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14/02/2013

Habitat sobre en énergie : comment enclencher le moteur de la rénovation ?

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Habitat sobre en énergie : comment enclencher le moteur de la rénovation ?
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Retrouvez sur l'Usine Nouvelle la tribune de Yannick Pérez, Professeur Associé à Supélec et Maître de Conférences en Sciences Economiques Université Paris-Sud 11 et Vincent Rious, Economiste chez Microeconomix. Tous deux sont rapporteurs du groupe de travail "efficacité énergétique" de l’Institut Montaigne.

Des mesures pour accroître l’efficacité énergétique de l’habitat seront bientôt annoncées. Mais le débat actuel laisse craindre l’adoption d’une panoplie d’actions publiques peu articulées, coûteuses et peu efficaces.

Rendre l’habitat moins consommateur d’énergie est un impératif. Le bâtiment, où domine l’habitat, consomme 44 % de l’énergie en France. Il est fortement émetteur de CO2 quand l’Europe impose 20 % d’économies d’énergie d’ici 2020. Pour de bons résultats, il faut une démarche systémique, avec des priorités et de bons leviers.

L’essentiel du parc immobilier français (32 millions de logements) sera toujours présent dans 20 ans. La priorité doit donc porter sur la rénovation des bâtiments, surtout des plus anciens et de l’habitat privé, le logement social étant déjà le bon élève de l’efficacité énergétique.

On compte de nombreuses incitations aux travaux financées par l’Etat à travers les éco-prêts à taux zéro, les crédits d’impôts, les financements de l’Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, ceux de l’Agence nationale de l’habitat, les certificats d’économies d’énergie et les diagnostics de performance énergétique. Mais l’investissement reste insuffisant. Mettre davantage d’argent public sera difficile. Il faudra donc cibler et évaluer systématiquement les mesures.

Un ciblage pertinent demande des objectifs chiffrés, adaptés aux catégories de logements. Trois actions conjointes prioritaires sont à rechercher : la gestion active de l’énergie (comme le pilotage automatisé des énergies d’un bâtiment), l’isolation des combles et l’installation de systèmes de chauffage à très basse température ou à condensation. L’habitat énergétiquement précaire, surtout occupé par des propriétaires de maisons individuelles en zone rurale, doit être mieux détecté au niveau local.

Il faudra surtout mettre en place les bonnes incitations pour que les acteurs concernés - financeurs, propriétaires, locataires, artisans et filières énergétiques - s’engagent d’eux-mêmes dans une dynamique profitable à tous. Pour cela, cinq leviers sont à mobiliser simultanément : rendre l’investissement dans l’efficacité plus rentable, mieux concilier les intérêts des propriétaires et des locataires, améliorer les compétences techniques pour assurer un bon suivi et une bonne évaluation des travaux, garantir des financements suffisants et enfin valoriser le patrimoine sobre en énergie.

Le parc immobilier français est dispersé et hétérogène. Sa structure d’occupation est diverse : locataires privés ou sociaux, propriétaires pauvres ou aisés, individuels ou collectifs. Rénover une maison ou un logement coûte cher (15 000 € en moyenne) et les gains sont incertains. Ainsi, si le propriétaire loue son logement, c’est le locataire qui fait les économies.

Les investissements seront plus rentables si les prix de l’énergie payés par les consommateurs correspondent à leurs coûts réels. Or ces prix sont 25 % moins élevés que les coûts. Les moyens dégagés par des factures plus réalistes pourraient alimenter les financements publics de la rénovation. Le système de bonus-malus de la proposition de loi Brottes sera coûteux à administrer et apportera peu d’économies d’énergie. Il continue d’isoler le consommateur de la valeur réelle des énergies. Il serait plutôt souhaitable d’organiser une transition vers des prix de marché, seuls à même de réellement réguler la consommation.

Pour mobiliser les propriétaires on peut davantage faire participer les locataires aux frais de rénovation tout en leur assurant une baisse de charges effective.

Enfin, la filière des travaux énergétiques, dispersée en une myriade d’acteurs, doit mieux se structurer et gagner en qualité pour accélérer l’adoption de nouvelles technologies et leur déploiement à grande échelle. La création de formations spécifiques, adossées aux formations existantes allant des CAP aux Masters, la structurerait à long terme. Les aides publiques ne devraient être accordées qu’aux seuls professionnels certifiés, capables de faire les bons diagnostics et les bonnes recommandations, encadrés par des audits des travaux ex-post. A ce titre, l’actuelle pléthore de labels devrait laisser la place à un label unique.

Tags : Environnement, Développement durable, Matériaux, BTP - Eléments de construction, Energie

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