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28/09/2011

Gouvernance, autonomie, financement des universités : échos du débat entre Jean-François Copé et Jack Lang à l'Institut Montaigne

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Gouvernance, autonomie, financement des universités : échos du débat entre Jean-François Copé et Jack Lang à l'Institut Montaigne
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Dépêche AEF du 27/09/11 - Echos d'un débat entre Jean-François Copé et Jack Lang dans le cadre du colloque sur la réforme des universités organisé par l'Institut Montaigne, en partenariat avec AEF, BFM-TV et Les Echos, lundi 26 septembre 2011.

« Que l'on soit de gauche ou de droite, on doit investir massivement dans la matière grise et la gauche a toujours eu la volonté d'encourager le développement des universités et de la recherche », assure Jack Lang, ancien ministre de l'Éducation nationale, lors d'un déjeuner débat avec Jean-François Copé, secrétaire général de l'UMP.

Ce dernier lui fait écho affirmant qu' « il faut aller au-delà des débats idéologiques et savoir s'il faut appliquer une politique de droite ou une politique de gauche ». Il admet également qu' « il y a eu des efforts en faveur de l'enseignement supérieur de tous les gouvernements ». Cette discussion s'est tenue dans le cadre du colloque organisé par l'Institut Montaigne (en partenariat avec AEF, BFM-TV et « Les Échos »), lundi 26 septembre 2011, et intitulé « 15 ans de réforme des universités : quels acquis, quels défis ? ». Le député socialiste du Pas-de-Calais rappelle la « volonté de démocratisation manifeste » de la gauche qui s'est traduite dans les années 1990 à travers les plans U2000 et U3M notamment. « Ce soutien à la démocratisation doit être concilié avec l'excellence », ajoute-t-il. Pour le député UMP de Seine-et-Marne, l'enseignement supérieur et la recherche représentent « un de ces sujets tellement difficiles que notre première obsession doit être le benchmarking. Nous devons avoir les yeux rivés sur les classements internationaux ».

Voici des échos du débat entre Jack Lang et Jean-François Copé :

GOUVERNANCE. « L'un des acquis du quinquennat de Nicolas Sarkozy est d'avoir posé les bases d'un système qui répond à trois questions : celle du financement, celle de l'ouverture et celle de la gouvernance qui restait jusqu'à la loi LRU un grand tabou, qui est encore à la croisée des chemins et qui est un sujet sur lequel il faut encore aller plus loin ». Ainsi, comme Nicolas Sarkozy , Jean-François Copé estime que « les personnalités extérieures doivent voter pour élire le président d'université, sinon ce n'est pas la peine de les faire venir. Visiblement, c'est encore un sujet tabou car souvent ces personnalités extérieures sont des représentants des entreprises qui peuvent pourtant avoir aussi un avis pertinent sur la stratégie de l'université. » Par ailleurs, « derrière cette question se pose celle du mode de gouvernance et du profil des gouvernants. Personne ne peut dire quel sera ce profil dans quelques années. Et de nouveaux métiers vont émerger notamment car le nerf de la guerre étant le financement, il va falloir aller trouver des ressources. »

S'agissant de l'évolution des organes de gouvernance, Jack Lang estime que « si on veut une autonomie efficace, il faut dissocier les questions d'orientations stratégiques et les questions de gestion ». S'affirmant favorable au sénat académique, il juge qu' « il n'y a rien de plus facile à faire ». Le secrétaire général de l'UMP est également d'accord pour « mettre les pieds dans le plat » et « décliner la gouvernance à un échelon un cran au dessous » : « Je suis favorable à une réflexion sur l'idée un conseil de surveillance ou un directoire. »

AUTONOMIE. « L'autonomie est l'aboutissement d'une longue marche que j'ai personnellement soutenue, après la contractualisation et le colloque de la CPU à Lille en 2001 », assure Jack Lang. « Mais il faut des moyens sinon l'autonomie sera verrouillée et il n'est pas sûr que les universités soient encore suffisamment équipées » pour en profiter pleinement.

Alors que « personne ne veut remettre en cause l'autonomie qui ne sera que ce que l'on en fera », Jean-François Copé admet que « les conditions politiques n'étaient sans doute pas réunies à l'époque dans la famille politique de gauche » pour mettre en œuvre cette réforme. D'ailleurs, il rappelle que les débats parlementaires sur la loi LRU en 2007 ont été « encore rudes ». Aujourd'hui, désormais, « il y a peu de clivage gauche-droite » sur l'autonomie.

