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12/05/2008

EDF : Offre de rachat de British Energy

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Le groupe d'énergie français EDF serait seul à avoir déposé une proposition de rachat de l'opérateur nucléaire britannique British Energy. Montant de l’opération : quelque 12 à 13 milliards d'euros. Une grosse opération pour EDF comme pour le Royaume-Uni !

EDF en grand favori

Dès le début 2008, le gouvernement de sa Majesté a dit être disposé à vendre les 35% qui lui restaient dans British Energy, premier producteur d'énergie du Royaume-Uni. Des discussions ont très rapidement commencé avec des concurrents européens mais EDF est déjà considéré comme le favori en Grande-Bretagne et semble même se retrouver seul en lice après l’abandon très probable de l'espagnol Iberdrola et de l'allemand RWE.

Les groupes européens

Si la majorité des grands groupes d’énergie européens ont regardé cette possibilité de rachat de très près, c’est avant tout parce que ce marché britannique est assez lucratif et donc alléchant : British Energy produit en effet beaucoup de nucléaire bon marché. Pourtant, presque tous les concurrents d’EDF ont jeté l’éponge, chacun pour des raisons très différentes. Suez préfère par exemple se consacrer à son projet de fusion avec Gaz de France, quant au suédois Vattenfall, il aurait succombé aux pressions de son gouvernement qui prône le désengagement nucléaire et ainsi, retiré son offre.

L’opinion anglaise favorable Fait étonnant, cette privatisation totale du premier producteur d’électricité britannique se décide dans les hautes sphères et n’émeut pas démesurément l’opinion publique anglaise. Les Britanniques, habitués au désengagement de l’Etat du secteur de l’énergie, ont, dans le fond, une entière et surprenante confiance dans le privé.

Une histoire chaotique

Sources du désamour anglais, l’histoire tumultueuse du groupe et ses soucis financiers. En effet, British Energy a été privatisée en 1996 et a subi durant les années 2000 la baisse constante des prix de l’électricité, à tel point qu’elle a frôlé la banqueroute il y a 6 ans. Le gouvernement a dû la sauver en réinjectant alors de l’argent public, c’est-à-dire, en revenant au capital ! Depuis, les prix ont remonté, British Energy a assaini son bilan, mais l’entreprise demeure fragile avec un parc de réacteurs vieillissant, des fuites, des fermetures…

Investisseurs étrangers, et alors ?

Aux yeux des Anglais, le débarquement d’EDF, très expérimenté, devient presque une aubaine dans la perspective de redynamiser British Energy et au-delà, tout le secteur de l’énergie britannique. D’ailleurs, cette bienveillance des Anglais vis-à-vis des investissements étrangers, contraste beaucoup avec les crispations qu’il y a pu y avoir en France sur des sujets pourtant moins sensibles (rappelez-vous Danone il y a deux ans). Cette placidité britannique constitue un bon exemple pour cesser de céder à la psychose de "l’odieux envahisseur étranger" et résister à ce préjugé selon lequel si une entreprise est privatisée, la sécurité s’en trouve amoindrie. Est-il besoin de rappeler que presque partout dans le monde, à commencer par la Belgique, le privé fait fonctionner le nucléaire ?

Patriotisme économique

Cependant, je crois qu’il y a une vraie légitimité, pour les grandes démocraties européennes, à faire le tri entre les investisseurs. Autrement dit, s’il n’est pas gênant sauf exceptions qu’une de nos entreprises devienne canadienne, américaine, danoise ou anglaise –cela peut s’avérer, en revanche, un peu plus gênant si elle est menacée d’une prise de contrôle par des capitaux chinois, saoudiens ou syriens.

Pourtant, sur ce sujet du patriotisme économique, les Européens ne suivent pas la même ligne, chacun appliquant sa propre réglementation. Je propose donc que nous mettions en place une véritable posture commune en Europe sur les investissements étrangers pour éviter que les capitaux les plus agressifs ne jouent de ces disparités entre Etats-membres. Nous avons fêté vendredi la journée de l’Europe, et cette Europe doit plus que jamais apparaitre à la face du monde comme un ensemble économique homogène et uni, en particulier en matière de nationalité des entreprises !

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