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25/06/2009

La prison : un "impératif du prochain gouvernement"

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La prison : un
 Institut Montaigne
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"Une nécessité morale" et "un impératif du prochain gouvernement". C’est ainsi que le chef de l’Etat a qualifié la création de plusieurs milliers de places en prison, devant le Congrès lundi dernier. Dans la foulée était annoncée la création d’un secrétariat d’Etat auprès de la Garde des Sceaux, confié à Jean-Marie Bockel. Ce dernier aura notamment pour tâche de moderniser, humaniser et étendre le parc pénitentiaire français.

La mission confiée au nouveau Secrétaire d’Etat est d’une importance indiscutable. L’état de délabrement, physique et moral, de nos établissements pénitentiaires nous attire régulièrement les critiques acerbes du Conseil de l’Europe, de l’Observatoire International des Prisons, ou encore d’Amnesty International. Organismes qui nous placent au même niveau que la Russie, juste devant la Chine mais après la Turquie ou le Kosovo. La cause principale de ce qu’il faut bien appeler une honte pour notre pays est la surpopulation chronique des établissements. On compte actuellement douze mille détenus de plus que de places en prison, un sureffectif largement concentré sur les maisons d’arrêt.
Celles-ci ont vocation à accueillir les détenus en attente de jugement (les "prévenus") et ceux qui purgent une peine de moins d’un an. S’il y a une population carcérale qui mérite qu’on concentre sur elle les efforts pour réinsérer les détenus c’est bien celle-là ! Or la plus grande indigence y règne et n’y prospère que la haine de la société. Elles doivent assurément constituer le chantier prioritaire du nouveau secrétaire d’Etat.

L’Institut Montaigne, tel qu’il l’a exprimé dans son rapport Comment rendre la prison (enfin) utile, préconise en premier lieu de cesser de recourir systématiquement à la détention provisoire. Cette mesure, qui constitue dans beaucoup de cas une flagrante violation des droits de l’homme, doit être l’exception, non la règle.
En second lieu, il convient de rappeler que l’incarcération n’est qu’une modalité de purgation des peines. Elle n’a pas à être choisie "par défaut". D’autres sanctions pénales privatives de liberté existent et elles lui sont souvent préférables. D’une manière générale, il faut clairement assigner pour but à la justice de remplir sa mission de réinsertion des condamnés mais aussi lui en fournir les moyens.

Enfin, rappelons que le projet de loi pénitentiaire – il s’en vote un tous les vingt ans environ – a déjà été adopté par le Sénat et sera examiné en une lecture unique par l’Assemblée Nationale à une date proche, vraisemblablement à la rentrée. C’est cette loi, d’importance cruciale, qui détermine les principes et les missions de l’administration pénitentiaire. Le secrétaire d’Etat n’a donc pas de temps à perdre s’il veut être autre chose que le maître d’oeuvre des grands travaux annoncés par le président de la République (4 000 à 5 000 nouvelles places dans les années qui viennent).

Les nouveaux établissements, si rien ne change par ailleurs, devraient avoir le même destin que les anciens et présenter le même visage d’ici peu. Plus qu’un vaste programme immobilier, c’est d’un changement de paradigme, tourné vers la réintégration future des détenus dans la société, qu’a besoin le système carcéral français. Pour qu’enfin la prison serve, vraiment, à quelque chose.

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