INVESTISSEMENTS D'AVENIR. Jack Lang l'admet : « Le grand emprunt est une bonne idée mais pour beaucoup de laboratoires candidater est souvent un chemin de croix car les dossiers sont compliqués. » En outre, ne s'opposant pas à l'émergence de « campus internationaux » ou de « pôles d'excellence », Jack Lang estime que cette politique ne doit pas « sacrifier l'irrigation du territoire » et « la compétition ne doit pas se substituer entièrement à la coopération ».

Pour Jean-François Copé, « il n'y a aucun problème à ce que coexistent des universités de rang mondial classées dans Shanghai et des petits pôles universitaires de proximité ». En revanche, « ce qui l''inquiète, c'est si l'on continue le saupoudrage » : « Il faut faire attention à ne pas mettre des lieux universitaires partout sans vraiment de moyens ». Le secrétaire général de l'UMP estime que les investissements d'avenir constituent « une des décisions les meilleures du quinquennat » car il se dit, de manière générale « pourfendeur des dépenses de fonctionnement non maîtrisées » qui ne permettent pas de financer des investissements. « Il faut donc y aller à fond sur les investissements d'avenir car le lien avec les universités est capital pour tirer la croissance. »

DROITS D'INSCRIPTION. « Je ne suis pas contre un système de péréquation comme ce qui a été mis en place à Sciences Po », indique Jack Lang, interrogé sur la nécessité ou non d'augmenter les droits d'inscription. Mais il insiste aussi pour dire que « les questions ne peuvent être résolues par morceaux ». « Par bonheur, l'enseignement supérieur n'a pas été traité par le gouvernement actuel avec la même violence que l'enseignement scolaire. Ce qui est certain, c'est que le financement public doit être amélioré et qu'il faut un programme pluriannuel de recrutement d'enseignants-chercheurs et de personnels Biatoss pour donner un signe à la communauté. »

De son côté, le secrétaire général de l'UMP rappelle que « Nicolas Sarkozy vient d'exprimer son opposition à l'augmentation des droits d'inscription ». Revenant sur les propositions de Terra Nova sur ce sujet, il relève qu'alors que la France va connaître « un grave problème de financement public », le système proposé « ne fonctionne pas car il augmente les droits d'inscription sans augmenter les aides pour les familles modestes. Et personne ne peut dire que l'État aura les moyens de créer une nouvelle allocation dont on ne sait pas comment elle sera financée. » Il ajoute : « Dans un contexte d'État en crise et si l'on augmente pas les droits d'inscription, il n'y a pas 36 solutions : le privé doit y participer. »

LOGEMENT ET AIDES SOCIALES. Jack Lang s'interroge une mesure prise par le gouvernement de Lionel Jospin, l'extension du bénéfice des APL aux étudiants : « Elle est en soi séduisante, mais elle nous a dispensé d'un vrai travail sur le logement étudiant. Même si des efforts ont été faits, il faut mettre les bouchées doubles, notamment pour surmonter les déterminismes sociaux. »

Jean-François Copé partage cette préoccupation estimant que le « problème numéro 1 est le logement étudiant, particulièrement en Île-de-France. Il faut être créatif et avoir un programme plus offensif ». Quant aux aides sociales, il plaide pour que les prêts à taux zéro soient facilités ainsi que le travail pendant les études.

MASTERISATION. « C'est LE point de divergence avec Jean-François Copé », affirme Jack Lang à propos de la réforme de la formation des enseignants. « C'est la décision la plus grave qui ait été prise. La situation est catastrophique. Le métier d'enseignant est le seul de ce niveau qui est privé de cette année de préparation. Les élèves de l'Ena ou de l'ENM, eux, en bénéficient. Les conséquences sont gravissimes, puisque beaucoup d'étudiants désertent le métier. La première tâche du prochain gouvernement sera de reconstruire une formation des enseignants sans reproduire ce qui existait avant. Personnellement, je suis pour la création d'un institut national de formation des maîtres avec des implantations dans les académies. »

De son côté, Jean-François Copé rappelle que « le système précédent n'était pas satisfaisant » et que « les IUFM étaient inadaptés aux attentes et leur état d'esprit n'était pas constructif ». Aujourd'hui, « certes, il manque une formation pratique. Evaluons d'abord la réforme et si des améliorations sont nécessaires, nous le ferons. »

- Voir le discours de Nicolas Sarkozy en introduction du colloque

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