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24/05/2018

Nouvelle feuille de route “Économie circulaire” : vers une société du durable ?

Nouvelle feuille de route “Économie circulaire” : vers une société du durable ?

Hélène Valade, Directrice du Développement Durable du Groupe SUEZ, membre du groupe de travail de l’Institut Montaigne Economie circulaire : réconcilier croissance et environnement.
 
La feuille de route “Économie circulaire”, dévoilée par le Premier ministre le 23 avril dernier, fixe l’ambition d’une économie 100 % circulaire, avec des objectifs chiffrés : 

  • "réduire de 30 % la consommation de ressources par rapport au PIB d’ici 2030", 
  • "économiser l’émission de 8 millions de tonnes de C02 supplémentaires chaque année grâce au recyclage du plastique", 
  • "créer jusqu’à 300 000 emplois supplémentaires, y compris dans des métiers nouveaux". 

La volonté politique de rompre avec l’économie linéaire est fortement réaffirmée, et c’est en réalité une nouvelle vision de la société de consommation que les 50 mesures de la feuille de route proposent : sortir de l’ère du tout-jetable et du gaspillage et entrer dans l’ère du durable et de la circularité des ressources. 
 
Pour cela, il faut mieux produire et mieux consommer. Mieux produire, c’est-à-dire d’abord, produire pour que cela dure plus longtemps (les produits électroménagers et les appareils de bricolage devront, à partir du 1er janvier 2020, afficher un indice de réparabilité par exemple). Pour mieux consommer, le consommateur devra être mieux informé, disposer d’une offre en matière de réparation et de réemploi, être davantage incité au tri dont les modalités seront plus simples et plus lisibles. Car l'économie circulaire est l’affaire de tous : la feuille de route incite à la mobilisation de tous les acteurs, consommateurs, entreprises, collectivités locales, sans oublier l’Etat et donc la commande publique qui est citée comme un levier important de déploiement, sans pour autant faire l’objet de mesures concrètes.
 
L’enjeu du plastique fait l’objet de cinq mesures spécifiques et sera indéniablement le marqueur d’un véritable changement d’échelle dans le déploiement de l’économie circulaire : la feuille de route vise à améliorer la collecte des emballages recyclables, des bouteilles en plastique et des canettes grâce au système de consigne, tandis que les industriels des secteurs du bâtiment, de l’automobile, des équipements électroniques et électriques et de l’emballage sont invités à prendre des engagements d’intégration de matières plastiques issues des déchets.
 
Captés à la source, ou mieux collectés et donc mieux triés, les déchets ont en effet plus de chance d’être recyclés et donc réintégrés dans les processus de fabrication : 24 mesures sont proposées pour accélérer et optimiser la gestion des déchets. Elles concernent notamment la création de nouvelles filières à responsabilité élargie des producteurs pour certains articles qui n’avaient pas de solutions de recyclage, encouragent la tarification incitative pour les autres types de déchets ménagers et visent à rendre le recyclage plus compétitif que la mise en décharge, par une fiscalité plus incitative : le taux de TVA devrait baisser sur le recyclage, tandis que la TGAP (taxe générale sur les activités polluantes payée pour la mise en décharge) devrait progressivement augmenter.
 
Ces mesures seront-elles capables de créer un vrai choc de demande de matières premières recyclées ? Avec un vrai bénéfice environnemental et économique ? 
 
Car le défi, souligné par un certain nombre de travaux dont le rapport de l’Institut Montaigne de novembre 2016, est bien celui-là : le changement d’échelle n’est possible que s’il existe une filière industrielle viable de production des matières premières issues du recyclage donc, qui aurait de réels débouchés. A cet égard, les expérimentations qui ont lieu dans un certain nombre de filières, dont celles du bâtiment, ou au titre des Engagements pour la Croissance Verte, apportent des enseignements qui devraient être davantage exploités. La feuille de route sur l’économie circulaire est très ambitieuse et traite le sujet à la hauteur de ce qu’il est, un nouveau projet de société. Le diable est maintenant dans les détails : le détail de la rédaction des mesures législatives à travers la loi de transposition de la nouvelle directive sur les déchets, ainsi que des travaux d’élaboration de la loi de finances à venir. Continuons à nous mobiliser !

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