 
 
Depuis cette adhésion, les relations entre l’Autriche et l’Europe ont souvent été difficiles. La première véritable crise intervient en 2000, après que le Parti populaire autrichien (ÖVP) et le FPÖ de Jörg Haider ont passé un accord débouchant sur la participation de la formation d’extrême-droite au gouvernement. En réponse, les 14 autres Etats membres prennent des mesures bilatérales de rétorsion à l’encontre de l’Autriche, ce qui réduit l’opinion positive de la population à l’égard de l’UE. En 2005, Heinz-Christian Strache prend la direction du parti d’extrême-droite et y développe une ligne politique résolument anti-européenne. En 2013, toujours président parti, il déclare vouloir organiser un référendum sur la sortie de l’Autriche de l’UE, sur le modèle du référendum que le Premier ministre britannique David Cameron venait alors d’annoncer.
 
La récente crise migratoire en Europe a eu pour effet direct de renforcer la popularité du FPÖ, qui a gagné 10 points durant l’année 2015 et recueille désormais près de 35 % d’opinion positive. Situé sur la route des Balkans, l’Autriche est un passage quasi-obligé pour les migrants originaires du Moyen-Orient désireux de se rendre en Allemagne. Face à cette situation et à la montée en puissance du FPÖ, le gouvernement a pris la décision de fermer ses frontières et d’introduire un quota pour les demandeurs d’asile. Néanmoins, ces mesures se sont révélées inefficaces pour limiter la montée du parti populiste qui peut à présent espérer remporter la présidence du pays et participer à un nouveau gouvernement après les prochaines élections parlementaires de 2018.
 
 
Vers un Öxit ?
 
Depuis 1994, l’adhésion de l’Autriche à l’UE est soutenue par la majorité de la population. Le niveau de soutien le plus élevé a été atteint au printemps 2002 (80 %), le niveau de rejet le plus élevé en 2008 (33 %).


Malgré les déclarations d’Heinz-Christian Strache, le candidat du FPÖ à la présidentielle, Nobert Hofer, semble avoir pris ses distances avec la proposition du parti de quitter l’Union européenne. Lors du dernier débat organisé le 27 novembre, il déclarait ainsi : "Il n’y aura pas d’Öxit. J’ai dit à plusieurs reprises que j’étais en faveur d’un développement positif de l’UE."
 
Ce revirement politique peut s’expliquer par l’inquiétude créée par le Brexit dans l’opinion publique. L’économie autrichienne, comme celle de son voisin allemand, repose en effet en grande partie sur les exportations. La chute du cours de la livre sterling consécutive au référendum britannique ainsi que la volonté déclarée des Etats membres européens de refuser l’accès du Royaume-Uni au marché intérieur font craindre aux Autrichiens qu’une sortie de l’UE aurait des effets négatifs sur l’économie du pays.
 
Si une sortie de l’Autriche de l’Union européenne ne semble pas l’hypothèse la plus probable, l’élection de Norbert Hofer aurait toutefois d’importantes répercussions en Europe. Comme le Brexit, cela conforterait les positions des différents partis eurosceptiques au sein du continent. De plus, de par sa géographie, l’Autriche entretient des relations étroites avec les pays d’Europe centrale et orientale. L’arrivée à la présidence du pays d’une personnalité politique d’extrême droite pourrait rapprocher le pays des gouvernements populistes de la région, en particulier de ceux du Polonais Jarosław Kaczyński et du Hongrois Viktor Orbán

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