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13/12/2017

La formation professionnelle au seuil d’une vraie transformation ?

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La formation professionnelle au seuil d’une vraie transformation ?
 Bertrand Martinot
Auteur
Expert Associé - Apprentissage, Emploi, Formation Professionnelle

Le gouvernement vient de lancer un vaste processus de réforme - "transformation" en langage macronien - de la formation professionnelle. Contrairement à la réforme du droit du travail, ce projet passe par une négociation entre partenaires sociaux, dont les limites sont fixées par un document d’orientation gouvernemental. Classiquement, celui-ci part d’un bilan, précise les buts à atteindre et suggère des solutions.

Le bilan est imparable : le pilotage actuel de la formation professionnelle par les branches professionnelles n’est pas satisfaisant : inégalitaire, complexe, inefficace, cloisonné.

Les buts à atteindre sont limpides. Il s’agit de casser les mécaniques financières et administratives actuelles pour redonner plus de liberté de choix aux individus.

La principale réforme proposée consiste à"doper" le compte personnel formation. On sait que ce dispositif, créé par les partenaires sociaux en 2013 vise à doter tous les salariés de droits à un certain nombre d’heures de formation. Ces droits s’accumulent dans le temps, sont transférables d’un emploi à un autre et permettent aux individus de financer et choisir leur formation. C’est évidemment un outil central pour la sécurisation des parcours professionnels, mais il est aujourd’hui notoirementsous-financé et incroyablement compliqué.

"Donner aux actifs la possibilité de financer aussi des prestations de conseil en évolution professionnelle"

Or, en la matière, l’autonomisation des individus n’est vraiment pertinente que si elle est éclairée, guidée par des professionnels du marché du travail. Autrement dit, les actifs n’ont pas toujours besoin de se former, mais ils ont très souvent besoin de conseil et d’accompagnement (s’orienter, construire un projet professionnel, être aidé pour trouver un employeur à l’issue de la formation…). Pour des millions de travailleurs (salariés, chômeurs, indépendants…) qui vont devoir se reconvertir dans les prochaines années, la prestation de formation n’est qu’un élément d’un "bouquet de services".

Les partenaires sociaux avaient bien perçu le sujet lorsqu’ils avaient défini en 2013 une prestation de "conseil en évolution professionnelle" censée aider le travailleur dans l’utilisation de son compte personnel de formation. Malheureusement, cette belle idée n’a  pas été financée et est restée dans les limbes.

C’est pourquoi une vraie réforme serait de donner aux actifs la possibilité de financer aussi des prestations de conseil en évolution professionnelle. Une solution naturelle serait d’ouvrir le compte personnel formation à d’autres prestations que de la formation, c’est-à-dire lui permettre de financer tout un parcours de reconversion et pas simplement le volet "formation". Or le document d’orientation ne va pas cette direction, ce qui est dommage.

Les meilleures intentions du monde resteront lettre morte si un accroissement considérable des fonds à la main des individus pour se former ne s’accompagnait pas d’un effort conséquent en matière d’accompagnement du changement professionnel. Passer de prestations de formation à des prestations d’accompagnement plus global d’une reconversion professionnelle est l’un des grands enjeux de la réforme. Ne passons pas à côté !

 

Avec l'aimable autorisation de Challenges (publié le 30 novembre).

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