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06/06/2008

BCE et mobilité

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 Philippe Manière
Auteur
Président-fondateur de Footprint > consultants

Sans surprise, la BCE a laissé ses taux inchangés pour un mois supplémentaire. Le taux directeur reste donc figé à 4%, et ce depuis plus d’un an.

Une dernière vague de stabilité ?
Bonne nouvelle que cette stabilité. Cela dit, il faut profiter de ce niveau-là, parce que le président de la BCE, Jean-Claude Trichet, a réaffirmé ce vendredi matin que les autorités monétaires n'étaient pas à la traîne en matière de lutte contre l'inflation dans la zone euro. Des propos qui rassureront ceux qui auraient des doutes sur le respect de la feuille de route. Mais il a également fait état de nouvelles prévisions pessimistes sur l'évolution des prix à la consommation, ce qui laisse présager un durcissement de la politique monétaire.

Haro sur l’inflation
Quand l’inflation est en ligne de mire, la hausse des taux semble inévitable, Jean-Claude Trichet l’a d’ailleurs dit très explicitement : une très légère hausse est possible en juillet. Mais ceci n’a, honnêtement, rien de très surprenant, puisque les prix dans la zone euro ont grimpé de 3,6 % sur un an à la fin mai, or, l’objectif de la BCE est précisément de les contenir à un niveau légèrement en-deçà de 2 %. Une banque centrale réagit forcément à une dérive des prix, et on sait que, de surcroît, la BCE est particulièrement vigilante sur ce sujet, en digne héritière de la Bundesbank…

La réaction des marchés
Cela dit, même s’ils sont habitués au discours "agressif" de Jean-Claude Trichet en matière de prix, les marchés ont quand même été surpris par la rapidité avec laquelle la BCE compte relever ses taux. Cette fois il va falloir vivre avec un crédit plus cher, ce qui ne tombe pas très bien puisque l’Eurozone est dans une phase de ralentissement économique, certes, dans une moindre mesure que les Etats-Unis ou le Royaume-Uni…

Le dilemme de la BCE
Des taux plus élevés pèsent nécessairement sur l’activité. Et en réalité, la BCE est confrontée à un dilemme, coincée entre la nécessité de combattre l’inflation et les incertitudes qui pèsent sur le rythme de la croissance économique. Mais elle privilégie son cœur de mission et va donc assumer le durcissement des conditions monétaires. Cela signifique que le coût de la dette publique va s’accroître un peu, que les entreprises paieront plus cher le crédit qu’elles peuvent encore obtenir dans des banques qui étaient déjà devenues assez frileuses, en particulier avec les PME, et enfin, que nous paierons aussi tous plus cher le crédit à la consommation, et le crédit immobilier. Ce qui tombe mal au moment où la pierre entre de nouveau dans un cycle de baisse…

Enfin la baisse
Cette baisse de l’immobilier est dans l’ordre des choses, après preque 15 ans de hausse. Et ce n’est d’ailleurs pas forcément mauvais sachant que l’envolée du prix de la pierre a eu un impact négatif, en particulier sur le pouvoir d’achat des ménages, à commencer les plus jeunes et les moins aisés.

Favoriser la mobilité
Cependant, il ne faudrait pas que cette baisse empêche les personnes de prendre des décisions qui sont dans leur intérêt. Je pense en particulier à tous ceux qui auraient besoin de déménager pour trouver un meilleur emploi, mieux rémunéré. Vous le savez, à l’Institut Montaigne, nous sommes très soucieux de mobilité sociale, et constatons que bien souvent changer d’emploi est le meilleur moyen d’y parvenir. Mais cela oblige parfois à déménager. Or, lorsque l’on est propriétaire, vendre et racheter ailleurs peut s’avérer très coûteux, en particulier à cause de ce que l’on appelle en général les frais de notaire et qui sont dans les faits surtout des taxes, les fameux droits de mutations.

Supprimer les droits de mutation
Pourquoi ne pas supprimer ou baisser drastiquement ces droits de mutation, très élevés en France, alors qu’ils freinent la mobilité. A tout le moins pourrions-nous supprimer cette taxe pour les salariés amenés à changer de lieu de résidence pour des raisons professionnelles. Si cette mesure était prise aujourd’hui, elle soutiendrait le prix de l’immobilier, elle réduirait la pression fiscale, et surtout elle permettrait que le ralentissement économique ne se traduise pas, ou le moins possible, en ralentissement de la mobilité professionnelle des salariés. En bref, elle présenterait bien des avantages…

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