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19/01/2018

Préservons l'alliance franco-britannique de défense

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Préservons l'alliance franco-britannique de défense
 Institut Montaigne
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Tribune de Bernard Cazeneuve, ancien Premier ministre et George Robertson, ancien secrétaire général de l'Otan.

Le 18 janvier, les dirigeants politiques et militaires français et britanniques se sont réunis au sud de Londres pour échanger sur la coopération de défense et de sécurité entre nos deux pays. Huit ans après les Accords de Lancaster House, dans un contexte géopolitique en mutation, il est essentiel de s'interroger à nouveau sur le sens que l'on souhaite donner au partenariat stratégique entre la France et le Royaume-Uni.

Depuis la signature des accords en 2010, d'importants progrès ont été réalisés. La coopération pratique, allant de la création d'une force expéditionnaire commune à l'établissement de liens dans la recherche nucléaire, fonctionne bien. La relation entre nos forces armées est solide, en partie en raison d'échanges fréquents et de la mise en place de formations conjointes. Le partage de renseignements a permis de renforcer la lutte contre le terrorisme entre nos deux pays.

Mais de nombreux défis demeurent. Certains conflits - comme au Mali et en Syrie - ont montré que les intérêts nationaux et les priorités de nos deux pays ne coïncident pas toujours. Le faible niveau des ressources budgétaires contraint à la fois le volume des activités conjointes, mais également la quantité des nouveaux équipements commandés par nos deux armées. La coopération industrielle est limitée - parfois par la concurrence entre nos deux pays pour certains marchés internationaux -, mais surtout du fait de l'absence d'une activité commerciale commune à grande échelle - initiative qui aurait pu émerger si le projet de fusion entre BAE Systems et EADS avait vu le jour en 2012.

L'initiative commune portée par l'Institut Montaigne à Paris et le King's College de Londres analysera attentivement ce bilan. Mais son principal objectif sera de porter le regard vers l'avenir afin de répondre aux questions déterminantes de la coopération entre nos deux pays.

Le terrorisme - à l'intérieur comme à l'extérieur de nos frontières - et l'instabilité de régions proches de l'Europe - de l'Ukraine à la Syrie et à l'Afrique du Nord - constituent des préoccupations sécuritaires immédiates. Les risques dans le cyberespace se sont multipliés. Pour chacun de ces enjeux, les menaces et les réponses nécessaires s'étendent au-delà des frontières nationales.

Dans le même temps, des changements politiques majeurs ont eu lieu. Les Etats-Unis manifestent clairement leur intention de limiter leurs engagements extérieurs et d'encourager leurs alliés à contribuer davantage aux coûts associés. Le Royaume-Uni a engagé un processus de départ de l'Union européenne et les 27 Etats membres restants ont lancé plusieurs initiatives pour renforcer leur coopération en matière de défense.

Dans ce contexte, une réévaluation et un renouvellement de l'alliance franco-britannique en matière de défense et de sécurité sont indispensables. Car en dépit du Brexit, les intérêts de nos deux pays restent interdépendants et nos visions du monde alignées.

Il serait insensé d'ignorer les conséquences du Brexit et d'une coopération renforcée en matière de défense entre les Etats membres qui resteront dans l'UE. Les relations entre le Royaume-Uni, devenu pays tiers, et l'Union européenne vont évoluer et de nouveaux modèles de collaboration seront nécessaires.

La défense et la sécurité dépendront toujours des ressources qui y sont affectées. La France et le Royaume-Uni représentent, à eux deux, près de 50 % de la totalité des dépenses de défense engagées en Europe. Les deux pays partagent la capacité unique - en termes de ressources humaines, d'équipement et de technologie - de projeter des forces armées sur des théâtres extérieurs.

Nos deux pays ont appris à leurs dépens à gérer la menace non résolue du terrorisme. De chaque côté de la Manche, la base industrielle de défense est solide et sera capable de maintenir cette force. Le Royaume-Uni demeurera l'un des piliers de la défense du continent.

Avec l'aimable autorisation des Echos(publié le 19/01/18).

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